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Critique de mumuboc


Comme je vous l'avais annoncé dans la chronique concernant la lecture de Mort à Crédit le cas de Louis-Ferdinand Céline m'intéresse et j'ai trouvé intéressant de le découvrir dans ce très bel ouvrage illustré dans lequel Christophe Malavoy prend l'esprit et la plume de Céline pour raconter ses années noires (pour lui), celles de la fin de la seconde guerre mondiale, quand le vent a tourné, que les comptes allaient se régler et qu'il a senti que cela risquait de lui chauffer aux fesses si ce n'est à sa vie. Dans un premier temps direction l'Allemagne puis le Danemark car la patate chaude personne n'en voulait et puis il faut des visas, de l'argent, un logement, une cachette. le voilà donc errant de logements en incarcération jusqu'à une maison sur les bords de la Baltique, une maison isolée où avec Lucette et Bébert (le chat) sans compter tous les autres animaux que le couple recueille, ils vont préparer et attendre le procès par contumace (trop malade dit-il pour se déplacer) qui va se dérouler en France et qui va décider de son sort.

Incipit :

"Une idée !... Ils me donneraient moi un prix Nobel ?... Ça m'aiderait drôlement pour le gaz, les contributions, les carottes !... mais ces enculés de là-haut vont pas me le donner !... y en a que pour tous les vaselinés de la planète !... Les Mauriac et Cie... (p9)"

Christophe Malavoy en endossant de façon très réussie le style de Céline donne à cet ouvrage un ton très particulier et une forme originale. Céline par lui-même ! Et on sent qu'il se régale le bougre, lui qui tente de se faire le plus discret possible pendant cette période d'épuration, de traque, en lui donnant ainsi la parole Christophe Malavoy le laisse se justifier et comme il le fait dans Mort à Crédit, il se lamente, se donne le beau rôle et ne peut s'empêcher d'injurier, de se plaindre de tous ses maux, d'être une victime. le monde n'a rien compris à ses écrits, à sa façon de penser, à ce qu'il était un défenseur de la paix sans oublier de porter un jugement sur les écrivains "amis" ou "ennemis" (Marcel Aymé, Jean-Paul Sartre etc...), de déflorer leurs propres attitudes pendant la guerre (dénonciateur toujours) ou de leurs comportements vis-à-vis de lui. Tout l'agace, tout l'horripile, tel un Harpagon il compte et cache son or partout ou le confie à  plusieurs personnes sûres (mais plusieurs car toujours méfiant) car il sait combien l'exil coûte cher même s'il bénéficie de relations bienveillantes ou de combines..

Je dois vous avouer que je me suis laissée parfois attendrir (il fait pitié) par ce pauvre Ferdinand Destouches (de son vrai nom d'état civil) si souffreteux suite à ses blessures de la première guerre mondiale, de cet homme qui se montre si dévasté par le manque d'incompréhension et de justice qui ne lui sont pas rendus. Mais comment oublier l'homme aux propos antisémites (dont il se défend d'ailleurs et faites lui confiance pour avoir des arguments). Mais c'est un malin et il se défend, il argumente, il prouve même de toute sa bonne fois et j'ai retrouvé la verve de l'écriture si particulière que j'avais découverte dans Mort à Crédit.

Mais il me faut parler des illustrations de José Correa qui parsèment le récit qui sont de toutes beautés, que ce soient les portraits de l'écrivain ou des personnes (avocats, écrivains, acteur(rice)s etc...) dont LFC parlent sans compter ou celles illustrant les propos tenus et ses "galères" sans oublier certains de ses écrits.

C'est un homme à la fois inquiet, malade qui n'hésite pas à se comparer à d'autres grands exilés tels Victor Hugo et qui pense qu'un jour justice lui sera rendue et qui ne doute pas que les maisons d'éditions s'arracheront ses écrits (il en a caché certains et détruits d'autres avant de fuir) :

"Mais qui voudrait encore m'éditer ? ... Il y avait bien des malins qui venaient, reniflaient ma prochaine production.... j'intéressais encore, le nouveau Céline ça pouvait rapporter gros, je n'étais pas encore mort.. (p175)"

C'est un ouvrage documenté et illustré qui ravira tous les curieux mais également les admirateur(rice)s de l'écrivain (j'ai pas dit de l'homme), de l'homme de lettres avec son écriture reconnaissable inimitable et pourtant ici si bien imitée ici, réussissant à le rendre présent, dialoguant parfois avec le lecteur ou le prenant à témoin, tel que l'on peut l'imaginer, avec sa gouaille, sa misanthropie au bord parfois de la folie, ne trouvant grâce qu'en lui, qu'en sa danseuse, son chat et ceux qui le défendent. Humaniste il se dit..... Qui était-il vraiment ? Qu'en penser ?

J'ai beaucoup aimé et je le recommande vivement à ceux qui ne veulent pas lire ses romans de par sa réputation mais qui veulent découvrir son écriture et sa vie car à travers ce récit il évoque non seulement cette période d'incertitudes mais également son enfance et quelques épisodes de son existence.

Même s'il me répugne à le dire, cet homme m'intrigue et la prochaine fois je ferai le voyage au bout de la nuit en sa compagnie..... Ca promet !
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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