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Alessandro Fontana (Éditeur scientifique)Xavier Tabet (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070747221
576 pages
Gallimard (14/10/2004)
4.5/5   15 notes
Résumé :
Les Discours sont présentés ici dans une nouvelle traduction, plus proche de la langue de Machiavel, et sont accompagnés pour la première fois en France d'un apparat critique indispensable à la lecture du texte. Conçus sous la forme d'un commentaire des dix premiers livres de l'Histoire de Tite-Live, ils représentent l'achèvement de la pensée machiavélienne, à mi-chemin entre Le Prince (1513), l'Art de la guerre (1519-1521) et les Histoires florentines (1520-1525). ... >Voir plus
Que lire après Discours sur la première décade de Tite-LiveVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Seulement 35 des 142 livres qu'a écrits Tite-Live sur l'histoire de la Rome antique ont été conservés.
Dans son Discours, Machiavel exploite les dix premiers dans le but de proposer à deux de ses amis, à qui il adresse l'ouvrage, les exemples illustres desquels ils devraient s'inspirer pour réaliser leurs buts politiques dans la Florence du début du XVIe siècle.
A ce titre, le succès rencontré par Rome depuis sa fondation vers -750 jusqu'à l'événement de l'empire des Césars au début du 1er siècle ap JC, lui apparaît, sans discussion possible, comme un gage de la qualité et pertinence des choix opérés alors en matière de gouvernement; ceux-ci doivent donc être imités.

Il se trouve qu'entre deux périodes de main mise des Médicis sur la ville (1494-1512), Florence vit sous divers régimes républicains, passablement corrompus et faibles, en fait agonisants. A partir de 1498, Nicolas Machiavel y exerce d'assez hautes responsabilités administratives et jouit de plus d'une aura de conseiller politique jusque dans le domaine de la politique extérieure. Une de ses plus grandes préoccupations pendant cette période sera de tenter de mettre sur pied une milice armée pour la défense de la ville par elle-même, lui évitant de devoir recourir à des forces auxiliaires (notamment françaises) avec les conséquences fâcheuses que cela peut induire.

Ce n'est donc pas un hasard si le caractère capital pour la sauvegarde de l'Etat d'une armée "du peuple" bien formée et bien commandée imprègne la totalité du Discours ni si l'histoire de Rome fournit la matière première dominante de cette oeuvre.
Comme dans le Prince, mais sur un périmètre thématique plus large et des développements plus copieux, Machiavel présente et commente, tirés principalement de Tite-Live mais aussi de l'histoire de son temps, les évènements marquants relatifs à la vie des Etats, dont il met en lumière les causes sous-jacentes -Constitution, corps constitués, lois, décisions et comportements des dirigeants et dirigés, art de la guerre ou des relations inter-états, psychologie des parties prenantes- causes qui expliquent selon lui la phénoménale réussite de la fondation, l'expansion et la conservation de Rome, royaume d'abord, république ensuite pendant 5 siècles ou les échecs répétés et l'affaiblissement inéluctable de Florence, Venise ou Milan.

Ses argumentations restent souvent à un niveau assez général, et ce inévitablement compte tenu de la matière abordée et de son but, toutefois sans perte d'intérêt ni, sauf exception, de force persuasive. Il s'appuient, outre le poids de la renommée de Tite-Live, sur la logique, le bon sens, l'expérience qu'a Machiavel des situations et de la psychologie des individus ou des groupes et populations. Pour autant la preuve des "vérités" énoncées est rarement faite rigoureusement car, bien que la force des quelques exemples rapportés soit souvent invoquée comme devant emporter la conviction, Machiavel méconnait avec constance la règle de logique qui veut que si un contre-exemple démontre effectivement que telle assertion est fausse, un ou deux exemples ne prouveront jamais que telle autre est vraie.
Pourtant, sur de nombreux points, sans être juriste, ni officier, ni gouverneur, on est prêt à lui faire crédit.

