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Commissaire De Luca tome 3 sur 4
EAN : 9791022611015
208 pages
Editions Métailié (18/02/2021)
3.21/5   39 notes
Résumé :
Pendant le fascisme, le commissaire De Luca était le meilleur flic d’Italie. Avec la guerre froide et l’arrivée de la frivolité médiatique, les homicides deviennent de plus en plus étranges et on lui demande de devenir un nouveau type de policier. Dans une Bologne sous la neige, quelques jours avant Noël 1953, la très belle épouse d’un professeur universitaire est retrouvée noyée dans une baignoire. Pour découvrir ce qui s’est passé, la police a besoin d’un vrai lim... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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L'intrigue se déroule à Bologne sur une courte période, débutant quelques jours avant Noël. Nous sommes en 1953. Une femme a été assassinée dans un petit appartement. La voisine qui habite l'étage situé au-dessous a prévenu la police.

La victime est Stefania, l'épouse du professeur Cresca, victime quelques mois plutôt d'un étrange accident qui a causé également la mort d'un enfant. On fait appel aux lumières du commissaire De Luca, plus ou moins sur la touche car policier durant la seconde guerre mondiale, donc suspecté de collusion avec les fascistes…

Il est assisté dans son enquête par un jeune policier, Giannino, féru de jazz et on va suivre le duo à un concert où ils vont rencontrer une jeune femme dont la voix ressemble à celle de Lena Horne.

J'ai beaucoup aimé me retrouver à cette époque si particulière : la seconde guerre mondiale n'est pas si loin, la guerre froide bat son plein, on ne sait plus qui espionne qui et on a la gâchette facile… il y a des règlements de compte dans l'air, des policiers ripoux…

Bologne, dans le froid de l'hiver : il neige et il faut bien dire que le chauffage n'était pas particulièrement au point à l'époque. L'atmosphère est glauque, et les méthodes d'investigation limitées, les experts n'étaient pas encore entrés en scène.

Quel plaisir d'arpenter ses rues où l'on peut se faire trucider à tout instant, sur fond de jazz et de musique italienne, de belles brunettes, aux jambes divines qui aiment bien se déplacer pieds-nus, et surtout notre belle chanteuse Claudia, alias Facetta Nera, dont notre commissaire s'éprend au passage… sur fond de cuisine italienne qui fait saliver alors que De Luca est quasiment anorexique et soigne son insomnie à la caféine (ah les vertus de l'expresso !)

De Luca, ex-commissaire qui pourrait le redevenir, que l'on appelle Ingénieur, est un personnage sympathique et attachant qui met un point d'honneur à résoudre une enquête plombée d'avance, sous les ordres du commandeur d'Umberto qui s'empiffre de bomboloni, sorte de beignets à la crème, plutôt du style barbouze, ripoux comme on veut…

Carlo Lucarelli multiplie les pièges, les fausses pistes jusqu'au bout du roman pour notre plus grand plaisir. Il nous offre au passage des coupures de journaux de l'époque de la guerre froide, ce qui intéressait la population à cette époque pour nous donner le temps de souffler un peu entre deux coups d'accélérateur sur la belle voiture de Giannino dont la « conduite sportive » comme disent les djeuns donne souvent le tournis.

C'est la première fois que je lis un polar de Carlo Lucarelli et cela me donne envie de continuer à explorer son univers. Son style est plaisant, ses réflexions sur le démenti plausible, ou le crime parfait ou perfectible ou encore la manière de « gérer l'imperfection » ou ses comparaisons avec les différentes races de chien pour étiqueter les flics, les ripoux, ceux qui sont doués…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Metailié qui m'ont permis de découvrir ce roman ainsi que son auteur.

#Uneaffaireitalienne #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Giallo alla bolognese.
Nous avons connu cette série ancrée dans la République de Salò, puis dans l'après-guerre (Carte blanche,'L'Eté trouble et Via delle Oche).
Nous somme en 1953, le commissaire De Luca n'est plus en odeur de sainteté. Cantonné à des tâches subalternes, il est réintégré sous une fausse identité pour enquêter en sous-marin sur l'assassinat de l'épouse d'un universitaire .

