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Critique de gouelan


« Ce que j'ai lu était épatant. C'était lumineux, brillant et ça m'a traversé, ça m'a chauffé comme le soleil et éclairé comme un projecteur. Voilà l'effet que ça m'a fait… Mais il se peut bien que je ne connaisse pas grand-chose. »
Ainsi se présente Martin Eden, marin, à l'âme vagabonde et bagarreuse, sensible à la beauté, au début de son aventure. Une aventure où il va découvrir la joie d'apprendre, de se fondre dans l'art, la poésie, la philosophie.

Au bout de son voyage, Martin Eden, toujours le même, n'est pourtant plus autant émerveillé par le monde qui l'entoure. Il a perdu sa naïveté et sa joie de vivre. Comme s'il s'était encombré d'un savoir trop lourd, d'un regard sur les hommes, bourgeois ou ouvriers, trop appuyé, trop incisif. Moins sauvage, moins insouciant, il en devient plus vulnérable, désabusé. le vernis a craqué sous le poids de la vérité.

La beauté qu'il désirait tant écrire devient fange lorsqu'elle ne représente plus qu'un moyen de gagner de l'argent, de devenir célèbre, sans qu'on reconnaisse pour autant sa juste valeur. La beauté « se prostitue ».

Il ne cherchait pas le succès, il vouait juste aimer, comprendre, savoir. La culture lui en donnait les moyens.
Mais il savait déjà tout cela. Il pouvait déjà l'exprimer dans ses mots d'argot qui dessinaient si bien la beauté sauvage, sans la disséquer. Son talent était de s'exprimer avec la puissance qui lui était propre : « d'attraper des papillons à coups de massue ». L'éducation lui a permis d'affirmer son intelligence, d'accomplir ses rêves. Trop tard sans doute.


Il y a tout cela et bien plus encore dans ce roman d'apprentissage. Une satire de la bourgeoisie du début du XXe siècle, une vision accablante de l'état de pauvreté et d'avilissement de la classe ouvrière, l'hypocrisie du monde littéraire qui n'a pas toujours les outils pour découvrir les talents véritables. L'argent qui fait la loi, avilissant la beauté, l'art et les hommes. L'éducation qui n'est pas toujours synonyme d'intelligence. La culture que l'on porte comme une étiquette, sans en être digne.

Vers la fin, j'ai eu l'impression que le personnage se confondait avec celui de Charlie dans : « Des fleurs pour Algernon ». Un peu arrogant, ne trouvant plus sa place parmi les hommes, prônant la loi du plus fort.
Pourtant Martin n'est pas un simple d'esprit, loin s'en faut, et il ne pourra plus faire marche arrière. Il gardera son bagage. Mais, ayant découvert le monde des livres, il a aussi découvert la bêtise, là où il croyait voir des étoiles. Ses pas l'ont emmené vers un autre rivage, fait de solitude et de désolation. Les cordes de sa harpe ne font plus vibrer la mélodie de ses souvenirs simples et heureux. Le vagabond a perdu son étoile.

« Il n'avait plus le cœur assez simple pour vivre pleinement une existence aussi primitive. » .
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