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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quai des brumes est un livre bref et beau où s'éternise la tristesse.
Froid, dèche, malheur, tout s' assemble.
Carné l' a secoué, ce livre, transcendé, transformé?
Qu'importe et tant mieux.
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Avant toute chose, le lecteur doit savoir que, hormis deux ou trois patronymes, le roman de Mac Orlan n'a absolument rien à voir avec l'adaptation plus que libre qu'en firent Marcel Carné et Jacques Prévert en 1938. La réplique, devenue mythique, de Jean Gabin : "T'as d'beaux yeux, tu sais ..." n'existe pas non plus, Nelly, interprétée par Michèle Morgan, n'est pas la pupille de Zabel-Michel Simon et, bien loin de se dérouler au Havre, l'action se situe tout bêtement à Paris, notamment à Montmartre. Seul subsiste le pessimisme angoissant du roman, poussé à son paroxysme par l'ombre du conflit qui n'allait pas tarder à éclater en Europe.

Tout débute au "Lapin Agile" - Mac Orlan devait épouser, rappelons-le, la fille du propriétaire - par une nuit de grand froid. Jean Rabe, jeune homme de bonne famille devenu bohème et ayant sombré dans la misère, vient y chercher un peu de chaleur auprès du patron, Frédéric. Cette nuit-là au reste, "Le Lapin Agile" va voir défiler son lot de "paumés" : un peintre d'origine allemande, Michel Kraus, (Robert le Vigan devait en donner une interprétation mémorable), un soldat prêt à déserter, la jeune Nelly (dix-neuf ans), qui traîne sans but et dont les bas sont percés, et enfin un inquiétant boucher, Isabel, dit Zabel, poursuivi par une bande d'apaches qui, selon lui, cherchent à le dépouiller.

Car "Le Quai des Brumes" se déroule aussi avant la Grande guerre, dans un Paris où les marlous et les pierreuses arpentent avec fierté les fortifications et où s'affrontent, à coup de revolver, les clans rivaux dont les actuelles bandes de jeunes, certes plus cosmopolites, ne sont, au bout du compte, que les lointaines descendantes.

De cette rencontre autour du feu du "Lapin Agile", les anti-héros de Mac Orlan partiront vers des destins tragiques : le suicide pour l'un, le meurtre pour l'autre, l'exécution pour ceux qui restent. Seule, Nelly s'en sortira, mais après s'être résolue à embrasser la prostitution de luxe.

Contrairement à ce qu'il se passe dans "L'Ancre de Miséricorde", l'action ici est faible. Les personnages sont là avant tout pour exprimer les angoisses et le mal-être et aussi pour ressusciter la période de misère que traversa en son temps leur créateur. Une fois de plus, Mac Orlan dépeint avec superbe et vérité la ville qu'il a choisie comme décor, un Paris disparu, avec ses voyous invisibles, ses enfants mal tenus sautant à cloche-pied dans le caniveau, les interminables escaliers de Montmartre, les petits magasins à la vitrine étroite et poussiéreuse, que protègent la nuit de simples volets de bois, les paysages presque irréels d'une banlieue qui commençait alors à Belleville, et la bohème misérable de l'époque.

L'ambiance est noire, noire, noire et l'espoir est mort : on doute même que les personnages l'aient jamais possédé. Seule note optimiste, à la dernière page, quelques toutes petites lignes avant la fin : Nelly est parvenue à recueillir le fox-terrier de Jean Rabe.

Evidemment, c'est bien peu mais n'est-ce pas mieux que rien ? ;o)
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Puisque cet été fût un été de découvertes et de coups de coeurs d'auteurs connus mais encore jamais abordés, il me faut citer Pierre Mac Orlan et ici son Quai des brumes. Surprise...l'intrigue est sensiblement différente du mythique film de Carné. Les personnages sont là mais c'est avant tout la pauvreté, la désespérance des êtres, la guerre hier, la guerre demain qui font l'âme et du livre et du film.
L'écriture donne toute la mesure de ces destins de peu, destins de rien et pourtant si humains. C'est très beau.
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N°1615- Décembre 2021

Le quai des brumesPierre Mac Orlan. Éditions Rombaldi.