Intrigo italiano. Il retorno del commisario De Luca.est un giallo classique, dont on suit l'intrigue avec un peu de distance. Se détache plutôt de ce roman noir la figure de Claudia une jeune femme métisse, fille d'un Bolonais et d'une Abyssine , qui a grandi en Italie, travaillé comme repiqueuse dans les rizières ambiance Riz amer de Giuseppe de Santis , combattu avec les Partisans dans les montagnes, et qui chante désormais dans les clubs de jazz en rêvant de faire un disque et de se présenter au festival de SanRemo.
Se détache également, et c'est là que Carlo Lucarelli donne la pleine mesure de son talent de romancier , le portrait d'un pays portant encore les séquelles de la guerre, mais en pleine mutation sociale - l'Affaire Wilma Montesi est en train se secouer le pays-, culturelle -l'American Way of Life, le jazz- et surtout politique, le pays entrant de plein pied dans le jeu de dupes que mènent les Etats-Unis et l'URSS en Europe comme partout ailleurs.

De Luca toujours aussi investi, intellectuellement et affectivement dans ses enquêtes, va devoir louvoyer et apprendre de ces nouveaux enjeux politiques et stratégiques différents de ceux avec lesquels il avait dû composer sous Mussolini.
Une Affaire italienne semble donc marquer un tournant dans l'existence pourtant riche du commissaire De Luca, comme dans celle de la politique internationale de l'Italie, à suivre dans Peccato Mortale et L'inverno più nero.

Je remercie les éditions Métailié pour l'envoi de ce roman noir reçu dans le cadre de l'Opération Masse Critique Mauvais Genres.
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Rien de tel qu'un bon polar pour l'été.

Ici le personnage principal est un drôle de flic, De Luca, qui enquête incognito sur le meurtre d'une femme, assassinée dans sa baignoire, du sang partout dans l'appartement.
Le récit s'ouvre sur un accident de voiture. Notre héros est à bord, son lieutenant conduit sur une route italienne dangereuse sous la neige. Va-t-il mourir ?

Il n'est pas officiellement en mission – on comprendra pourquoi plus tard, son passé pendant la période fasciste n'étant pas reluisant. Pour le moment nous sommes à Bologne en 1953 et il fait froid.

De Luca doit déjouer de nombreux pièges et se concentrer sur l'enquête. Il a des indices, notamment ce jeune garçon, qui vit un étage plus bas que l'appartement où a été commis le meurtre, et qui a croisé un homme à tête de monstre : l'assassin peut-être ?
Mais il y a plein de chausse-trappes et De Luca doit déjouer les pièges pour rester en vie.

Et puis il y a le jazz, et cette rencontre improbable avec la belle chanteuse. Celle-ci a plusieurs identités : Facetta Nera, en référence à sa peau brune, mais aussi Claudia. Elle rêve de devenir une vraie chanteuse de jazz et de faire un album. Mais son Manager, ou bien celui qui la soutient dans ses démarches, est retrouvé pendu subitement : faut-il voir l'action de tête de monstre ?

Très documenté sur la période post-fasciste, le décor est très bien planté et l'intrigue bien cousue.
Nous sommes aussi en pleine guerre froide, et on découvre au fil de l'enquête qu'il y a de liens obscurs entre l'Italie et la Russie …

