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Aux confins du rêve et de la réalité, entre le monde des vivants et celui des morts, cette prose magnifique vous emmène loin dans le temps, dans un pays déchiré par une guerre civile épouvantable. Le Zimbabwe s’appelait encore Rhodésie, on est entre deux époques, dans une transition sanglante.

Ce texte lyrique et troublant raconte le destin tragique de Gordon, un Africain blanc, qui comme l’auteur puise ses racines en Écosse et dans une Afrique australe envoûtante avec cette grand-mère Xhosa, dotée de pouvoirs extraordinaires dont le narrateur a hérité.

Ce récit à rebours, énigmatique en douze parties, comme autant de portes d’entrée dans le passé, commence par la fin dans cette terre rouge brûlée de soleil où l’âme du héros s’en va rejoindre la cohorte de fantômes qui l’ont accompagné pendant une vie, marquée par le secret pesant de ses origines.

Par touches impressionnistes se reconstituent la vie et les rêves de Gordon, les épreuves traversées, la douleur de se voir rejeté par les habitants de la terre dans laquelle est enterré son cordon ombilical, lui le Xhosa blanc arrière petit fils de Ukusaba, la fille de Ngamathamb, initié par M’Bala.

C’est l’Afrique australe, ses montagnes et ses fleuves, le soleil implacable ou les pluies diluviennes, les chevaux, les hippopotames, les kraals plein de bétail, les couvertures rouges des hommes, les sorciers guérisseurs, la lecture des présages dans le sang versé, les rituels de deuil, qui se mêle à une culture chrétienne rigoriste.

C’est un récit d’enfance, un roman d’apprentissage où l’on découvre que rien n’est simple quand des populations mélangent bien plus que leurs gènes, on ne sait pas trop si la guerre et son cortège d’abominations, apporte vraiment la libération que les idéologies de pacotilles proclament, depuis Cuba ou le Mozambique.

Magnifique roman, dans lequel l’auteur, avec l’art consommé d’un grand conteur où comme à la tombée de la nuit autour d’un feu, une simple invocation, les bons mots font surgir un univers disparu, la complexité du monde et des liens unissant les hommes à une même terre.

Une heureuse découverte grâce à cette opération masse critique, et je remercie les éditions Anne Carrière et Babelio, pour ce moment magique avec un grand écrivain, que j'aimerais sincèrement rencontrer.

