AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Osmanthe


Après sa première enquête narrée dans les soeurs de Pékin, nous retrouvons notre inspecteur principal de Nankin Tian Haifeng. Il est cette fois appelé à prêter main forte loin de ses bases, à son homologue de Qingdao, Zhou Yongkang. C'est qu'un ponte du Parti basé à Nankin, Fu Gaofei, a été retrouvé assassiné sur la plage de cette ville côtière de la mer de Chine, connue pour ses cerfs-volants, sa bière et ses anciennes villas allemandes de l'époque des concessions 1920-1930. La victime n'est autre que le directeur de la commission du logement et de la construction urbaine et rurale de Nankin. Les deux enquêteurs se jaugent, se rudoient parfois, s'estiment clairement, ne se disent pas tout, sous la pression des chefs locaux du Parti qui tiennent à une enquête rapide et efficace, qui ne devra sûrement pas éclabousser l'image du Pouvoir. Pas simple, d'autant que Gaofei s'avérait avoir un certain goût pour les yachts de cette cité balnéaire en plein boom des affaires et du tourisme, pour les femmes qu'on achète pour une nuit et l'alcool. Pour l'aider, Haifeng rencontre par chance une zonarde aux cheveux rouges et baskets vertes, illuminée par sa passion pour les romans anglais de Jane Austen, dont elle a endossé les nom et prénom, et de Thomas Hardy. Elle a été de près ou de loin témoin du meurtre, en tout cas elle en sait beaucoup, mais ne livre des indices qu'au compte-goutte. Au fil de leurs rencontres, Haifeng gagne peu à peu sa confiance, et obtient l'arme du crime, une lame-à-lancer d'arts martiaux souillée qui a lacéré et infecté le corps. Cependant, après quelques jours, une mauvaise nouvelle l'inquiète : son fils de 17 ans, Wei, a disparu à Nankin. Les maigres indices récoltés à Qingdao et une explosion de pipe-line de la compagnie Chinoil en plein centre-ville qui fait 50 morts et lui blesse une jambe, le décident enfin à rentrer à Nankin. Alors qu'il perd espoir, son fils Wei réapparaît très amoché avec sa copine Xiao Lin. Les redoutables Chengguan, forces de police urbaine, les ont tabassés. Les deux jeunes ont un peu trop clairement contesté la destruction de la petite fabrique de lanternes familiale de Xiao Lin, monde traditionnel d'hier qui doit laisser place nette aux constructions modernes qui poussent comme des champignons à Nankin, comme à Qingdao, et comme toujours ailleurs en Chine, avec son lot de corruption et de conflits d'intérêts…Cette histoire ne va pas manquer d'éclairer Haifeng dans son enquête sur la mort de Gaofei, dont le nom revient décidément dans bien des sociétés et des affaires tant à Nankin qu'à Qingdao…Au bout de ces investigations, il découvrira qui avait intérêt à le supprimer…

Ce deuxième volet des enquêtes de notre policier chinois se lit avec tout autant de plaisir que le premier. L'essai est transformé. L'enquête a l'air d'avancer très tranquillement, mais on ne s'ennuie pas car les personnages et le paysage sont bien incarnés : c'est un plaisir de suivre les deux policiers s'observer, se jauger, dans une ambiance parfois tendue mais respectueuse et finement humoristique, souvent autour d'une bonne soupe et de savoureux raviolis. On regrettera, un peu comme dans le premier épisode de cette série qui s'amorce, que l'auteur laisse parfois tomber des personnages dont il n'a peut-être pas su quoi faire à l'avancée de son récit. de plus, il faut signaler à l'éditeur quelques coquilles, sans gravité cependant.

La grande force de Martin Long, écrivain qui vit à Paris et écrit en anglais, c'est de nous immerger dans la société chinoise actuelle comme personne. On sent qu'il la connaît bien, cette Chine où il voyage souvent, s'y imprègne de faits divers. Une Chine de tous les excès en terme d'urbanisation galopante et capitalisme triomphant, où les traditions et le patrimoine historique sont tristement saccagés et sacrifiés sur l'autel de l'argent-roi. Parlant chinois, il n'hésite pas à parsemer son récit de mots et expressions idiomatiques chinoises, avec l'excellente idée de les rassembler en fin de texte dans un lexique. C'est intelligent, absolument digeste, et renforce la couleur locale.

Un très bon livre donc, que j'ai, comme Les soeurs de Pékin, reçu par babelio et les éditions In Octavo, que je remercie chaleureusement. Vivement le prochain épisode des tribulations de ce policier chinois dans son fascinant pays !
Commenter  J’apprécie          280



Ont apprécié cette critique (28)voir plus




{* *}