Carlo Lucarelli mène son affaire italienne avec talent, et nous le suivons avec plaisir, jusqu'au rebondissement final.
Un bon bol d'air frais qui nous replonge quelques années en arrière pour une équipée qui en vaut la peine : AVANTI !
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Livre reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique.
Bologna insanguinata. Bologne la sanglante. Dans la garçonnière d'un homme mort dans un accident de voiture deux mois auparavant, le corps de son épouse est retrouvé. Nue, noyée dans une baignoire, Stefania Cresca a reçu aussi des coups à la tête. Son sang tapisse une scène de crime marquée par des vinyles de jazz répandus par terre et brisés, et par de sérieux indices qui montrent que l'on a utilisé la machine à écrire au moment du meurtre. Les fêtes de fin d'année approchent, le froid et la neige parcourent les rues bordées d'arcades de la capitale de l'Emilie-Romagne. Pour enquêter discrètement, Rome envoie un homme au profil très particulier. Giovanni de Luca, aidé du jeune bellâtre Giannino, est chargé de faire la lumière sur une affaire bien sombre. Ancrant son Affaire italienne dans une Italie encore tourmentée par les années de guerre, Carlo Lucarelli reprend les codes du noir en leur donnant une teinte transalpine très marquée. Il réussit ainsi à lui donner une ambiance aussi hivernale que lumineuse.

L'année 1953 se termine, et avec elle les évènements marquants : la mort de Staline, l'accession au trône britannique d'Elisabeth II, la fin de la guerre de Corée. L'Italie est encore en reconstruction, car le fascisme a laissé de fortes traces. Pas tant dans les bâtiments, d'ailleurs : la piazza Maggiore est superbe, la porte Saragozza a tenu le coup ; les traces du fascisme sont plutôt à chercher dans le coeur des hommes et des femmes qui se sont battus, dans un camp ou dans l'autre, une décennie plus tôt. Sans être trop précis à ce propos, Lucarelli laisse entendre que De Luca a aussi joué son rôle. En tant que commissaire, il a servi dans la police politique fasciste. Dans les regards d'inconnus croisés dans la rue, il sent encore la suspicion qui pèse sur lui : celle d'avoir servi, un jour, dans le camp des oppresseurs. A vrai dire, le monde a changé et n'a pas changé en 1953. La police italienne est toujours marquée par l'empreinte mussolinienne et ses méthodes de barbouzes. D'un autre côté, c'est désormais la guerre froide entre Américains et Soviétiques qui définit le paradigme politique de l'époque. A Bologne se jouent les mêmes jeux d'influence qui opposent capitalistes et communistes, CIA et KGB ; intellectuels et policiers ont à choisir et un mauvais choix peut rapidement mener dans une impasse, ou à la mort. Dans une Bologne surnommée la rouge (Bologna la rossa), la nouvelle vision du monde a forcément un peu plus d'importance qu'ailleurs. Ce contexte politique et historique n'est pas seulement une toile de fond. Lucarelli personnalise l'ancien et le nouveau rapport au monde : la chanteuse, Claudia, a appartenu aux partisans italiens luttant contre les fascistes tandis qu'Aldino, le pharmacien jazzman de bas étage, fricote avec les Soviétiques. Lorsque la plaie est encore vive, tout ce qui y bouge a tendance à brûler un peu.

En réalité, on pourrait se demander si Carlo Lucarelli veut vraiment résoudre l'affaire qu'il propose. Si l'affaire piétine sérieusement, c'est bien sûr parce que les indices comme les témoins viennent à manquer très rapidement. Mais l'auteur a peut-être aussi sa part de responsabilité. Tout cela n'est-il alors qu'un grand voile d'apparence, tendu par le narrateur, pour nous faire voir à travers ce qu'il veut réellement nous montrer ? Apparence d'une scène de crime sordide, où rien ne colle vraiment : pourquoi a-t-on utilisé la machine à écrire au moment du meurtre ? Pourquoi les affaires de la victime ont-elles disparu ? Apparence d'une équipe d'enquêteurs : pourquoi De Luca se fait-il appeler Morandi, et pourquoi l'appelle-t-on ingénieur, et non commissaire ? Pourquoi lui avoir imposé la présence de Giannino, beau parleur et certes fin connaisseur de la ville, mais sans réelle expérience policière ? Pourquoi demander à de Luca de faire la lumière sur le meurtre de Stefania Cresca et pas sur les autres morts suspectes, à commencer par celle de Mario Cresca ? Et pourquoi D'Umberto, le chef de service, ne semble-t-il pas accorder une grande importance à la résolution des crimes ? Les apparences sont parfois trompeuses. Avec son Affaire italienne, Carlo Lucarelli livre un semblant de roman noir.

