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Adam vit à Paris et se sent parfaitement intégré dans son pays d'adoption. Il retourne dans son pays d'origine à la demande de Mourad le plus âgé de ses amis qui y est resté et veut le revoir avant de mourir.
Le départ d'Adam en 1976 les avait éloignés mais c'est le comportement trouble de Mourad durant la guerre qui les a définitivement coupés l'un de l'autre en le blessant profondément. Adam n'est pas retourné dans son pays depuis son départ quand il reçoit cet appel téléphonique qui va l'entraîner, pendant seize jours, du 20 avril au 5 mai 2001, à confronter au présent le souvenir des liens lumineux des idéaux de sa jeunesse étudiante, vécue avec enthousiasme, en compagnie d'une bande d'amis qui désiraient ensemble mettre à exécution leurs généreux projets d'avenir. «Nous nous proclamions voltairiens, camusiens, sartriens, nietzschéens ou surréalistes, nous sommes redevenus chrétiens, musulmans ou juifs, suivant des dénominations précises, un martyrologue abondant, et les pieuses détestations qui vont avec.» A la demande de Tania la veuve de Mourad, Adam va renouer avec les amis dispersés et les survivants restés au pays pour les inviter à se retrouver et tenter une réconciliation autour du souvenir du disparu. Tous désirent ces retrouvailles mais savent que ce qui les réunissait, leur monde a disparu. Une faille s'est créée entre ceux qui sont restés et ceux qui sont partis, un malaise difficile à dissiper. Quelques beaux moments émouvants où renaît passagèrement leur joie de vivre ancienne, quand ils revisitent les lieux et les souvenirs de leur enfance et de leur adolescence, leur donnent l'illusion passagère de pouvoir renouer mais ils sont obligés de constatés que leur idéal est bien mort. Les années ont passées et la guerre s'est chargée de tuer dans l'oeuf l'avenir qu'ils espéraient, qui était en gestation en chacun d'eux. «...la guerre est passée par là. Aucune maison ni aucune réminiscence n'est restée indemne. Tout s'est corrompu --- l'amitié, l'amour, le dévouement, la parenté, la foi, comme la fidélité. Et aussi la mort. Oui, aujourd'hui, la mort elle-même me semble souillée, dénaturée." Les femmes qui traversent ce livre Dolorès la compagne d'Adam, Sémiramis son amour de jeunesse retrouvée qui lui offre l'hospitalité de son auberge et une belle parenthèse amoureuse, Tania la femme de Mourad.... occupent une grande place et savent préserver malgré leur déceptions, leurs regrets ou leur amertume la générosité et la chaleur de la vie. Amine Maalouf ne nomme pas le pays où se déroule son roman comme il évite de parler directement des guerres qui l'ont ravagé si ce n'est à travers les retentissements qu'elles ont eu dans la vie des différents amis d'Adam. C'est sans doute le premier livre où Amin Maalouf offre le plus de lui-même mais c'est aussi à mes yeux, son livre le plus sombre où filtre une rage contenue face à ce qui aurait pu être, le développement d'une civilisation levantine, qui semble se déliter et disparaître désormais. J'ai écouté la video de l'entretien passionnant de Amin Maalouf sur France Culture qui est joint à la présentation du livre sur Babelio après avoir achever sa lecture et je conseille de ne pas le faire avant pour que ce livre garde toute sa saveur et afin de préserver l'envie de le découvrir. + Lire la suite |