A présent, je sais que ma bibliothèque est habitée par un fantôme conteur !
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Le premier chapitre est un condensé d'auteurs. Tour à tour, il vous fera penser à Germinal de Zola pour la mine, Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, pour son univers fantastique et onirique, et la tournure de commencer le début par la fin à un titre bien connu : la chronique d'une mort avancée de Gabriel Garcia Marquez. Roman complexe, intriguant, singulier qui ne ressemble pas à la littérature africaine. Même s'il parle de l'empire colonial à un certain moment, ce n'est pas à proprement parler le sujet du livre. Mais plutôt à une famille maudite, de devins qui prédisent l'avenir ou le passé par le sang. À des croyances animistes. 12 portes comme les 12 chapitres qui vous amènent en Enfer. L'auteur vous entrainera malgré lui à suivre les traces du Sergent Gordon.Une piste pour les aventuriers.
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L'histoire du sergent qui savait lire dans le sang.
Oui, l'enfer existe bien sur terre, ou plutôt sous terre.
C'est ici, dans une mine de cuivre de ce qui deviendra bientôt le Zimbabwe mais qui, en 1978, est encore une colonie aux mains de l'Empire britanique. C'est ici, au fond de cette mine, que l'on découvre le Sergent Gordon, soldat des Forces Spéciales de Rhodésie, prisonnier de la guérilla marxiste et qui finit enterré vivant.
Le roman est construit à rebours et les chapitres suivants nous emmèneront remonter le temps, explorer le passé de Gordon et de son pays.
Cette histoire de George Makana Clark débute comme une épopée guerrière, digne de l'apocalypse, au fil de ces années qui mirent le pays à feu et à sang.
Il sera effectivement beaucoup question de feux : les fours de la mine de cuivre, le napalm que les avions lâchent sur les villages, le foyer d'un étrange crématorium, ...
Il sera effectivement beaucoup question de sang aussi, parce que Gordon sait lire dans le sang, un don hérité de ses ancêtres, et que certains sont prêts à s'entailler le doigt jusqu'à l'os pour qu'on leur dise leur avenir.
Comme beaucoup dans ces guerres africaines, Gordon passera d’un camp à l’autre sans trop savoir comment et encore moins pour quoi, mais à la fin des années 70, il est devenu le Sergent Gordon, éclaireur des Forces Spéciales, doué pour pister et traquer les rebelles en fuite qui se cachent derrière des noms empruntés à la Révolution Russe (Palais d’Hiver, 25-Octobre, …) pour protéger leur famille et leur village et qui ont été formés en Algérie ou à Cuba. L’éclaireur Gordon carbure au butane qu'il sniffe après avoir fourni par radio, les coordonnées des villages qu’il convient d’arroser au napalm.
Ces premières pages, celles de la guerre, sont peut-être les plus fortes du bouquin et sans doute les plus passionnantes mais ce roman est bien plus qu'une histoire de guerre.
Car George Makana Clark est né et a grandi en Afrique et dans ses veines coule le sang noir de son arrière-grand-mère Xhosa. Et c’est bien le roman lui-même qui est métissé : à la précision et à la rigueur d’une narration et d’une écriture très occidentales viennent se mêler les sensations physiques d'une nature brute (The Raw Man en VO) et la puissance évocatrice des contes africains.
Puisque Makana Clark va nous ouvrir Les douze portes dans la maison du Sergent Gordon, il y aura douze chapitres dans le livre. Douze périodes à rebrousse-temps depuis la fin jusqu’aux origines. Autant d'étapes initiatiques qui seront franchies à rebours par le personnage dont on découvre peu à peu le passé, mais on devine également que, dans l’autre sens, ces douze portes nous font progresser, nous lecteur, tout au cœur d’une Afrique puissante, magique, physique, charnelle où se côtoient les morts, les fantômes, les animaux et quelques vivants. C’est certainement le roman le plus africain mais aussi le plus accessible qu’il nous ait été donné de lire et c’est sans nul doute un futur grand classique.
Où l'on croise toutes sortes de figures, plus fortes les unes que les autres.
Un officier qui joue au golf, dans un uniforme rouge, sur les terres brûlées par le napalm.
Une mère éplorée qui élève des canaris dans son corsage.
Un révérend à demi-fou qui maltraite les hommes comme les chevaux et qui se shoote à la réglisse.
Une jeune fille muette qui vous parle par le simple contact de sa main.
Et même des perroquets qui répètent sans cesse les pires obscénités, et les ancêtres de Gordon et bien d’autres encore, mais on ne va pas tout dévoiler.
À la lecture des derniers chapitres, que l’on suppose en partie autobiographiques, on se dit que décidément, Makana Clark, lui non plus, n’est pas un personnage tout à fait ordinaire.
Alors qu'est-ce qui nous retient d'épingler cinq étoiles à ce puissant roman ? Peut-être une baisse de rythme et quelques longueurs à mi-parcours, ou une faiblesse du lecteur malmené, lors des épisodes de l'adolescence tumultueuse du jeune Gordon.
Les premiers chapitres sur la guerre avaient mis la barre très haut et il faudra patienter jusqu'au franchissement des dernières portes, celles qui cachaient les origines, pour retrouver un souffle aussi puissant.
Makana Clark est un véritable conteur et si ce n'était la violence de ces destins, on pourrait se mettre à rêver de mille et une nuits africaines, où les conteurs et les histoires s'imbriquent sans fin les uns dans les autres.
Depuis le fond de la mine (celle du début, celle où le Sergent Gordon finit enterré), quelqu'un raconte.
[...] - Toi, novice, tu aimes les histoires ?
Je hochai la tête.
- Bien ! Tu repartiras d'ici des histoires plein la tête.
...
Pour celles et ceux qui aiment l'Afrique.
Lien : http://bmr-mam.blogspot.fr/s..
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Magnifique roman, dans lequel l'auteur, avec l'art consommé d'un grand conteur où comme à la tombée de la nuit autour d'un feu, une simple invocation, les bons mots font surgir un univers disparu, la complexité du monde et des liens unissant les hommes à une même terre.
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C'est un roman violent, complètement fou, et d'une beauté ensorcelante. L'histoire commence par la fin, ça se passe en Rhodésie du Sud pendant les guerres d'indépendance, mais le récit se place au-delà de l'Histoire, du bien et du mal, et il chemine entre les vivants et les morts. Il prend racine dans les contes et sortilèges de cette région d'Afrique, et célèbre la splendeur de la Nature martyrisée par des hommes totalement irrationnels.
C'est un livre qui ne s'ouvre pas facilement, mais qui nous emporte dans sa magie sans qu'il soit possible d'y résister, tant il est sidérant de beauté, d'étrangeté, de virtuosité. Attention à bien s'accrocher avant de le lire !
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C'est une histoire qui commence par la fin alors que la mort a rattrapé le sergent Gordon. Un homme qui s'éteint alors que meurt également la Rhodésie et que nait la nouvelle nation zimbabwéenne.
C'est surtout le récit d'une vie, raconté à travers quelques étapes clés, comme douze portes donnant sur le destin de Gordon: le travail forcé dans les mines de cuivre, son adolescence dans une institution pour garçons difficiles, son enfance auprès d'un père méfiant et d'une mère silencieuse, jusqu'à sa naissance chaotique. Douze chapitres de vie qui nous font remonter progressivement ce parcours initiatique jusqu'au secret de ses origines.