Il est paradoxal que le roman, écrit dans une langue simple et dynamique, produise à la fois deux ambiances contradictoires. L'une est hivernale, à cause de la saison décrite, à cause du froid qui engourdit les membres, provoque les quintes de toux et oblige à chauffer les chambres au poêle à bois. L'autre est lumineuse, car c'est une Italie riche et délicate qui est décrite. Sans doute l'ambiance musicale - car l'époque est au jazz venu d'Amérique - réchauffe-t-elle aussi, et cette musique d'espoir porte sans doute en elle les promesses d'un pays renouvelé. Mais Bologne n'est pas que rossa ; elle est aussi dotta et grassa, docte et grasse, elle promet les nourritures pour l'âme et le corps. du plat de grenouilles frites aux tortellini en passant, même, pour l'austère De Luca, au café noir, c'est une Italie douce et presque maternelle qui apparaît, loin des horreurs des hommes. Il y a enfin ce goût du beau, que rendent les pages des magazines féminins de mode, que démontrent les lignes élégantes de la Lancia Aurelia de Giannino, que matérialisent les costumes sur mesure et les chaussures cirées du même Giannino. Une Affaire italienne est un roman noir égayé de quelques couleurs. Ce sont les belles choses - un plat parfumé et rassurant, une carrosserie racée et nerveuse, la passion naissante entre un obscur inspecteur et une lumineuse chanteuse d'origine éthiopienne - menacées par des mains invisibles : c'est l'innocence à peine retrouvée et déjà menacée.
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Une Affaire italienne, Intrigo Italiano. Il ritorno del commissario De Luca dans la version originale parue en 2017, a été publié par les éditions Métailié en 2021. L'écriture sobre, dans un style souvent journalistique, fait ressortir l'art de la mise en scène filmographique propres à l'auteur: "De Luca le vit en premier, le tournant qui pliait la route comme un coude, et instinctivement, ses pieds écrasèrent le plancher de l'auto, sa main gauche agrippant la poignée avec une force à faire mal aux doigts, la bouche encore béante.
Giannino s'en aperçut un instant après, freina avec un autre juron toussé entre les dents et tourna le volant pour se rabattre à droite, de nouveau derrière le camion, mais en fait il était trop tard." (Page 11)..."Il était en haut de l'escalier, sur le dernier palier étroit qui, au-delà d'une rambarde basse et carrée, donnait sur le vide. Il y avait des rubans adhésifs collés sur la porte avec l'inscription “Police” au crayon, et le tampon de la Questure. De Luca les montra à Giannino, d'un mouvement du menton car il avait les mains plongées dans son pardessus, le dossier couleur crème sous le bras. On aurait dit que tout le froid humide de la rue avait été aspiré jusque-là par la cage d'escalier.
Giannino arracha les scellés puis sortit un passe-partout et, en un instant, ouvrit la porte. Il sourit à De Luca mais celui-ci ne le regardait plus. Il fixait l'obscurité au-delà du seuil tandis que son coeur avait commencé à battre fort et cette fois oui, un excès de salive, d'eau à la bouche, vraiment, le contraignit à déglutir." (Page 20).
Construction: chaque chapitre figure une journée d'enquête, l'histoire commençant par la presque-fin, avec l'accident de voiture dont De Luca et son adjoint Giannino sont victimes. Procédé déroutant car le lecteur ne comprend pas tout de suite où ils vont, et pour quelle raison ils se trouvent sur cette route, en plein hiver. Ce n'est qu'à la fin du roman que le lecteur apprend tous les détails et qu'il fait le rapprochement avec tous les éléments de l'enquête qu'il réunit au fur et à mesure de la lecture.
Fil rouge: Guerre Froide, le péril rouge représenté par les communistes =>Un contexte historique difficile, que nous lecteurs d'aujourd'hui peinons à nous représenter: les relations sociales et politiques gangrenées par une ambiance de délation, de méfiance, héritage des années de fascisme et du totalitarisme imposé par le Duce et sa clique.