La lecture de cet opus assez volumineux est rendue agréable par la plume alerte et légère de l'auteur, le rythme bien cadencé des courts chapitres, l'intérêt historique intrinsèque des sujets, aujourd'hui antiques ou anciens mais qu'on requalifie aisément en modernes tant, d'une part le transport mental au XVIe siècle s'opère efficacement, d'autre part les déboires des Etats et dirigeants du XXe se prêtent à une superposition jubilatoire.

En ce sens, il convient de relire Machiavel mais peut-être pas comme le firent Frédéric II de Prusse, Napoléon 1er de Corse ni a fortiori, qui sait, FH de l'Élysée!
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Parce qu'il dévoila froidement l'ignominie des logiques de la domination, on attribue généralement et sans plus d'analyse une parenté d'esprit à Machiavel avec cette même domination, en en faisant ainsi l'un de ses idéologues.

Mais au-delà du réflexe primaire, de cette fuite de la conscience qui prétend rendre responsable d'un mal celui qui le met en lumière, tout lecteur attentif et faisant preuve d'un peu de discernement, constatera aisément l'absurdité de cette thèse.

Pour se faire une idée claire de la personnalité de Machiavel, il faut lire le passionnant recueil de ses lettres, paru en deux gros volumes sous le titre
« Toutes les lettres officielles et familières de Machiavel » à la Librairie Gallimard en 1955. Outre sa prodigieuse intelligence, on y découvrira un homme simple, généreux, profondément attaché à l'amitié, à l'intérêt commun, et fort peu intéressé par le pouvoir et le profit personnel. Machiavel fut avant tout citoyen de Florence, alors capitale culturelle De La Renaissance, et oeuvra toute sa vie à tenter de maintenir la liberté de sa cité dans une époque où, la guerre était la situation la plus courante dans une Italie divisée à l'extrême, l'élimination physique des opposants politiques, la règle.

On comprendra dans ces conditions, que Machiavel qui ne disposa jamais d'autre puissance que celle de sa propre Virtu, eut à prendre pour s'exprimer quelques précautions oratoires et chercha à voiler quelque peu les intentions véritables de ses écrits.

Mais c'est justement dans ce « Discours sur la première Décade de Tite-Live », ou Machiavel profitant de cette distance historique donne son interprétation d'une période cruciale de l'histoire romaine, que l'on découvre les éléments fondamentaux de sa conception du politique.

Il est devenu, pour des raisons que chacun appréciera, parfaitement impossible à un « politicien » de notre temps de concevoir ce que put être le sens de la notion de Virtu dans l'esprit d'un Machiavel et surtout de la possibilité de la mettre en pratique. Aussi, aucun d'entre eux ne comprendra, pour ne donner qu'un seul exemple, la signification du chapitre 4 du livre Premier de cet ouvrage. Nous laissons aux lecteurs plus curieux de vérité le soin de la découvrir.
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Livre à mon sens majeur de Machiavel, le plus important. Comme je le disais dans ma critique du Prince, cet ouvrage est irrémédiablement lié.
Machiavel y réfute la prééminence légitime d'un seul chef qui pourrait gouverner sans la participation du peuple ( le peuple pour Machiavel étant tout le monde).
Machiavel pour ce faire, inscrit sa réflexion à l'époque de la première décade de Tite-Live donc, au moment de la création de la plèbe comme assemblée populaire et contre pouvoir du Sénat.

Toute l'articulation logique de Machiavel est de considérer que le pouvoir politique ne peut évoluer, progresser et s'enrichir que dans le débat et l'émulation conflictuelle (mais pacifique) d'arguments et d'idées.
on touche là du doigt une pensée qu'aura Montesquieu dans la distribution des pouvoirs mais aussi Rousseau dans la confrontation constructive des pouvoirs politiques.

Brillamment écrit, comme toutes les oeuvres de Machiavel, défense du peuple et de son bon sens, le philosophe en profite pour empoisonner sa plume à l'attention des chefs corrompus de son époque avec lesquels il eut de mauvais rapports.

