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Françoise Brun (Traducteur)
EAN : 9782743610210
72 pages
Payot et Rivages (04/11/2002)
3.82/5   20 notes
Résumé :
Ce court récit se déroule sur un temps très resserré, à peine un mois et demi en août-septembre 1943. Période historique tragique pour l'Italie : les Américains ont débarqué en Sicile au printemps et remontent peu à peu la péninsule, chassant les populations vers le nord ; pour la première fois le pays connaît les bombardements, le rationnement, les représailles. Jusqu'à la date historique du 8 septembre 1943 où Mussolini est démis de ses fonctions de Duce par le Gr... >Voir plus
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La narratrice fait ressurgir son regard de douze ans et, comme on décrirait un tableau, en s'arrêtant sur l'environnement, sur les physiques des uns et des autres, leurs vêtements, leurs attitudes, sur la lumière déclinante, le soleil étant parti se cacher derrière la montagne, elle nous ramène dans la Vallée d'Aoste en août 1943.
Une partie de tennis a eu lieu entre jeunes. Ettore est là, frêle, dans son chandail à rayures rouges et bleues à côté De Paola, sa blancheur laiteuse comme « una Paloma blanca » de la chanson qu'ils écoutent en boucle sur le gramophone. Dans sa chemise bleu ciel, il y a Augusto qui rejette en arrière ses belles boucles noires. Pirro est un jeune impétueux, aux paroles agressives qui ne font pourtant pas fuir sa soeur amoureuse. Et quelques autres…
Ils sont venus se mettre à l'abri de la guerre, fuyant les villes de Milan, Turin ou Rome que les Alliés bombardent. Ils attendent que l'Histoire continue de dérouler ses funestes évènements.

Mal fagotée du fait de la guerre, mal nourrie dans cet hôtel, le corps dérivant vers l'adolescence, notre narratrice dont on ignore le prénom (peut-être l'auteure elle-même au même âge et à la même époque ?), se découvre malheureuse mais pour une tout autre raison. Elle vient de quitter le fleuve paisible de l'enfance pour éprouver le tumulte et la tristesse d'un premier amour non partagé. Avec sa peine de coeur, elle observe alors les amours qui se forment, les personnes et tensions qui ont marqué cet été 1943 jusqu'à la démission de Mussolini et l'invasion allemande qui sonneront le retour dans leurs villes respectives.

Ce très beau récit, très court, dont on savoure pleinement la magnifique plume, laisse le temps de s'attarder sur des instantanés qui décrivent une jeunesse ordinaire rattrapée par l'ignoble machine de la guerre déployant son sinistre ouvrage. C'est un double tournant qui s'opère, celui de la capitulation du fascisme face aux forces alliées avec ses futures conséquences sur le devenir de ces jeunes et, dans le malheur, l'adieu à l'insouciance de l'enfance de la narratrice.

Tristement, la musique de la Paloma sur le gramophone à manivelle s'éloigne, laissant le terrain de tennis à l'abandon, une cicatrice de la première peine de coeur et des destins marqués par la Seconde Guerre.

Je remercie l'amie babéliote qui m'a fait découvrir, à travers ces quelques pages, l'intensité de ce souvenir d'une auteure italienne talentueuse.
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Un journal écrit plus de 60 ans après les faits par l'auteur elle-même.
Récit à hauteur d'une enfant de 12 ans dans une Italie au bord de la crise politique et de l'effondrement du régime du "Ducé"; elle revient aussi sur le quotidien d'une bande d'enfants, réunis avec leurs familles, tous réfugiés dans un hôtel du Val d'Aoste.
Parties de tennis, amourettes, passions, peines et peurs de l'avenir sont les thèmes abordés dans ce petit livre de 72 pages.
Un peu gênée par le style d'écriture choisi, on passe des souvenirs d'une pré-adolescente avec des phrases peu structurées à d'autres qui relèvent de la poésie bien plus mature.
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C'est un récit tout simple. Un récit qui se situe dans une époque bien précise dans un endroit tout aussi précis : août-septembre 1943, au Val d'Aoste. C'est là que se sont réfugiées quelques familles ayant fui Rome et ses bombardements. C'est là que la vie semble s'être arrêtée. Semble, ai-je dit. Mais la vie est en perpétuel mouvement, surtout quand on a douze ans et que la moindre activité, un regard troublé ou troublant, un geste équivoque, prennent des allures d'événements susceptibles de changer le cours de l'Histoire, au même titre que cette guerre qui se joue au loin et qui va rattraper ce petit monde qui se croyait à l'abri.

Avec le 8 septembre et la chute du régime fasciste, les jeunes vont devenir des adultes d'un seul coup ou presque. Finis les matchs de tennis, les soirées à danser et à flirter. Une nouvelle vie va commencer. Il y aura des drames et des départs. Et une gamine qui se souviendra de cela des années plus tard.