21 décembre 1953. De Luca, qui a été le meilleur flic d'Italie pendant la période fasciste et mis sur la touche depuis cinq ans, revient à Bologne incognito afin de résoudre le meurtre de Stefania Mantovani, veuve du professeur Mario Cresca, décédé deux mois plus tôt dans un accident de voiture. Elle a été retrouvée morte dans la baignoire de la garçonnière de son mari. 
Une fois sur place, De Luca observe la scène du crime qu'il reconstitue en imagination. Très vite, il se rend compte que certains détails ne cadrent pas avec le déroulement supposé des événements de la soirée. Aucun signe d'effraction. Connaissait-elle son agresseur? Pourquoi ne retrouve-t-on pas les vêtements de la morte? Et pourquoi l'étrangler avec le fil du téléphone dans le salon pour ensuite la noyer dans la baignoire de la salle de bains?? Décidément, rien ne colle...
La mort soi-disant accidentelle du professeur aurait-elle un rapport avec le meurtre de sa femme? Si oui, quel lien entre les deux morts? De Luca pressent que cette affaire n'est pas si simple qu'elle n'en a l'air, dont les dessous ne sont pas clairs: jalousie d'un membre du groupe de jazz dans lequel jouait le professeur? Meurtre politique dans la lutte contre les communistes? Crapuleux? Ou passionnel? Les pistes ne manquent pas et De Luca devra faire preuve de beaucoup de persévérance et utiliser ses facultés de déduction au maximum s'il veut pouvoir démêler les fils de cette affaire bien embrouillée. D'autant que la météo hivernale, chutes de neige, routes verglacées, gêne considérablement les investigations du commissaire.

Carlo Lucarelli nous entraîne dans les glauques méandres de la politique de l'Italie d'après-guerre, une Italie meurtrie par son passé fasciste dont elle a bien du mal à se blanchir, à l'image de De Luca mis sur la touche pendant cinq ans et que l'on fait revenir incognito plus par nécessité que par reconnaissance, estimant qu'il est le seul à pouvoir venir à boude cette enquête. La scène où il est reconnu par un tenancier de bar est à ce titre très significative. L'ambiance de film noir, le caractère taciturne du commissaire illustrent l'atmosphère délétère dans laquelle se démène la classe politique de ces années noires. du grand polar noir...

