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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Barnabas Krane, sa femme Eskra et leur fils Billy ont quitté les Etats-unis pour venir se réinstaller en Irlande dans le comté de Donegal dont Barnabas est originaire.
Tout semblait aller bien jusqu’à ce qu’un incendie vienne détruire l’étable et leur troupeau de vaches. En voulant sauver les animaux, leur aide à la ferme et ami Mathews Peoples y laisse la vie alors que Barnabas qui l’avait suivi est, lui, sauvé.

A partir de là, la rancoeur de la veuve de Mathews, Baba, et des autres voisins va envahir leur quotidien s’ajoutant à la situation précaire dans laquelle les met le risque de perdre leur propriété et toute une série d’autres malheurs qui surviennent subitement…

Tout semble se liguer contre eux et surtout les autres qu’ils soupçonnent d’être à l’origine de tous leurs maux :
Eskra « il y a chez eux cette expression qui semblent incrustée sur les visages, les regards insistants de la suspicion, comme un jugement biblique qui vous déclare absolument étranger si vous n’êtes pas né sur ce sol » p 123
Barnabas se souvient d’avoir été traité de « faux pays » par un de ses voisins. Car il a beau être né dans le Donegal, il en est parti et il n’est désormais devenu, aux yeux de ceux qui l’épient, qu’un étranger irrespectueux de leur façon de vivre et de leur passé.
Et puis, « en 2 ans ils avaient acquis ce que les autres mettaient trois générations à accumuler. » p 126

Mais les forces obscures se rassemblent aussi en eux trois, Barnabas, Eskra et Billy .
« Il s’éveille une fois encore d’un rêve malsain, dont les miasmes se ramifient dans tout son être. En quel coin ténébreux de son esprit ils ont leur origine, Barnabas ne saurait le dire. L’état de veille les maintient cachés, mais leurs fruits empoisonnés s’épanouissent à la faveur de la nuit. » p119

La nature est omniprésente. Elle scande leur vie. Parfois la lumière l’emporte
« Un arc céleste de lumière vermeille s’étend vers l’ouest par-dessus les montagnes, et Barnabas a l’impression qu’elle met en déroute les forces obscures rassemblées en lui, que le titan de ténèbres se voile d’une blanche clarté. » p 146
A d’autres moments, elle leur semble participer à la dilution de leurs rêves de reconstruction partis en fumée dans l’incendie de la grange.
« Le ciel était devenu tout sombre, drapant la ville d’un gris sans nuances qui posait comme une souillure sur la clarté enfuie. » p 137

En fait ce que dit la beauté de la nature qui suit son cycle, avec parfois une force destructrice, c’est sa permanence, l’homme ne faisant que la traverser avant d’être vaincu et disparaître.

Le lyrisme de l’écriture est mis au service du délitement méthodique et lent de toute possible stabilité de vivre malgré les efforts pour s’en sortir. La méfiance grandit en eux et autour d’ eux, ils sont entrainés vers un gouffre.

