Attention spoiler : Cette critique contient des éléments qui peuvent dévoiler des éléments du roman "
la maison assassinée" de
Pierre Magnan.
Cinq ou six ans après la publication de "
la maison assassinée" en 1984,
Pierre Magnan a éprouvé le besoin de revenir sur l'histoire de son héros Séraphin Monge. le roman initial centrée sur le retour de Séraphin dans son pays natal, sur la découverte du crime qui a frappé sa famille une vingtaine d'années auparavant et sa vengeance me semblait se suffire à lui-même. A la fin du livre, le sort de Séraphin et de la plupart des personnages était scellé.
Je ne sais pas ce qui a motivé
Pierre Magnan. Mais "le mystère de Séraphin Monge" n'est pas à proprement parler une suite. Par contre, si je reprends l'analogie que j'ai utilisée dans la critique du roman "
la maison assassinée", concernant la mythologie grecque, on peut retrouver ici les mêmes concepts.
En effet,
Pierre Magnan reprend en main les destins des autres personnages du roman "
la maison assassinée" pour approfondir et détailler ce qui a déjà été raconté sans s'attarder.
Par exemple, les destins des trois femmes vainement amoureuses de Séraphin dont il avait déjà donné quelques clés sont repris et détaillés à la manière de la "saga" de la famille des Atrides qui fait l'objet par les poètes tragiques grecs de plusieurs développements dans les pièces de théâtre sur tel ou tel personnage (Oreste, Agamemnon, Iphigénie). Magnan ne remet pas en doute la saga initiale. Simplement, il réexamine en détail le destin de Marie Dormeur ou de Rose Sépulcre ou de la famille Dupin.
L'exemple le plus criant est celui où Rose sépulcre, après avoir découvert que Séraphin Monge est mort accidentellement dans une coulée de boue, décide qu'il convient de retrouver la dépouille pour l'enterrer en "terre sacrée". accessoirement dans son pays natal. Il y a indéniablement de l'Antigone et de son combat acharné pour une sépulture de son frère Polynice, dans le personnage de Rose qui ira mettre en jeu sa vie pour cet objectif. Mais on peut trouver d'autres figures ou analogies où certains personnages s'efforcent de combattre le destin susceptible de tuer, telle Marie Dormeur qui enferme sous clé ses deux fils ainés qui veulent combattre pendant l'Occupation, l'un avec les fascistes français, l'autre pour la Résistance afin de tenter de les préserver de la mort.
L'autre aspect important du roman c'est la présence bienfaisante de la sépulture de Séraphin Monge qui protège ceux qui s'en approchent. Au grand dam des autorités ecclésiastiques qui ne veulent pas qu'on parle de miracle même si de troublants évènements se produisent …
Il y a un aspect très certainement ironique et narquois dans l'écriture de
Pierre Magnan dans lequel on retrouve son pacifisme qu'il mesure (sans le dire) à l'aune de celui de son maître à penser
Giono. Une grosse pincée d'anti-cléricalisme, peut-être aussi ?
Une certaine ironie aussi en faisant apparaître au coin du bois un personnage dépenaillé, maigre et pacifiste, un certain Laviolette dont Magnan fera dans bien d'autres romans, un commissaire de police bien en chair, truculent et bon vivant…
Là où on retrouve certains aspects propres à
Giono, c'est dans ces descriptions d'amour fou ou morbide où par exemple, Marie se donne physiquement à des hommes en qui elle ne voit que l'image de Séraphin, seule capable de lui déclencher l'orgasme. Elle n'osera pas donner à son premier né le nom de Séraphin mais elle le nommera Ange …
Le roman est intéressant et se lit avec grand intérêt. Je ne sais pas si ce prolongement du roman initial s'imposait vraiment …
Je répondrai positivement pour les deux tiers du roman qui explicitent et développent des zones d'ombre du roman initial. Cependant, il y a quand même un peu (beaucoup) de délayage surtout vers la fin du roman qui n'apporte plus vraiment grand-chose à l'histoire en particulier tout ce qui concerne l'évêché ou la famille Austremoine qui remet le couvert un peu inutilement sur l'histoire du lieu où est mort Séraphin Monge.
Je vais mettre une note en retrait d'un point par rapport à "
la maison assassinée", ce qui le classe, de toutes façons, parmi les bons romans.