Voilà un livre fort intrigant ! L'histoire de ce juil fuyant en 1937 l'Allemagne nazi et se rendant aux olympiades d'échecs de Buenos Aires est complétement iconoclaste, mêlant avec finalement beaucoup de bonheur fiction et faits réels. Ici, comme souvent en temps troublé, la petite histoire vient percuter la grande, et sur ce roman plane la tragédie qui va bientôt s'abattre sur l'Europe, et sur les juifs. C'est plutôt bien écrit, avec parfois une certaine profondeur de réflexion. Il n'est pas nécessaire de connaître les échecs pour apprécier, même si cela facilite la lecture.
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Ariel Magnus conte son grand-père, juif de Hambourg en exil en Argentine, et la 8e Olympiade d’échecs qui s’y tint l’été 1939.
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"Voilà plusieurs jours que nous avons trop de travail, plusieurs semaines, des mois. Celui-ci me prend toutes mes forces. A tel point que, de temps en temps, et parfois pour une longue durée, j'ai l'impression de sentir disparaitre au fond de moi tout désir de donner un sens à ma vie. Buber ne parvient même plus à m'émouvoir et j'ai même laissé tomber la correspondance que nous entretenions. Ce n'est vraiment pas bon signe." P71
Il est bon de ne pas attendre trop de choses à l’avance. Le Vigo. De l’extérieur, le navire ne semble pas vraiment grandiose, mais c’est malgré tout un bateau intéressant à observer. Il s’est fait remorquer pour quitter l’embarcadère. Certaines connaissances, des voisins pour la plupart, sont venues pour souhaiter bonne chance dans sa nouvelle patrie au gamin qui s’en va, au monsieur, à l’homme qui est né ici et à celui qu’ils ont connu tout petit. Ils sont surpris d’apprendre que tous ces gens sont obligés de quitter le pays, ils agitent leurs mains avec un peu de regret et avec le secret espoir que tout se passera bien pour eux de l’autre côté de l’océan. C’est pour cela qu’ils semblent joyeux ; ils saluent et saluent encore, en rythme, puis tout s’estompe, le navire finit par disparaître au loin.
Il n’est vraiment pas dit que je parvienne un jour à écrire un livre, je crois même que cela n’arrivera jamais, note-t-il vers la fin du troisième et dernier cahier, au mois de décembre 1953. Mais je pense savoir pourquoi il existe des personnes comme moi qui, si je puis m’exprimer ainsi, ne parviennent jamais à mener un projet à son terme, et qui se contentent de rêver, avec la ferme volonté de faire et de tenir bon. Ces gens doivent être détenteurs des idées qu’ont écrites et dites d’autres individus plus importants qu’eux. Ils peuvent jouer un rôle de médiateur et sont aussi nécessaires que n’importe qui dans ce monde. Sur ce terrain, il n’est pas d’échelle de valeur, de haut ni de bas, tout se situe sur un même plan fini, par opposition à l’infini…
Je sais que je suis seul. Je regarde le ciel et ce sentiment apparaît à nouveau : si Dieu est avec moi, que peut-il donc m’arriver ? Et c’est ainsi que la traversée que nous devons effectuer me semble courte : nous restons sur cette terre et Dieu est forcément le même, je me ressemble toujours, c’est formidable de pouvoir poser mes mains sur le giron de Dieu. Et s’il me choisissait pour annoncer son nom à l’humanité, ou même simplement pour suivre ses préceptes… Pourquoi ne le ferais-je pas ? Peut-être parviendrai-je à accomplir mon devoir face au Créateur… il me suffirait d’obtenir juste un peu d’aide.
L’Allemagne avait déjà envahi la France et mon grand-père était convaincu qu’une victoire totale des nazis allait nous faire retourner au Moyen Âge. Voilà pourquoi il fallait tenter de sauver ce qui n’avait pas encore était détruit ou pillé.