Citations sur La fille aux licornes, tome 3 : L'affrontement (11)
Les licorniers laissèrent alors les animaux agir. Finful et Souffle Soie tendirent le nez vers Farouche, jusqu'à effleurer son cou par de petits gestes qui faisaient songer à un « ça va ? » humain. Kalt se contentait de rester à sa place. Il ne manifestait aucune intention de se rapprocher pour rassurer Farouche, mais Ascane l'avait prévu. Elle n'attendait de lui que calme et indifférence, comme on plonge un ivrogne agressif dans un abreuvoir glacé pour étouffer ses ardeurs. Les effleurements des licornes firent frissonner Farouche, elles continuèrent et, progressivement, la licorne baissa la tête. Finful avança d'un pas et posa son menton sur la garrot du mâle. Souffle Soie fourra son museau dans la crinière de Farouche et lui gratta le cou à coups de dents rapides. Celui-ci émit alors une plainte qui ressemblait à un pleur, avant de plier complètement l'encolure, jusqu'à presque toucher le sol de son nez.
- Licornes, humains, tous aussi bêtas quand reviennent les hirondelles ! railla Météor. Regarde les yeux de ton mâle qui papillonnent.
- Météor, Rai de Lune t'attend. Hors de ma vue !
Ascane poussa le nez de son uni d'une tape affectueuse, puis dépassa à grands pas les deux licorniers qui chantaient bras dessus bras dessous, murmurant entre ses dents :
- Licornes, humains : mâles de tous poils, tous des bêtas !
- Tu aimes bien le petit homme ?
- Ouéwy est un précieux compagnon, doué de ressources insoupçonnées.
- Ce n'est pas un mâle pour toi.
- Météor ?
- Oui.
- Tu m'enquiquines !
- Oui.
- Vigor ! s'écria Jorgan en lui frottant vigoureusement le front. Comme je suis heureux de te retrouver mon beau. J'étais perdu sans toi !
La licorne encensa pour acquiescer aux propos de son licornier. Ascane chercha la reine. (…) Elle nota avec surprise que, si Jorgan avait bondi au cou de Vigor, il se précipitait pas vers Aylette, mais la laissait venir à lui. Était-ce de la pudeur ? Une attitude digne que la royauté impliquait ? C'était en tous les cas bien triste...
Optimisme, pessimisme. Comme faire appréhender de telles notions à Météor ? Il analysait les faits avec réalisme !
Il se passe qu'une fois de plus, Emelyn, c'est une apprentie qui a mis le doigt sur un danger qui menace Ampleterre, s'emporta la souverain. Si, non seulement vos observations, mais mes questions ne vous ont pas mis la puce à l'oreille, nous avons un souci, chef des licorniers du roi ! (…) Les loups, d'habitude si peureux, ont préféré attaquer des paysans, plutôt que des vaches. Et ça ne gêne aucun de vous ? Félicitations, messieurs ! ironisa-t-il. Avec des protecteurs comme vous, Ampleterre peut dormir sur ses deux oreilles !
Alors qu'Ulb et Alen pleuraient de rire en se tenant comme des ivrognes, des larmes de désespoir perlèrent aux yeux d'Erdnaël. Ascane eut pitié de son ami. Les meilleures plaisanteries sont toujours les plus courtes.
- Bien. Nous serons plus à l'aise pour discuter.
Discuter avec le licornier ? songea Ascane. Voilà qui était nouveau. Obéir, acquiescer, écouter, servir, exécuter, satisfaire étaient des verbes qui convenaient mieux à leur relation avec le maître. La discussion n'était pas son fort.
Nous avons besoin d'un chef, pas d'une gamine geignarde ou d'un boulet !
(Ascane s'adressant à sa reine pour la faire sortir de sa léthargie).
On ne se fait pas à la mort, mais on l'affronte avec un peu plus de courage à chaque fois qu'on la rencontre.