Récit composé de souvenirs décousus, finement relatés par Rosetta Loy, un des grands noms de la littérature italienne, Ay, Paloma, qui tire son nom d'une chanson de l'époque, est un petit bijou. Rien de moins.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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Ils sont jeunes, ils ne sont plus des enfants, mais ils ne sont pas encore des adultes.
Ils sont confinés dans un coin de la Vallée d’Aoste, ils habitent le grand Hôtel Brusson et la guerre est à leur trousse.
Nous sommes en août 1943, ils ont des chaussures trouées, ils ont faim.
Pour tromper l’ennui ils jouent au tennis, mais ils jouent aussi la comédie de la vie : tomber amoureux, souffrir, sentir le plaisir de souffrir parce qu’un autre ne vous aime pas.
Nous sommes dans la tête de l’héroïne : elle ressemble étrangement à l’auteure au même âge, elle s’appelle Paula, elle a 12 ans, et avec ses parents et ses deux sœurs plus âgées elle découvre la vie. Elle tombe amoureuse de Antoine, qui a perdu son bras dans un accident de vélo, mais lui se moque bien d’elle, elle n’a rien pour elle comme on dit alors.
Antoine est amoureux de Milly, comme tous les garçons du village, mais elle se fiche d’eux, elle n’a d’attention que pour Pierre.
Et la comédie amoureuse se poursuit sans que personne n’y trouve son compte.

« Ay, Paloma » c’est le nom d’une chanson qui dit : « Ay, una Paloma blanca como la nieve, como la nieve, ay, me has arruinado et alma, como me duele, como me duele… » et c’est la disque qui tourne sans arrêt sur le gramophone qu’écoutent les adolescents réunis le soir.
Mais bientôt le mois d’août se termine et nous sommes le 08 septembre 1943, c’est la destitution de Mussolini du Grand Conseil fasciste. Bonne ou mauvaise nouvelle ? Les esprits se déchaînent, les adultes se déchirent et les enfants assistent aux empoignades.

Après ? Après, chacun ira rejoindre son destin : celui qui est juif sera renvoyé vers les camps, celui qui opte pour le Duce rejoindra les rangs de la République, le troisième choisira le camp des partisans qui ont pris le maquis.
L’héroïne, elle, n’aura pas choisi, mais plus rien ne sera comme avant.
En redescendant de la vallée d’Aoste pour Rome ou pour Milan, ils auront définitivement quitté la pays de l’enfance.

C'est la curiosité qui a constamment guidé l'écrivain, comme un courant souterrain. La curiosité va de pair avec la mémoire. Rosette Loy joue avec les souvenirs de sa propre enfance pour nous rendre vibrante la présence de cette petite qui n’est déjà plus une enfant, et qui souffre de ce que personne ne s’intéresse à elle.
Une écriture dense, très proche des personnages qui s’incarnent sous nos yeux.
L’un des romans les plus resserrés de cette auteure italienne de renom (ses autres romans « la bicyclette », « un chocolat pour Hanselmann » … sont connus dans toute l’Europe) , peut-être son plus beau.

Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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Rien n'échappe à cette gamine à laquelle nul ne prête attention. Par contre sa soeur aînée, Marcella, attire tous les regards des garçons. La cadette est donc réduite à observer la bande de jeunes gens qui dansent et flirtent en écoutant "la paloma" :
« Ay, una paloma blanca como la nie como la nie ay, me has arruinado el alma, como me duele, como me duele.. ».
Son coeur bat aussi pour Augusto et elle passe devant chez lui :"
Si j'ai de la chance, il arrive qu'Augusto soit sur le balcon , son bras unique posé sur la balustrade, et je tourne alors rapidement la tête de l'autre côté parce qu'en même temps que le bonheur de croiser son regard m'arrive un coup au coeur, pour le malheur inéluctable d'être moi, la disgracieuse.
Pour n'avoir rien, moi, de Marcella, ni ses charmantes petites dents de lapin, ni ses sandales de toile avec plein de lanières verticales qui s'entrecroisent sur ses orteils délicats. Ou quelques-uns des attraits de ma soeur aînée : un beau sourire, des cheveux bouclés et soyeux. J'ai moi des sabots qui font du bruit et ma robe à vermicelles qui fait mal rien qu'à la regarder, des cheveux courts et lisses d'un châtain indéfini. le coeur battant, contre tout ce que je désire, j'accélère le pas.
Toute cette société estivale est insouciante vit agréablement au val d‘Aoste, quand surviennent des évènements extérieurs qui entraînent des disputes : la démission de Mussolini, ou les lointains bombardements.
Les Allemands sont bientôt là : chaque ado choisit son camp - et son rôle, dans la tragédie qu'on n'avait pas vu - ou voulu voir, venir.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Le soleil s'en va, prêt à disparaître derrière la montagne. Comment s'appelait-elle cette montagne qui chaque soir l'engloutissait presque d'un seul coup, je ne m'en souviens plus. Je vois l'ombre qui descend telle une langue retirer de la pelouse les dames avec leur tricot tandis que les enfants aux voix aiguës et stridentes s'égaillent comme des chèvres pour redescendre par le sentier. Aiguilles à tricoter et pelotes colorées de laine rangées dans les sacs, les mères avant de les suivre appellent le Nacarun pour qu'il rentre les chaises de toile dans le petit appentis. Là-haut survivent des îlots de crépuscule vert et or sur les prés merveilleusement déserts, abandonnés à leur tour par les vaches revenues dans l'obscurité des étables.
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A présent, je cours vers Augusto, le poing fermé : "J'en ai attrapé un, crié-je triomphante, j'ai attrapé un grillon !" (...) Augusto est toujours penché, les jambes de part et d'autre du ruisseau : il se relève et le regarde, il regarde mes doigts serrés. "Donne-le-moi", dit-il en tendant une paume grise de boue. Sur cette paume, je pose ma main au poing serré, je la lui abandonne en même temps que mon coeur, et un serment de fidélité éternelle pour le meilleur et pour le pire. Ses doigts se referment avec force autour des miens. J'ai la bouche sèche. (...) mes doigts immobilisés par l'émotion, sont paralysés à l'intérieur des siens.
Jusqu'au moment où sa voix m'arrive comme un coup de fouet : "Tu vas l'ouvrir oui ou non cette main ?" La voix agressive, énervée, et le regard vert-bleu qui me fait me sentir comme une idiote, pire, comme la plus stupide des naïves.
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Le malheur s'appelait Augusto. Tout a commencé la fois où il descendait le long de la route du tennis avec sa chemise bleu ciel et son short en toile marine. Il marchait vite, ses jambes longues et robustes indifférentes aux aspérités du sentier, et les petits cailloux jaillissaient de sous ses semelles. Ses socquettes entre le gris et le beige retombaient en plis mous autour de son talon, avalées à chaque pas par les grandes sandales poussiéreuses. Ses boucles noires,désordonnées, se soulevaient dans la descente et ses yeux se découpaient en fentes minces entre les cils, d'un bleu-vert intense, brillants comme deux petites lames. J'avais l'impression de sentir son odeur d'herbe et de toile sale. Il descendait du tennis et une balle jalousement conservée gonflait encore une de ses poches tandis qu'à sa main droite pendait sa Slazenger, enfermée dans son étui écossais. Sa manche gauche en revanche se balançait, vide, comme le petit drapeau d'un pays englouti par une antique catastrophe."
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Paloma, comme l'appelle parfois Ettore, à cause de la chanson qui dit: « Ay, una Paloma blanca como la nieve, como la nieve, ay, me has arruinado el alma, como me duele, como me duele...» et à côté d'elle il paraît encore plus souffreteux, tout engoncé dans son chandail à rayures rouges et bleues; en tout cas moi je trouve.
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Est-ce qu’on peut être malheureux à douze ans, profondément, totalement malheureux, au point que ce malheur devienne un concentré de tous les battements de cœur connus jusque là ? Et demeurer en même temps réceptif à la plus petite parcelle de ce qu’on est en train de vivre ? Comme si ce mois d’août avait marqué le partage des eaux entre le calme écoulement de l’enfance et la bousculade impétueuse et désordonnée de sentiments nouveaux, lancés ensemble dans un goulet étroit comme celui où se précipite l’Evançon.
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Vidéo de Rosetta Loy
Samedi 19 septembre 2020 / 9 h
Florence Seyvos et Anne Alvaro nous font parcourir l'univers de Sisyphe est une femme, l'essai de Geneviève Brisac, à travers l'évocation d'Alice Munro, Marguerite Duras, Rosetta Loy...
Florence Seyvos est écrivaine et scénariste. Les Apparitions, Prix Goncourt du premier roman 1995 et le prix France Télévisions 1995. L'Abandon, 2002, le Garçon incassable, 2013 (prix Renaudot poche). Elle a également publié à l'École des loisirs une dizaine de livres pour la jeunesse et coécrit avec la réalisatrice Noémie Lvovsky les scénarios de ses films, comme La vie ne me fait pas peur (prix Jean-Vigo), Les Sentiments (prix Louis-Delluc 2003) ou Camille redouble. Elle publie en septembre 2020 Une bête aux aguets, aux éditions de l'Olivier.
Anne Alvaro est actrice de théâtre et de cinéma. Elle a joué dans des pièces mises en scène par Georges Lavaudant, Claude Guerre ou Hubert Colas. Au cinéma dans le film Danton d'Andrzej Wajda en 1981, et dans quatre films de Raoul Ruiz. En 1999, elle reçoit le César de la meilleure actrice dans un second rôle pour son rôle dans le film d'Agnès Jaoui, le Goût des autres et une seconde fois en 2010 pour le personnage de Louisa dans le Bruit des glaçons de Bertrand Blier.
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