Lorsque je lus cet ouvrage je pensai d'emblée aux caractères de la Bruyère, les petites constatations, les petites anecdotes parsemant l'oeuvre et permettant l'illustration d'un propos plus abstrait et philosophique.

un livre que je conseille à tout amoureux de la philosophie politique.
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C'est ma première lecture d'un ouvrage des éditions Les Belles Lettres, et j'ai été séduit par la qualité du livre, à la fois sobre et élégante. C'est une belle invitation à découvrir une oeuvre d'apparence austère et difficile. La curiosité devient plus vive grâce à une préface engageante de Claude Lefort qui parvient à rassurer le lecteur qui ne connaît rien ou assez peu de l'histoire romaine. Avoir lu Tite-Live, Xénophon ou Cicéron n'est donc pas un impératif pour apprécier ces Discours (bien que cela puisse aider nécessairement).

Ces Discours sont composés de trois livres. le premier s'intéresse à la politique intérieure de Rome, le deuxième à la politique extérieure et le dernier aux grands acteurs de cette période.
Machiavel comprend bien avant Montesquieu, que le frein à la tyrannie est dans un équilibre des pouvoirs. Il commence par observer que les régimes qui durent sont ceux qui font place à trois autorités: celle d'un prince, celle d'une noblesse et celle du peuple.
En s'appuyant sur les récits de Tite-Live, il remarque que les dissenssus entre peuple et noblesse permirent à la République romaine d'accroître la puissance de son État. Il compare alors le système romain à celui de sa ville, Florence pour tenter de comprendre ce qui manque à ce dernier.
Enfin, le caractère très méthodique de l'auteur du Prince apparaît de manière remarquable dans ce livre. Comme un scientifique consciencieux, il analyse chaque cas de figure par des comparaisons, il émet des hypothèses, il propose des interprétations. Malgré son parti pris évident, cela donne une idée de cette pensée humaniste à l'oeuvre durant la Renaissance italienne.


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Quelle joie d'avoir reçu ce livre ! Comme vous le savez, j'ai fait une double licence ainsi qu'un double Master, de musicologie et de philosophie. Et Machiavel a toujours été un auteur que j'admire ! Je remercie donc Babelio ainsi que la maison d'édition Les Belles Lettres pour cet envoi revigorant, qui m'a replongée une décennie en arrière lorsque j'arpentais les couloirs du sixième étage à la fac, en quête de ce savoir philosophique.

Impossible de résumer ce livre sans délivrer le système de pensée du philisophe. Je n'entrerai pas plus dans les concepts philosophiques, je vous laisse le choix de vous y plonger ou pas. Néanmoins, on peut tout de même dire que ce livre reprend les fondements de la société, au sens très large.

Une lecture très plaisante quand on aime comprendre le fondement des éléments qui nous entourent aujourd'hui. Un livre criant de vérité, où finalement, la logique devrait être reine. C'est par son bafouement que la société etait déjà, et ce à l'époque de Tite Live, bancale- voire décadente.