Qu'est-ce qu'il est difficile de parler de ce roman, qui l'on peut sans peine décrire comme exigeant:

Exigeant par sa forme: le récit étant à rebours, chaque nouveau chapitre éclaire le précédant d'un jour nouveau et apporte certaines réponses. Une confusion pas toujours facile à appréhender et une fois le roman terminé, on a presque envie de tout reprendre depuis le début pour enfin mieux comprendre le parcours du sergent Gordon. Une construction stylisée donc mais qui exige pas mal d'efforts de la part du lecteur.

Exigeant par son contenu également: si l'histoire de la Rhodésie défile en filigrane, il n'est pas nécessaire d'être un as de ce pays pour suivre le destin de Gordon. Cependant, il faut accepter de plonger dans un univers fait de légendes, de fantômes et de devins. Dans ce sens, Les Douze Portes dans la maison du sergent Gordon est un récit très proche du conte africain, et j'avoue que malgré les origines en partie xhosas de l'auteur, je ne m'attendais pas à ce que cet aspect soit aussi présent.

Ces deux exigences surmontées, le lecteur découvre une belle réflexion sur les origines et sur le destin des hommes, sur les valeurs et l'importance des traditions. C'est perturbant, pas toujours facile à suivre, pas toujours palpitant non plus, mais George Makana Clark signe ici à mon avis un roman à part et dont on ressort un peu hébété.