Lien : https://legereimaginarepereg..
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critiques presse (4)
Actualitte
03 août 2023
Cette plongée dans des lieux impossibles remplis de jazz, d’alcool, de drogues, d’assassins institutionnels, d’accointances politiques, où des gens de tous horizons se croisent, […] est un moment de lecture comme on les aime, […] avec une conclusion peu orthodoxe, mais, au fond, pas pire que le contexte dans lequel toute l’histoire a baigné.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Liberation
09 septembre 2021
L’enquête va conduire le flic dans les milieux saumâtres qu’il a fréquentés quelques années plus tôt, jusqu’à un ex-officier SS surnommé Tête de monstre. Avec ce roman-là, on n’est pas dans le noir, mais dans le gris, quand le noir tente de retrouver la virginité du blanc.
Lire la critique sur le site : Liberation
LeMonde
08 mars 2021
Polar. Le commissaire De Luca entame une enquête au cœur de la bourgeoisie bolonaise corrompue, à l’hiver 1953. Une belle introspection de la période post-mussolinienne.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeFigaro
25 février 2021
Dans l’œuvre touffue de l’écrivain italien Carlo Lucarelli, éminente figure de l’école bolognaise du roman noir, notre préférence va à la série dont le commissaire De Luca est le héros.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Ils restèrent habillés après, un peu parce que le poêle n’avait pas encore assez réchauffé la pièce, mais surtout parce que Claudia lui avait dit tout de suite qu’elle ne resterait pas dormir, encore cinq minutes et elle partirait.
– M. Paride se met en colère quand sa fille ne rentre pas à la maison ? s’enquit De Luca.
– La fille de M. Paride a connu la rizière, la guerre et les tournées, et elle sait comment tenir en respect les fascistes, les patrons en pantalon blanc et les jazzmen existentialistes fils à papa. Pour lui, je suis toujours une enfant, mais j’ai vingt-cinq ans et je me gère seule. Nous sommes via del Traghetto, c’est au bout du monde, là-bas, du côté des carrières, et quand je sors tard, je dors ailleurs.
Claudia gardait la tête sur la poitrine de De Luca, coincée sous son menton. Il aurait voulu la regarder mais ils avaient éteint la lampe de la table de chevet et dans cette obscurité, avec la seule lueur des lampadaires au-dehors, ses traits avaient disparu dans une ombre noire que De Luca reconnaissait à tâtons, lentement. Maintenant, il savait quel âge elle avait, et c’était encore un âge différent, plus vieux ou plus jeune que ce qu’il avait sous les doigts.
– Je ne reste pas parce que ta chambre est horrible et ton lit trop étroit. Il y a une station de nuit de taxis, pas loin, je vais aller en prendre un.
– Je t’accompagne.
– Pas besoin.
– Hors de question. T’as peut-être bien été un courrier des partisans, mais à cette heure…
– Pourquoi un courrier ?
– Tu as dit que tu as fait la Résistance… j’ai mal compris ?
Claudia soupira. Elle s’assit sur le lit.
– Résistante combattante. J’étais dans la montagne, à Monte Solo, j’ai fait la bataille de Porta Lame, je suis entrée en ville le 21 sur un char d’assaut, j’ai une photo avec d’autres filles, toutes avec la mitraillette… mais pourquoi, vous autres les hommes, vous êtes toujours en plein stéréotype ?
Elle prit ses bas sur la chaise, en les maniant du bout des doigts, puis commença à en enfiler un. De Luca aurait voulu dire quelque chose mais Claudia ne lui en laissa pas le temps.
– Femme, donc courrier. Peau sombre, donc africaine. À Asmara, j’y suis seulement née, je suis venue ici quand j’avais deux ans et demi, quand M. Paride est rentré en Italie parce que ma mère était morte. J’ai été nourrie de lasagnes, de mortadelle et de tortellinis, et ça se sent même quand je chante en anglais, et pourtant tu sais combien de fois on m’a dit : « Dites donc, mademoiselle, vous parlez drôlement bien l’italien » ? À part ceux qui m’appellent Faccetta Nera.
Elle n’était pas en colère, elle semblait déçue.
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Jeudi 24 décembre 1953
Ça semblait absurde, mais ce visage lui rappelait quelqu’un. Même dessiné par un enfant sur une feuille de papier à carreaux, une ligne presque droite pour le menton, une autre plus courbe pour le nez massif et cet œil plus bas que l’autre, si réel et si bizarre, oui, ça lui rappelait quelqu’un.
De Luca avait passé la presque totalité des vingt-quatre dernières heures dans sa chambre de la pension, à tourner autour des photographies éparpillées sur le carrelage, le dessin seul étant accroché au mur, et à feuilleter les pages des rapports étalés sur le lit.
