Verre cassé, ou le surnom donné à un homme étrange qui fréquente un café dénommé « Crédit a voyagé ». Tout le monde le connaît là-bas, tous les clients, mais aussi et surtout L'Escargot entêté, le patron. Ce n'est pas pour rien d'ailleurs si ce dernier a demandé à son plus fidèle habitué de comptoir d'écrire la chronique du bistrot, parce qu'il sait de quoi est capable cet ancien prof de littérature.
Il est vrai qu'il est cultivé
Verre cassé, même s'il n'a pas fait de grandes études ; doué d'une belle capacité d'écoute, il s'exprime également bien, du moins, quand il est à jeun... Il a eu une belle vie cet homme-là, jusqu'à ce qu'il cède aux attraits fatals de sa maîtresse, l'irrésistible bouteille. Que s'est-il donc passé pour que sa destinée se délite ainsi, jusqu'à perdre son travail, sa femme, son orgueil, sa dignité ?
Ce sera au travers de son cahier, dans lequel il consigne les histoires de chacun (de ce qu'ils veulent bien lui raconter) qu'il se dévoilera lui-même, page après page…
Quel roman étrange et surprenant…
Il est à la fois un hymne à la littérature, avec sa foison de clins d'oeil aux titres de romans cultes, et un récit déjanté, haut en couleurs et en anecdotes plus ou moins scabreuses.
Un livre à l'image de son protagoniste principal, un ivrogne et un raté mais aussi un auteur en devenir, un véritable écorché vif.
Cette galerie de portraits nous dresse un constat assez triste de cette partie de la société africaine du
Congo. Dans ce bar traînassent en partie de pauvres gens, abîmés par la vie, des hommes malmenés par leurs femmes, des femmes maltraitées, avec tous en point commun, le refuge dans l'alcool.
Derrière la truculence du propos, les situations burlesques ou les dialogues absurdes, se dissimulent de véritables tragédies humaines, que la bonté, la bienveillance ou la meilleure volonté du monde ne peuvent apaiser.
Même si le style adopté par
Alain Mabanckou m'a été difficile à suivre, même si les allusions scatologiques m'ont parfois été pénibles tout comme la déconsidération de la sexualité, j'ai malgré tout le sentiment que ce roman singulier m'a remuée de par sa nature transgressive et ses fulgurances poétiques.
Mémoires de porc-épic à suivre ?