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Critique de audelagandre


Laurent Loison est l'homme des titres de romans en C : Charade, Cyanure, Chimères, et maintenant Coupable. La couverture du roman, que je trouve très réussie pour son atmosphère glaçante, met en lumière la Chaise électrique. le premier mot qui me traverse l'esprit en regardant cette photo est Clémence… Est-ce de cela que l'auteur va nous parler ? Va-t-il aborder le sempiternel sujet de pour ou contre la peine de mort et des conséquences qu'elle engendre pour le condamné, mais aussi pour la victime et ses proches ?

Deux histoires, deux lieux, deux espaces-temps. L'une se déroule à Garges-Les-Gonesse où une petite frappe, Ivan tente d'intégrer un gang en passant les épreuves initiatiques requises. La dernière se révèle être un cambriolage qui tourne mal. Ivan se retrouve face à un vieillard qui n'a pas l'intention de se laisser faire. Immanquablement, les choses dérapent… L'autre a lieu à Scottsdale, Arizona. Là aussi, un cambriolage en cours tourne au drame puisque le chef de famille, le docteur Mark Francis est abattu par Patrick Stone lors d'un corps à corps musclé. Il laisse sa femme Julia, et ses 3 filles. Cette partie de l'intrigue se déroule donc aux États-Unis. À titre d'information, je rappelle que jusqu'en 1934, la pendaison était le seul moyen d'exécution des condamnés. Après cette date, on favorise l'utilisation de la chambre à gaz jusqu'en 1962. Un moratoire suspend les exécutions jusqu'en 1976, puis l'injection létale devient le seul moyen d'exécution. Tout ça pour dire que Laurent Loison devait poser une partie de sa trame dans un état américain. Cette précision indispensable évitera les reproches à venir de ces auteurs français qui posent leur intrigue en Amérique.

Deux idées de départ quasi similaires, des destins brisés, des conséquences cataclysmiques pour chacun des protagonistes. le lecteur se retrouve embarqué dans ces faits divers, un vol avec violence et un homicide involontaire, et passe les pages à se demander quel est le lien entre les deux. le plus juste serait de parler de torture des méninges. Torture des méninges il y a, à n'en pas douter ! Laurent Loison excelle dans la construction de ce puzzle où les pièces s'emboîtent progressivement sans pour autant donner une lumière immédiate aux corrélations. Je défie les plus aguerris de comprendre le fin mot de l'histoire avant les dernières pages.

Plusieurs thématiques fort intéressantes sont abordées dans ce roman, et pas des moindres. Tout d'abord le deuil et la volonté de vengeance, carte maîtresse de ce jeu dangereux, dont une seule personne possède les atouts : Julia. Elle ne reculera devant rien pour que le meurtrier de son mari soit exécuté ! Ce besoin absolu et presque irrationnel de vengeance engendre un plan de bataille audacieux, qui met en lumière les notions de commisération, de compassion, de clémence et évidemment de justice. le thème de la justice est le point d'orgue du roman. Laurent Loison utilise plusieurs points d'ancrage pour étayer son propos. D'abord, il a eu l'intelligence de créer le personnage de Kenza Longford, fille du procureur en passe de devenir gouverneur Stephen Longford. Ce personnage est le reflet d'un système judiciaire américain que je juge moribond : les hauts représentants de la justice sont parfois des personnes peu recommandables, aux agissements plus que discutables pour ne pas dire illégaux. Cet homme à la carrière fulgurante, aux responsabilités cruciales se révèle être une ordure de première. L'occasion pour l'auteur de montrer les deux faces d'une même pièce. Ensuite, il est donné au lecteur l'occasion d'entrer de plain-pied dans le système judiciaire grâce aux thèmes de culpabilité et de responsabilité, de gradation de la sanction, de petits arrangements entre amis, de menaces et de chantages en tout genre. En somme, Laurent Loison pose la question de l'équité de la justice, mais aussi de la confiance ou de l'absence de confiance qu'elle dégage. Enfin, le débat sur la peine de mort est un élément essentiel du roman puisque c'est sur ce débat que le roman se fonde. de ce débat découle celui du pardon, du besoin fondamental de l'être humain d'être pardonné pour ses actions. le personnage de Michel en est un excellent exemple.

Cela m'amène à la fin : « Quel est le prix à payer pour sauver son âme ? » Seules les dernières pages du livre vous permettront de comprendre où l'auteur a voulu en venir, et lorsque la vérité crue et brutale apparaît, le lecteur rembobine le fil du roman pour mieux appréhender l'horreur de la situation. Cette fin est extrêmement bien pensée, très bien déroulée, elle met en lumière le manichéisme des personnages, la cruauté des actions, l'atrocité des conséquences et fait naître une improbable empathie pour certains personnages. le coupable n'est pas toujours celui qu'on croit…. Laurent Loison signe ici un roman très abouti, à l'intrigue parfaitement ficelée, mais il apporte également une dimension supplémentaire de réflexion sur des problématiques sociétales essentielles. Les grands du noir ont compris que sous couvert de meurtres sordides, ils pouvaient aborder des thématiques fondamentales. Laurent Loison fait partie de ceux-là.

Lien : https://aude-bouquine.com/20..
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