Le roman est un peu compliqué et se déroule sur trois années. Un soir d'hiver au début du XX° siècle à Montmartre, au cabaret "le lapin agile", quatre hommes dans un café, le tenancier, puis Jean, un jeune homme pauvre et paumé, un militaire de la Coloniale qui disserte sur le cafard du soldat, déserte et après une vie civile misérable songe à se rengager dans la Légion sous un faux nom, un peintre allemand aux étranges pouvoirs de divination, et Nelly, une jeune fille, qui finit se lancer dans la prostitution. On assiste à une fusillade, à un assassinat pour une sordide histoire d'héritage... A travers Jean qu'on retrouve plus tard, on évoque la pauvreté puis la Légion étrangère, emblématique de cette époque à cause des guerres coloniales, et qui offrait une deuxième chance aux mauvais garçons qui à cette occasion changeaient de nom et ainsi disparaissaient ou à ceux qui, comme Jean, n'attendaient plus rien.
Il y a beaucoup de gens désespérés dans le roman, le déserteur qui sous un faux nom s'engage dans la Légion, un peintre qui se suicide, Nelly qui devient prostituée, Jean qui meurt. L'ambiance est assez sordide et le style brut. Ce qui ressort c'est une grande solitude des personnages avec la mort en arrière-plan.
Le roman ne ressemble que très peu au film de Marcel Carné avec Jean Gabin et Michèle Morgan. La réplique culte que tout le monde connaît (t'as d'beaux yeux tu sais) n'y figure même pas et Mac Orlan lui-même félicita le metteur en scène et Jacques Prévert, dialoguiste à la poésie désenchantée, pour l'adaptation qu'ils avaient faite de son roman. Soyons juste, si maintenant ce titre est en quelque sorte inscrit dans la mémoire collective, c'est davantage grâce au film, qui date quand même de 1938 (le roman avait été publié en 1927) et au visage des deux acteurs principaux, qu'au roman et à son auteur. Pourtant son nom résonne encore aujourd'hui entre l'inconnue et la notoriété. Marcel Carné a considérablement revisité l'intrigue, la concentrent sur la désertion du soldat, Nelly étant la seule, grâce à la prostitution dans laquelle elle s'est enfermée, à rêver un peu, parmi ces personnages marqués par la fatalité.

J'avais très envie de relire Pierre Mac Orlan (1882-1970) parce que son nom lui-même a toujours eu pour moi des relents de mystères. Il a été, de son vivant, un peu secret et de nos jours il est devenu lui-même carrément un personnage mais surtout un auteur injustement oublié. Pourtant il fait partie de ses écrivains dont le nom est régulièrement cité et qui sortent périodiquement d'un purgatoire littéraire où la mode les a enfermés. Sur son parcours, il a lui-même entretenu beaucoup de flou. Il aurait justifié l'origine de son pseudonyme - de son vrai nom Pierre Dumarchey– par l'existence d'une très improbable grand-mère écossaise. Pour accréditer cette certitude, on le voyait souvent coiffé d'un béret en tartan. Il y fut aidé par le hasard, des incendies qui, à cause des deux guerres, ont fait disparaître les registres d'état-civil (il était né à Peronne dans la Somme) et l'École normale de Rouen où il fut inscrit fut détruite par les bombardements. Il la quitta avant le terme de son cursus, la situation d'instituteur ne correspondant sans doute pas à son idéal de liberté. Apparemment il ne confessa de cette période que des souvenirs sportifs de rugby à XV! Son père lui-même brûla tous les documents personnels et familiaux. On est à peu près sûr d'une jeunesse faite d'une vie de bohème désargentée et montmartroise pendant laquelle il croisa Gaston Couté , Guillaume Apollinaire, Blaise Centrars, Roland Dorgeles... Jeune, il commit quelques écrits érotiques et les oeuvres de François Villon l'éveillèrent à la poésie, il s'adonna à la peinture, à la chanson qui lui offrit quelques maigres moyens de subsistance. La guerre de 14-18 où il fut blessé marque sans doute ses débuts d'ailleurs assez discrets dans la littérature. Pour autant le jeune aventurier qu'il était est devenu un authentique écrivain au sortir de la 1° guerre mondiale grâce à la presse qui fit de lui un reporter. Il fut plus tard élu à l'Académie Goncourt, donna son nom à un Prix et son style peu conformiste et en marge des grands courants littéraires traditionnels, influença cependant beaucoup d'hommes de lettres contemporains.
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Un livre rendu celebre par sa version cinématographique avec Jean Gabin rentrée dans la legende.Mais au depart il y a un tres bon livre qui se lit vite et facilement tant je suis rentré aisément dans l'histoire qui m'a passionnée.L'auteur m'etait inconnu mais ce livre merite le titre de classique pour sa qualité.
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C'est assez marrant comment on s'imagine une histoire, et, comment elle se passe réellement. Ici, on est clairement dans du fantastique, tout en ayant un message social.
Si j'ai trouvé parfois le discours perché à un moment, frôlant l'absurde, le reste m'a bien plus. Surtout que l'action se passe au célèbre repère du Lapin Agile à Montmartre.
Aujourd'hui encore, on peut y faire des soirées, sans Frédé par contre. Mais, vous pouvez toujours ressentir son charisme entre ces pages.
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