Les trois albums de la série Communardes ! (parus entre 2015 et 2016) sont à découvrir absolument. Pour aborder le sujet de l'insurrection populaire parisienne du printemps 1871 qui s'est terminée dans un bain de sang,
Wilfrid Lupano choisit de mettre en avant des destins de femmes. Il s'est associé à trois dessinateurs de talent :
Lucy Mazel pour le tome 1 Les éléphants rouges, Anthony Jean pour le tome 2 L'aristocrate fantôme et
Xavier Fourquemin pour le tome 3 Nous ne dirons rien de leurs femelles. Et c'est une réussite totale. Chaque tome est indépendant, mais quelques personnages traversent l'histoire. Cette impression que le cycle va crescendo. Je viens de refermer le troisième volume et je suis bouleversée.
Les éléphants rouges commence le 10 octobre 1870. Paris est assiégée par l'armée Prussienne de Bismarck, installée à Versailles. On y suit Victorine, 11 ans, et sa mère Octavie, dans leur quotidien. Se loger, se nourrir, la débrouillardise comme clef de survie, la colère qui gronde autour, partout, la politique, la place des femmes. Les coulisses romancées de la Commune – ou plutôt l'avant, pour ce tome-ci -, avec en fond l'histoire vraie des éléphants du jardin des plantes. Un discours féministe et social très intelligent, des dessins expressifs pleins de talent, un scénario rythmé et des personnages vraiment attachants.
« Si le gouvernement se couche devant les Prussiens, alors il faudra voter la Commune. Il n'y aura que dans la Commune que les femmes auront leur place. Sinon, on restera le dernier maillon de la chaîne d'une société d'esclaves. »
Les deux autres tomes sont à dévorer dans la foulée. L'Aristocrate fantôme, centré sur la figure historique d'Élisabeth Dmitrieff, une aristocrate russe devenue activiste et militante féministe durant la Commune. Un dessin très travaillé, très immersif dans l'époque. Nous ne dirons rien de leurs femelles m'a laissé sans voix. Au début j'ai moins accroché au dessin, mais il termine la série en apothéose. Il est d'une violence… J'en ai réellement pleuré des larmes de rage. Il fallait bien ça.
« La répression des Communardes, la violence des commentaires dont elles furent l'objet, […] sont le résultat d'une volonté déterminée chez les Versaillais et les Républicains d'éteindre désormais, chez la femme, toute tentative de participation au pouvoir, toute velléité de paraître à l'avenir sur la scène politique » (Odile Brakovitch, 1997) «
Alexandre Dumas fils, journaliste au Figaro, écrira cette année-là, parlant des Communards : Nous ne dirons rien de leurs femelles, par respect pour les femmes à qui elle ressemblent quand elles sont mortes. »
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