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Critique de Azallee92


Situons le roman dans son contexte : En 1799, c'est la fin du Directoire, Bonaparte, premier consul veut conserver les acquis de la Révolution, éviter le retour de la Monarchie, et écarter le peuple de la vie publique. Il veut tout contrôler, surveiller, policer. En 1800 c'est l'empire, Napoléon est nommé consul à vie. le duc d'Henghien, petit fils du prince de Condé, chef de l'armée des émigrés, est fusillé en prévision d'un éventuel retour de la monarchie.
En avril 1814 après toutes ses conquêtes et la défaite de Russie, Napoléon abdique sur l'île d'Elbe.
La France respire, la paix va revenir. c'est la Restauration : le frère de Louis XVI, 58 ans, en exil en Angleterre depuis de nombreuses années, prend le nom de Louis XVIII. Un gouvernement provisoire est constitué, Une nouvelle charte constitutionnelle est présentée, qui va couper la France en deux, les royalistes et les républicains, le pouvoir exécutif est réservé au roi qui peut approuver ou suspendre les lois, dissoudre la chambre des députés. le poste de 1er ministre est supprimé. Seuls les français bénéficiant de bons revenus fonciers ont le droit de vote.
Mais Napoléon, le petit corse, sait que la France peut encore l'accueillir : il quitte son île pour 100 jours, du 20 mars au 18 juin 1815.
Il remet les pieds en France au printemps 1815 et c'est en mars 1815, au début des 100 jours que nous faisons connaissance avec « l'Angélique », barque marchande de Pierre Jourdan, 60 ans, Héloîse sa femme, et Henri leur fils 35 ans, barquiers de père en fils qui ont choisi le monde de l'eau, et qui devra épouser une fille « du monde de l'eau ».
Pierre Jourdan est respecté des compagnons et patrons de barques, très contrarié par l'arrivé de Napoléon au pouvoir, lui qui est royaliste du côté Capet. Il aime sa situation d'homme indépendant et libre de vivre au grand air, dans l'odeur changeante selon les saisons et les heures de la journée de l'eau du canal, même si, vivants dans l'incertitude du lendemain, ils dépendent financièrement des négociants car ces périodes d'incertitude politique nuisent au commerce et incite les négociants à la prudence.
« La Désirée », barque marchande qui a vieillit et qu'il faudra remplacée, conduite par Joseph Aubanel, 40 ans, sa femme Justine, deux garçons Etienne 19 ans, et Nicolas, 18 ans qui n'aime pas cette vie des hommes de l'eau, il veut être paysan et travailler la terre, « dans les vignes du Languedoc ou les blés du Lauragais » et est amoureux de Juliette dont le père possède un domaine de 50 hectares. Et Marthe 10 ans.
« La Jolie » barque de François Courech et sa femme Antoinette et leurs filles Caroline et Rose qui devront se marier à d'autres mariniers.

On partage sur toute une année la vie simple mais tourmentée, sur le canal des mariniers, particulièrement des trois familles qui pratiquent l'entraide et la solidarité, des négociants, fermiers et vignerons, charretiers, lavandières, couturières qui vivent du canal et autour du canal.
D'abord nommé « canal royal de Languedoc », les révolutionnaires le rebaptisent en 1789 « canal du Midi ». A partir du XIXe siècle, le canal latéral à la Garonne, qui double la Garonne de Bordeaux à Toulouse, prolonge le canal du Midi pour fournir une voie navigable de l'océan Atlantique à la mer Méditerranée, sans faire le tour de l'Espagne : l'ensemble des deux canaux est dénommé « canal des Deux-Mers ».
Ouvrage d'art exceptionnel, prouesse technologique, considéré par ses contemporains comme le plus grand chantier du XVIIe siècle, le canal du Midi révolutionne le transport fluvial et la circulation dans le Midi de la France de l'Ancien Régime. le défi, relevé par Pierre-Paul Riquet, son concepteur, est d'acheminer l'eau de la montagne Noire jusqu'au seuil de Naurouze, le point le plus élevé du canal.
On fait connaissance également avec Odilon Rigal, 45 ans, opportuniste et affairiste qui vient d'un milieu pauvre et qui a trimé en étant jeune en trainant une carriole pour livrer des légumes aux halles. Il s'échinait aux travaux des champs, en plein soleil, dans la poussière et la sueur, dormant dans une cabane en bois, il voyait à cette époque les barques du canal comme un « paradis ambulant ».
Il recherche des patrons de barques malheureux en affaires, endettés ou hypothéqués, auxquels il rachètera leur barque à moindre frais. Il en compte déjà 17, ainsi que des auberges, des entrepôts, des services de voitures particulières. Il s'est crée une situation sous le règne de Napoléon par des intrigues, un réseau de relations, de débiteurs, placés entre Toulouse et Sète.
Il veut entrer dans le monde des hobereaux, trouver un parti noble pour ses enfants, ou des propriétés ou un nom à particule. le canal du midi lui sert de terrain pour bâtir sa fortune et prendre une revanche sur la vie et aussi sur cette époque où Pierre Jourdan lui a refusé de le prendre à bord de la barque de son beau-père. Il en a ressenti une profonde humiliation et veut régler ses comptes.
Cette période de la Restauration apporte une crise économique et des troubles, voire même des répressions, dont certains, tels « les verdets ou ultras » qui souhaitent le retour du Comte d'Artois, le dernier Bourbon, et veulent profiter, par des coups bas et mauvaises manoeuvres, de s'accaparer les biens et les charges des hobereaux, tandis que d'autres attendent le grand « chambardement » du passage à l'avènement de la République, et tous attendent la chute de Napoléon pour prendre el pouvoir.
Un marinier doit faire vivre sa famille et mettre de l'argent de côté pour faire construire une autre barque pour installer le fils aîné et faire perdurer la vie sur l'eau sur plusieurs générations. Les mariages se font entre mariniers car toute leur vie gravite autour des barques. Ils sont inquiets devant cette période de révolution économique qui se profile avec l'Empire.
Ce roman agréable à lire qui nous promène sur le canal du Midi, m'a rappelé le roman de Christian Signol « le royaume du fleuve » qui se situe lui en 1851, au coup d'état du prince Napoléon.
Plus prêt de nous, ce roman plaira à ceux qui naviguent ou qui ont navigué en pénichette sur le canal de nos jours, comme on peut voir quelques reportages sur « Youtube ».
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