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Critique de Pingouin


De la nature est un -très- long poème destiné à exposer la doctrine épicurienne à "Memmius, gouverneur de Bithynie" et grand ami de son auteur, Lucrèce. Il est évident que ce dernier cherche à convertir cet être cher à l'épicurisme, l'emploi de la deuxième personne du singulier durant tout le livre en est une preuve assez évidente.
Mais ce livre, les poèmes qui le composent, ont beau avoir été destinés originellement à un seul homme, c'est à l'humanité entière que Lucrèce aura légué cette oeuvre d'art ayant été la principale source d'information au sujet de l'épicurisme, les ouvrages de son créateur -Épicure- ayant été pour la plupart détruits ou perdus.


L'emploi de la forme versifiée, -qu'Épicure reniait pourtant- permet à Lucrèce de faciliter l'assimilation des idées qu'il expose. La forme poétique est l'excipient permettant d'avaler ces idées abstraites qui ont pour objectif une application concrète, l'auteur aime à dire qu'il "enduit de miel", et rend de fait délicieuse et agréable à ingérer la philosophie épicurienne.
Cette philosophie, quelle est-elle ? Ces poèmes ont justement pour but de nous l'exposer dans le détail, de prétendre au bonheur ici et maintenant, de se contenter des plaisirs naturels, de fuir une gloire éphémère et exténuante, pour se contenter du nécessaire. Il est évident que Lucrèce cherche à discréditer toutes les religions pour convertir un maximum de personnes à la sienne, ainsi, il tape à coups de marteau sur l'idée de dieux vengeurs ou préméditant la destinée des hommes, selon lui, les dieux ne sont que des hommes, dont la constitution atomique diffère certainement de la nôtre, mais qui n'ont que faire de nos vies.
Mais alors, s'il n'y a pas de dieux, comment expliquer les phénomènes naturels ? Comment expliquer le tonnerre ? Comment expliquer les tremblements de terre ? Lucrèce s'y emploie d'une façon rationnelle et toujours très atomique, et même si la plupart de ses justifications sont aujourd'hui rendues caduques par la science, il est impressionnant de constater cette capacité à justifier l'incroyable pour permettre à ses contemporains d'être heureux. Il s'affaire à dénoncer la bêtise de certains qui croient que la vie n'est qu'un prélude à un outre-monde. La connaissance pour vaincre la peur, voilà l'un des grands édifices permettant de bâtir le château du souverain bien, de l'ataraxie.
L'atome est la base et la fierté de la doctrine épicurienne, et pour cause, quel incroyable pari sur la science que de prétendre -bien que Leucippe et Démocrite, réels découvreurs de ce minuscule organisme, aient précédé l'épicurisme- à une telle constitution du monde plusieurs dizaines de siècles avant que celle-ci soit prouvée !
Malgré tout ce génie, les justifications lucréciennes perdent un peu de leur intérêt lorsque l'on découvre cet ouvrage avec les yeux du lecteur du XXIème siècle, pour autant, quelques superbes images permettent d'apprécier la lecture.


Si vous avez déjà une bonne connaissance de l'épicurisme par la lecture d'ouvrages le résumant, vous n'apprendrez sans doute pas grand chose à son sujet, mais vous apprécierez la poésie de Lucrèce qui, bien qu'ayant forcément perdu de sa puissance évocatrice par l'intermédiaire de la traduction, n'en reste pas moins magnifique et agréable à lire. Ce poème est également une excellente introduction à cette philosophie de la vie, bien que, non équipé d'informations préalables, le travail d'interprétation des quelques unes disséminées çà et là -entre la poésie pure- quant à la philosophie exposée devra être fait de manière plus concentrée.
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