Un roman tout en clair obscur, d’une grande beauté tragique, où l’ombre s’étend, semble parfois reculer pour mieux progresser ensuite et finir par tout envahir.
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J'ai découvert Paul Lynch avec bonheur à la lecture d'-Un-ciel-rouge-le-matin une chasse à l'homme d'Irlande en Amérique .
Avec" la neige noire, nous faisons le voyage inverse, le personnage principal, Barnabas Kane, après quelques années passées à New- York, revient avec Eskra épousée là- bas et son fils Billy. Ce jeune couple d'ouvriers et leur fils choisissent de revenir sur la terre de leurs aïeux. Ils se transforment en éleveurs et prennent possession d'une métairie.Mais personne ne les attend dans le Donegal, que la jalousie, la haine, la rancoeur, l'envie, l'incompréhension, le pire....une hostilité latente et sourde ....La métairie brûle dés le début fulgurant du livre: une vision, une scène apocalyptique, saisissante: "la fumée qui traînait dans la cuisine s'est tapie dans les coins comme un chat"," L'effondrement de l'étable semblable au râle ultime d'une créature titanesque vidée à présent de sa force vitale" Les cris des vaches à l'agonie".La ferme entière est en feu, leur vieux commis meurt et leurs quarante- trois vaches courent en flammes aux quatre coins de leur terrain. Cela se poursuit par le massacre de leur chien et de leurs ruches....La mort rôde sans fin dans ce récit imprévisible sur les terres ingrates et désolées d'Irlande ... le lecteur est happé par chaque phrase travaillée, un récit puissant, marquant, renversant, charnel, excessif, tragique qui prend aux tripes: ' Une aube couleur de rose",Le silence absolu du matin a la profondeur d'un abîme". le ciel se débonde encore une fois"" il lui fut une minute pour la succion de sangsue de la pluie glacée" Ces pierres sont comme nos ossements."Un roman diabolique à l'écriture âpre et envoûtante : ici nulle fraternité, nulle solidarité. Dans cette communauté pastorale, la cruauté est infinie, le courage à la combattre aussi au risque d'en mourir ou de perdre la vie.Les silences et les dialogues à minima se fondent dans l'immensité du vide tragique, du noir ,de l'absence définitive d'espoir.
L'écriture est tellement fascinante et belle , les images si puissantes qu'elles se métamorphosent en visions de cinéma, mises en scène, descriptions baroques, sons , rythmes, couleurs . Un ouvrage époustouflant , hypnotique, qui fascine, brut , dense et profond, habité à la fois par la sarabande des vivants et des morts , dans une Irlande intemporelle, doublée d'âmes à la rudesse inhospitalière où la rancoeur domine les coeurs .Un grand coup de coeur pour cette deuxième oeuvre incroyablement riche! Que lire après? J'ai de la tendresse pour les écrivains Irlandais et j'attendrai le troisième opus de cet écrivain décidément bien prometteur , avec curiosité , un ouvrage où les pages chanteront aussi?










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Chef d'oeuvre absolu ! le premier roman de Paul Lynch m'avait déjà emballée, mais là..... Formidable histoire de retour au pays quecelle de cet irlandais qui revient chez lui avec sa femme américaine et leur fils après avoir vécu plusieurs années aux États-Unis. Ce roman très fort et qui sonne juste d'un bout à l'autre, écrit dans un style magnifique, où la poésie donne au réel toute sa dimension concrète, nous emporte dans une tragédie où pauvreté, aridité du paysage et dureté des rapports humains tourbillonnent jusqu'à nous en donner le vertige, dans une lente montée vers le drame qui en est la conclusion naturelle. Tout est dit en peu de chapitres. Chapeau monsieur Lynch ! J'ai été prise aux tripes d'un bout à l'autre et fascinée par le brio de votre écriture jusqu'à l'éblouissement. Voilà un livre que je ne suis pas prête d'oublier.
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Lente descente en enfer pour Barnabas Kane qui est revenu d'Amérique dans le Donegal, son pays natal.

Installé avec femme et fils, Barnabas emploie un homme à tout faire Matthew Peoples, la ferme tourne bien jusqu'à ce qu'un incendie ravage l'étable. En plus des bêtes qui sont mortes, Matthew y a aussi, laissé la vie. A partir de là tout va aller de mal en pis pour la famille de Barnabas. Non seulement il est ruiné car il n'a pas payé l'assurance mais en plus il est rejeté par une bonne partie de ses voisins. C'est un faux-pays, un de ceux qui a quitté l'Irlande, un traitre en gros ! Ah! Les gens qui sont nés quelque part, où que ce soit on retrouve cette intransigeance à accepter l'autre.

Les difficultés font éclater le couple, qui arrive de moins en moins à se réconcilier, et les moments d'abattements et de dépression du père et de la mère finissent par atteindre violemment leur fils Billy, qui sait lui pourquoi et comment l'incendie a été déclenché.