Je n'ai qu'un mot: déroutant!
Lien : http://unmomentpourlire.blog..
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Ce premier roman George Makana Clark à la croisée des genres est construit à rebours et tout en circonvolutions telle la maison du sergent Gordon qui nous ramène au point de départ une fois franchies ses 12 portes. Tour à tour, le livre sera une fresque historique , une saga familiale et un conte africain et l'ensemble est empreint d'un réalisme magique faisant souvent penser à Garcia Marquez. Dans ce sens, on retrouve de multiples motifs récurrents (le nombre 12, le léopard, des noms à travers plusieurs générations,…) et des personnages dont les images s'impriment dans notre cerveau à jamais ( faux devin aux vers solitaires, perroquets malpolis, officier jouant au golf sur un terrain brûlé au napalm,…).
A travers l'histoire narrée par le fantôme-conteur du sergent Gordon, africain blanc de peau au huitième de sang xhosa (ethnie d'Afrique du Sud) vivant au Zimbabwe (ex-Rhodésie), le lecteur suit son destin de sa mort à sa naissance à travers 12 épisodes qui pourraient quasiment se lire de façon autonome.
Un superbe premier roman dont la construction et la magie m'ont emporté plus j'avançais dans sa narration. Une belle surprise.
Lu en tant que juré du prix du Livre de Poche 2018.
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Etrange et très déroutant à mon goût !
Le sergent Gordon est blanc comme son écossais de père mais descend, par une grand-mère paternelle de l'ethnie Shona (majoritaire au Zimbabwe, anciennement Rhodésie). Il a hérité de ses ancêtres africains la capacité de lire l'avenir et de voir le passé dans le sang. C'est son histoire qui nous est contée, par qui ? Je l'ignore, peut-être son fantôme-conteur.
La violence est terrible (guérilla marxiste assassinant des religieuses, répression rhodésienne féroce), les vaincus sont réduits en esclavage (terrible description du calvaire de la mine de cuivre), les préparations culinaires sont exotiques, la folie n'est jamais loin et la magie toujours présente.
On découvre l'histoire du sergent Gordon de sa mort à sa naissance ce qui implique beaucoup d'interrogations, en particulier sur l'identité de celui qui parle. Une seconde lecture semble nécessaire pour tenter de retrouver le fil de ce récit.
Complexe et trop irrationnel pour ma culture cartésienne, ce roman est une curiosité qui pourrait symboliser l'état du pays dans lequel il est situé : passé sanglant et dictatorial, présent misérable et avenir compromis.
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George Makana Clark ouvre son récit sur la mort de Gordon. Très vite on retrouve Gordon dans une mine, sous la terre, suant, étouffant, côtoyant la mort, la folie et la violence inimaginable et indicible. Nous sommes en 1978. Au terme de quelques années, une fois sorti de l'enfer, l'homme découvre ce qu'est devenu son pays. A cet instant, le récit va faire une marche arrière, puis encore une autre afin de découvrir Gordon, son amoureuse, ses parents, leurs vies dans ce pays qu'était la Rhodésie. Hiérarchie entre blancs, noirs et métis. Violence de ceux qui se réclament de l'Eglise. Traditions et croyances africaines, chants. Une marche arrière qui va nous mener à la naissance de Gordon.

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Mon avis : la compréhension de ce récit a été difficile en raison de sa construction particulière. On peut trouver dans certains romans un fait Z et pour nous en faire comprendre le sens, l'auteur reprend la genèse en partant du tout début à savoir le point A pour nous mener au point Y. La boucle est bouclée. Or là, le récit relate le fait Z, puis le fait Y, puis le fait X, remontant aux origines avec le A. le souci est que l'on découvre un fait et des personnages, puis le chapitre suivant on découvre d'autres personnages ou d'autres faits sans vraiment réussir à faire le lien avec l'histoire contée précédemment ; le déroulement temporel est si confus que l'on a bien du mal à suivre. On découvre de nouveaux faits et de nouveaux personnages qui s'ils nous donnent une petite explication à ce qui a été décrit précédemment ajoutent dans le même temps des mystères supplémentaires rendant difficile la compréhension de ce qui s'est déroulé et de ce qui se passe.
J'ajouterai qu'il existe une violence certaine au début du roman mais fort heureusement l'écriture nous mène vers un plus de douceur à la fin.



Je remercie les Editions Anne Carrère et Babelio pour ce roman eu lors de la dernière masse critique.
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Extrait de chronique :
" Dans ce récit à l'envers, l'on ne cherche pas à savoir ce qui va advenir, mais plutôt à deviner ce qui a été. Pourtant, au-delà du point d'interrogation que dessine l'inévitable secret de la genèse, l'on se questionne surtout sur le pourquoi et le comment. Y a-t-il un sens dans cette chronologie inversée, y a-t-il un lien, un fil ? Tandis que le conteur remonte le temps vers les origines, le lecteur ne peut s'empêcher faire des allers-retours, de rebrousser chemin vers le présent, cherchant à valider les indices, tendant l'oreille vers les échos et guettant les réminiscences." (...)
Lien : https://lesfeuillesvolantes...
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