À part le petit-déjeuner au bar sous le portique, il avait oublié de manger et, à un certain moment, même, de remplir le poêle, jusqu’à ce que le froid de la pièce le lui rappelle, plus à cause des volutes de son haleine qui lui brouillaient la vue que des frissons qui de temps en temps surgissaient au milieu de cette agitation qui le faisait vibrer d’impatience.
Si ça avait été comme autrefois, il aurait convoqué tout le monde à la questure, l’un après l’autre, morts compris, pratiquement. Il les aurait interrogés à grand renfort de questions, de menaces, de pièges, avec quelques baffes si nécessaire. Pas lui directement, il y avait toujours le brigadier qu’il fallait, celui que, quand il commençait à retirer sa veste, les repris de justice comprenaient tout de suite et, en général, il n’y avait pas besoin d’aller plus loin.
Mais maintenant tout ce qu’il pouvait faire, c’était aller et venir entre ces quatre murs nus, comme un lion en cage, lit, poêle, chaise et retour, à penser entre ces étapes cardinales de son univers physique. Si au moins Giannino avait été là, le garçon l’aurait emmené faire un tour, mais il s’en était allé la veille au soir, en lui faisant promettre que, s’il changeait d’idée sur le repas de Noël, il lui téléphonerait à Florence, « j’insiste, ingénieur ».
À un moment, il en eut assez de rester enfermé là à fixer des empreintes ensanglantées de pieds nus, le visage gonflé de Stefania Cresca ou l’œil oblique de Tête de Monstre. Il était descendu s’acheter une cafetière, parce qu’il y avait un fourneau sur le poêle, mais à cette heure tout était fermé et il s’était fait prêter une cafetière napolitaine par le gardien de l’hôtel. Et comme la neige avait recommencé à tomber à gros flocons silencieux, dans un premier temps il avait renoncé à sortir.
Mais il n’en pouvait plus de rester là. Et il avait déjà compris qu’il ne réussirait pas à dormir comme il l’avait fait les jours précédents. Alors, il sortit quand même, le col de son manteau relevé et serré sous le menton, en profitant des portiques, il mangea un sachet de marrons grillés, parce que les gargouillis de son estomac lui avaient rappelé qu’il avait faim, il manqua de finir sous un tram qu’il n’avait pas vu et à la fin se retrouva piazza Maggiore, devant la cathédrale de San Petronio.
Il y entra et s’assit au bord du dernier banc du fond, bien qu’il fut encore trop tôt pour la messe de Noël et que la cathédrale fut presque vide. Là, recroquevillé sur lui-même comme un fœtus dans ce silence humide, il sentit son agitation se calmer un peu et il recommença à penser lucidement.
Peu de choses, par rapport à tout ce qui lui avait envahi l’esprit. Les plus importantes, même si elles étaient en ordre dispersé.
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De Luc hocha la tête. Elle se rapprocha de lui, se recroquevillant dans son manteau comme sous une couverture, pieds nus sur sa cuisse, jambes contre sa poitrine et tout le reste dans ses bras, comme une petite fille.
- Depuis toujours je suis au milieu de choses fausses, même quand elles sont vraies. Je suis Claudia et je suis Franca, je suis italienne et je suis africaine, je chante le jazz et la filuzzi, on me tire tout d'un côté ou tout de l'autre et moi, je m'y perds, je ne sais même plus qui je suis. Donc, s'il te plaît, toi au moins, commissaire Morandi, toi au moins, sois sincère avec moi. Jamais plus de mensonge.
- Oui, d'accord, mentit De Luca. Jamais plus de mensonge.
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Comment vous appelez ça, vous? Garçonnière? Appartement de célibataire? Ben, quand un célibataire ne l'est plus, célibataire, alors, chez nous, ça s'appelle un "piège à femmes", là où on emmène ses maitresses, en somme.
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Il avait essayé de tout lui expliquer, qu'il n'avait jamais été vraiment fasciste, c'est à dire qu'il l'avait été comme tout le monde, comme beaucoup au moins, qu'il n'était qu'un policier, un bon, "le plus brillant enquêteur de la police italienne", comme on l'avait appelé autrefois, il résolvait toutes les affaires, il mettait en prison tous les assassins, puis il y avait eu la guerre, le 8 septembre, la République de Salo et il avait recommencé à faire son métier, parce que c'est cela qu'il était et seulement cela, un policier.
Un policier.(P.44)
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