C'est un roman magnifique d'une tristesse et d'une noirceur assez épouvantable mais qui se lit d'une traite et qui nous ouvre les portes d'une Irlande rurale, âpre, austère et inhospitalière mais une Irlande aux paysages magnifiés par la rudesse de la vie
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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La neige noire bouscule les clichés que l'on porte en nous sur la convivialité et le sens de l'accueil des irlandais. Les héros de cette histoire dramatique et oppressante ont quitté leur terre et leur retour n'effacera jamais cette désertion, ils resteront à jamais des « sans-pays ». Un roman à la beauté sombre et rude !
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Au début du siècle dernier, Barnabas Kane quitte son Donegal natal à l'adolescence, pour partir tenter sa chance aux Etats Unis. A l'âge de 33 ans, avec sa jeune épouse et son petit garçon, il revient "au pays de ses racines" avec la volonté d'y construire sa vie et un avenir pour son fils. Il porte aussi en lui un certain romantisme né de l'éloignement, car en pensée il a souvent revu la beauté des paysages de l'Irlande, ses rivages sauvages, la variété de ses arbres, ses collines et ses prairies herbeuses.
La famille s'installe alors à la campagne, à proximité de la mer, et va du mieux possible faire vivre une ferme comprenant une quarantaine de vaches laitières. C'est un travail sans relâche, mais le jeune couple est courageux et entreprenant, et l'exploitation va bien, les propriétaires songent même à l'agrandir, cela jusqu'à ce qu'un feu détruise à la fois l'étable et le troupeau. D'emblée, l'origine de l'incendie paraît suspecte, mais, malgré ses doutes, le couple Kane fait face et va, contre toute attente, se heurter à l'indifférence, voire à l'hostilité plus ou moins masquée, du voisinage.
En racontant avec beaucoup de pudeur et de sensibilité l'histoire de cette famille, en évoquant une Irlande rurale statique, recroquevillée sur elle-même, réfractaire aux nouveaux venus, enfermée dans ses superstitions et balayée par ses pluies incessantes, Paul Lynch écrit là un livre très sombre, mais dont le lecteur retiendra la superbe écriture, servie par un vocabulaire d'une grande richesse et par une poésie à la fois âpre et empreinte de mélodie.
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Barnabas Kane, jeune Irlandais originaire du Donegal a émigré très jeune aux Etats-Unis. A New York, il travaille dans la construction de hauts immeubles, déambulant sur les poutrelles en acier, le ciel à portée de main. Pour faire face à ses responsabilités de mari et père de famille, il décide de rentrer au pays, avec sa famille. Les Kane vont donc acheter une ferme dans le Donegal et travailler d'arrache-pied pour que leur petite exploitation fonctionne.
Las, un incendie va tout consumer, aussi bien les chairs que les rêves et espoirs.

La Neige Noire est un voyage au coeur d'une Irlande loin des clichés de carte postale. Dans cet ouvrage, la nature est dure, autant que les hommes qui tentent de la dompter et d'en vivre. L'auteur nous conte ainsi la lente agonie d'une famille en proie au rejet d'une société fermée et de ses propres secrets.

Le récit est porté par une plume poétique. L'auteur manie les mots aussi bien que la psychologie des personnages. Le lyrisme s'inscrit naturellement, un ciel d'orage devenant un court poème. L'hostilité de l'environnement de cette famille est bien traduite, frontalement avec des altercations vives entre les protagonistes ou plus nuancée lorsque le romancier s'aventure dans l'intimité de cette famille. Les dialogues sont d'ailleurs inscrits dans le récit et non séparés par des tirets comme d'habitude.

La Neige Noire est un excellent roman qui surprend et ne vous lâche plus une fois la dernière page tournée.

Merci à Babelio et à Albin Michel pour ce qui fut pour moi une très belle découverte.
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" les gens révèlent des tas de choses , quand on les regarde.Leur façon de se conduire.ce qu'il font et ce qu'il font pas .C'est quand ils ne réagissent pas aux événements qu'ils se trahissent le mieux '