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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
On découvre aisément d'où naît cette passion d'un peuple pour la liberté. L'expérience prouve que jamais les peuples n'ont accru et leur richesse et leur puissance que sous un gouvernement libre. Et vraiment, peut-on voir sans admiration Athènes, délivrée de la tyrannie de Pisistrate, s'élever dans l'espace de cent ans à un si haut point de grandeur ? Mais ce qui est plus merveilleux encore, c'est celle à laquelle s'éleva Rome, après l'expulsion de ses rois. Ces progrès sont faciles à expliquer : c'est le bien général et non l'intérêt particulier qui fait la puissance d'un État; et, sans contredit, on a en vue le bien public que dans les républiques : on ne s'y détermine à faire que ce qui tourne à l'avantage commun et si, par hasard, on fait le malheur de quelques particuliers, tant de citoyens y trouvent de l'avantage qu'ils sont toujours assurés de l'emporter sur ce petit nombre d'individus dont les intérêts sont blessés.
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"Les désirs de l'homme sont insatiables : il est dans sa nature de vouloir et de pouvoir tout désirer, il n'est pas à sa portée de tout acquérir."
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Que les états faibles balancent toujours à prendre une décision et que les décisions tardives sont toujours nuisibles.
La guerre des latins en fournit encore un exemple. Les Laviniens, sollicités par eux de les secourir contre les romains, mirent tant de lenteur à se décider, qu'à peine sortis de leurs murs, on leur annonça la défaite des latins. Ce qui fit dire à Milonius, leur préteur : " que les romains leur feraient payer cher le peu de chemin qu'ils avaient fait."
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Dans toute République il y a deux partis : celui des grands et celui du peuple ; et toutes les lois favorables à la liberté ne naissent que de leur opposition.
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Et quand le hasard fait que le peuple n'a plus confiance en personne, comme cela arrive parfois, ayant été trompé dans le passé par les choses ou par les hommes, on en vient nécessairement à la ruine.
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Videos de Nicolas Machiavel (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nicolas Machiavel
Émission “Une vie une oeuvre” dirigée par Martin Quenehen. “Nicolas Machiavel, storico, comico e tragico” : première diffusion sur France Culture le 10 avril 2008 (rediffusée le 31 janvier 2015). L'auteur du “Prince” n'est pas le cynique que dépeint sa légende noire. Il fut plutôt un homme libre et un fervent républicain, au sourire en biais... Peinture : Cristofano Dell'altissimo, “Portrait de Nicholas Machiavel”. Par Simone Douek. Réalisation : Dominique Costa. Attachée de production : Claire Poinsignon. Avec la collaboration d'Annelise Signoret de la Bibliothèque centrale de Radio France. 1ère diffusion : 10/04/2008. “Historien, comique et tragique” : c'est ainsi que se désigne lui-même Machiavel, en signant une lettre adressée à son ami Guichardin à propos des événements de 1525, et des temps troublés où Charles Quint assure sa mainmise sur la péninsule italienne. Historien, il n'a cessé de l'être, depuis les années où, nommé secrétaire à la chancellerie florentine, il effectue des missions diplomatiques à l'extérieur : il scrute alors la vie politique de Florence et des pays où il se rend, il l'analyse, il l'écrit, éclairé par la lecture des Anciens. Et ce, jusqu'à la fin de sa vie, puisque toute son œuvre est générée par ses activités politiques qui suscitent chez lui discours, commentaires, réflexions, pour aboutir à ce dernier grand texte, commandé par Jules de Médicis devenu le pape Clément VII, que sont les Histoires florentines où il traite de l'histoire toute contemporaine de Florence. Comique, celui qui écrit aussi des pièces de théâtre dont la plus connue, “La Mandragore”, retrouve, à travers le rire et les personnages créés, des échos de la politique et de la vie publique dont il ne peut jamais vraiment s'éloigner. Tragique, comme sa description de la réalité des hommes, comme le destin et les qualités qu'il prête au Prince, qui “ne peut fuir le renom d'être cruel”. Et ce froid réalisme politique a engendré le mot “machiavélique”, quand il faudrait plutôt expliquer ce que “machiavélien” veut dire. Avec : Corrado Vivanti, auteur de “Machiavel ou les temps de la politique” (éd. Desjonquères) Jean-Louis Fournel et Jean-Claude Zancarini, traducteurs du “De principatibus, Le Prince” (éd. PUF) Françoise Decroisette, professeur de littérature italienne, spécialiste du théâtre italien, traductrice Myriam Revault d'Allonnes, professeur des universités à l'EPHE, auteur de “Doit-on moraliser la politique ?” (éd. Bayard)
Thème(s) : Arts & Spectacles| Politique| Renaissance| Nicolas Machiavel
Source : France Culture
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