Une belle citation tirée du magnifique roman noir de Paul Lynch ,Neige Noire qui résume parfaitement l'ambiance de l'histoire.
La vie est rude dans cette campagne irlandaise, rare sont les distractions qui permettraient de fuir la morosité ambiante. Et quand arrive un terrible coup dur à Barnabas émigré irlandais de retour au pays avec femme et enfant,après avoir passé quelques années à New-York, il se retrouve confronté à l'indifférence pleine de rancoeur de ses voisins .Le combat pour se relever est rude, si rude que la noirceur de la vie atteint les coeurs les plus endurcis .
Jour après jour , en cette terre ingrate , face aux éléments et aux destins ,un voile sombre s'installe sur cette famille, et ne leur laisse aucune chance .......
Un récit fort , Âpre,une plume brillante, envoûtante , scintillante malgré sa noirceur, où Paul Lynch nous embarque et nous laisse sans voix mais le coeur transpercé par toutes ces émotions ,les larmes au bord des yeux tellement c'est noir mais tellement c'est beau .......
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Barnabas Krane a quitté l'Irlande pour partir faire fortune aux États-Unis en construisant au péril de sa vie des gratte-ciel...Souffrant du mal du pays il revient, avec Eskra son épouse américaine et leur fils Billy, se réinstaller en Irlande dans le comté de Donegal qui l'a vu naître. Avec l'argent qu'il a gagné il a pu acquérir une ferme, des terres et du bétail...En quelques années il a pu ainsi être à la tête d'une exploitation que tout irlandais aurait mis 3 générations à construire....Sa vie de travail est prospère et heureuse, alors que la deuxième guerre mondiale fait rage en Europe.
Jusqu'au jour où un incendie, peut-être criminel, met fin à ce rêve. Il perd dans ce drame son bâtiment, son bétail brulé vif et un ouvrier agricole et ami Mathews Peoples. Par rancœur, la famille de celui-ci refusera qu'il assiste à ses obsèques...
C'est le début de la suspicion, des regards méfiants à l'égard des voisins, une longue descente aux enfers "Le silence absolu du matin a la profondeur d'un abîme pour celui qui s'éveillait autrefois avec les animaux, et qui n'entend désormais que l'écho plus strident de ses propres pensées. Il perçoit aussi ce silence qu'a laissé derrière lui le coq disparu depuis l'incendie, un vieil oiseau dépenaillé au plumage rouille que rompait un croissant de plumes noires. Il se peut que de pareilles choses bouleversent aussi les coqs" . Le bonheur conjugal se lézarde, son épouse qui a quitté les Etats-Unis n'était peut être pas faite pour vivre en Irlande.
En tentant, sans argent, de reconstruire son bâtiment, de récréer ce bonheur, et en sollicitant ses voisins pour quelques pierres ou pour une poutre, il se rendra vite compte qu'en quittant l'Irlande, il est devenu un "faux-pays", un étranger, qui a perdu toute notion de la culture locale . "Les gens d’ici sont habités par la crainte de Dieu, mais ils n’ont de chrétien que le nom"
Ayant volé les pierres d'une ruine, il s'attire la haine d'un voisin: "Ces pierres, ce sont nos ossements [ ....] prendre ces pierres, c'est profiter du malheur d'autrui. Elles font partie de la terre, ce sont nos antiques reliques qui doivent rester dans nos mémoires ".
Jalousies, secrets et soupçons vont miner les relations familiales et les relations de voisinage...Ce serait tellement plus simple s'il ne s'entêtait pas et s'il acceptait de vendre des terres.... "Mettre la maison et les terres en vente, et puis retourner en Amérique. Admettre que ca a marché un temps, qu'on en a bien profité, mais que rien ne dure et qu'on n'a pas le choix. Que la fin est arrivée plus tôt que prévu et que la fortune ne sourit pas éternellement aux courageux. Et que, peut être nous n'étions pas faits pour vivre ici.". Mais Barnabas s'entête... un vrai irlandais
Une longue descente avec de fragiles moments d'espoirs.
Je ne souhaite pas en dire plus...découvrez-le
Une écriture qui permet de créer, petit à petit, une ambiance pesante dans un pays au contraire lumineux..Un grand roman, un grand auteur que j'ai découvert avec ce titre

Lien : http://mesbelleslectures.wor..
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Barnabas Kane est un fermier du Donegal. Mais à seize ans, il était "employé sur les chantiers des gratte-ciel" de New York, alors en pleine explosion de construction immobilière. Il y rencontra sa femme, Eskra. Ils ont maintenant un fils, Billy, et vivent dans ce comté d'Ulster. Nous sommes dans les années 40, la guerre faire rage, la restriction est à l'oeuvre, la vie est dure. Pourtant, ce n'est presque rien à côté de ce qui va arriver à cette famille. Dès le début du roman, on sent une menace diffuse. La jument semble s'être blessée, Billy s'est coupé et Barnabas qui pioche la terre, ramasse un caillou qui ressemble au croc d'une bête archaïque. Et puis c'est le drame : la grange prend feu de façon inexplicable, un homme y trouve la mort : le vieux Matthieu Peoples, un employé de Barnabas. Mais aussi toutes les vaches, seul bien de la famille sur cette terre aride et inhospitalière. Un sillage de feu qui ne va pas s'en tenir là et incendier le quotidien des Kane, en les consumant lentement à travers un récit hors normes.

C'est le premier roman que je lis de Paul Lynch et je ne suis pas encore tout à fait sûre de m'être remise de cette plume époustouflante qui vous laisse sans voix. le genre de livre, où, sonné après l'avoir refermé, vous vous demandez ce que vous allez bien pouvoir lire après ça.

L'Irlandais est amateur de longues phrases proustiennes, pour décrire l'austère Donegal, où la terre et les hommes sont liés comme d'un seul bloc, où le passé est ancré dans le présent, où les ossements font partie de la vie. Les personnage du village sont rudes et entourbés : d'"antique[s] faciès modelé[s] par la langue du vent et de la pluie. Sous le parchemin de [leur] peau, ce ne sont pas des os qui se devinent, mais du bois de tourbe, comme s'il[s] avai[en]t été engendré[s] par la mousse." Des êtres de pierre, d'os et de cendres. Des fantômes d'un autre temps, dont le plus menaçant ne cessera à répéter à Barnabas, en parlant des ruines des maisons de la Famine dont il a pris les pierres pour tenter de reconstruire sa grange : "Ces pierres, ce sont nos ossements". Pour lui, c'est un "vol [qui] ne peut entraîner [qu']une malédiction", car "prendre ces pierres, c'est profiter du malheur d'autrui. Elles font partie de la terre, ce sont nos antiques reliques qui doivent rester dans nos mémoires", rugira le vieux Goat Mclauglin. Barnabas, ahuri, expliquera que lui aussi il est menacé par la faim et que prendre ses pierres qui ne servent plus à personne, c'est sauver sa vie et celle de sa famille ! Rien à faire, on lui répondra de se méfier de la colline...
Les personnages de ce village sont complètement effrayants. Même la veuve du vieux Matthew Peoples ressemble à une sorcière qui jette des sorts, n'hésitant pas ravager sa chevelure mèche après mèche devant tout le monde, quand Eskra l'accuse d'être responsable de la mort de son chien, Cyclope, d'avoir massacré ses abeilles par une attaque de guêpes, d'avoir volé ses draps neufs pour remettre ceux cendrés par l'incendie, où on semble apercevoir le visage du vieux Matthew. Ces villageois d'un autre monde (d'un outre monde) en voudront à mort à la famille Kane : tous les prétextes sont bons pour ne pas les aider, ils leur reprocheront d'être des "faux pays" (des immigrés). La miséricorde de Dieu, c'est juste à la messe (mais il n'est jamais question de messe dans le roman), pas au quotidien. Un coup de scalpel de Paul Lynch sur l'hypocrisie de ces personnages monstrueux.

Un roman couleur de cendres où l'ancienneté du paysage, les montagnes semblables à des "créatures archaïques remuant dans leur sommeil, invent[en]t en rêve leur propre mythologie".

Paul Lynch réactualise avec un immense talent le roman gothique (qui n'a pu que me faire penser aux romans de Dermot Bolger, soit dit en passant !). La noirceur laisse parfois place à l'humour : quel délicieux moment de lecture ai-je eu avec l'anecdote du "beurre des tourbières" en tartine !
(Le beurre des tourbière existe bel est bien : c'est le beurre en baratte que les gens avaient mis dans la tourbe pour le conserver et qu'on a retrouvé des centaines d'années après dans la tourbière. On peut en voir dans les musées irlandais.)
Sans parler des cotes de boeufs qu'un villageois offrent avec insistance à Barnabas qui a vu toutes ses vaches carbonisés sur pied... le lecteur rit jaune, comme le personnage. Je me suis aussi attachée aux animaux qui peuplent ce roman, au même titre que les humains, les larmes aux yeux pour Cyclope, le chien borgne des Kane.

La famille Kane n'est pas parfaite mais on les plaint d'autant d'accablements, de se heurter sans cesse à des murs d'incompréhension. Pourtant Paul Lynch ne fait de cette famille une famille modèle : Barnabas a fait une bêtise qui participe de sa perte sans en avoir touché mot à son épouse qui découvrira trop tard le pot aux roses; Eskra est aussi le reflet de son mari; Billy raconte sa vie d'ado dans un carnet et quelque chose que personne ne sait, sauf deux autres...
Un univers de personnages mystérieux. A ce titre, la fin révèle une surprise. Un livre où l'on ne s'ennuie pas une minute car Paul Lynch ménage du suspense.

J'ai fini ma lecture le coeur au bord des lèvres.

Un roman que je classe comme un immense coup de coeur et qui m'a fait découvrir un écrivain au talent hors du commun.

A lire absolument en cette rentrée littéraire !
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