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Yves Bonnefoy (Préfacier, etc.)Bertrand Marchal (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070387618
688 pages
Gallimard (24/01/1995)
4.06/5   9 notes
Résumé :
"Les lettres de Mallarmé sont d'un intérêt souvent extraordinaire. Il a livré sur son exploration des confins de l'esprit et de la matière, et sur la poésie comme il la conçoit, et sur les poèmes qu'il tente d'écrire alors - dont deux de ses plus grands, "Hérodiade" et le "Faune" - des informations que rien de son oeuvre proprement dite ne peut remplacer ni même laisser prévoir. Et non seulement il formule ainsi une pensée qui est neuve autant que profonde, mais il ... >Voir plus
Que lire après Correspondance complète (1862-1871) - Lettres sur la poésie (1872-1898)Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Cette correspondance est censée réunir les lettres écrites par Mallarmé au sujet de la poésie. J'imagine qu'elles y sont toutes et d'autres aussi. Yves Bonnefoy justifie tout ça dans la préface, je crois. La plupart ont été écrites avant et pendant la crise qu'il a connu à la fin des années 1860.
Et c'est formidable de lire le jeune poète gouailleur avec ses amis, lyrique dans ses lettres d'amour à la future madame Mallarmé ou pathétique quand ils se séparent momentanément avant de se marier. Malgré sa soi-disant défiance du lyrisme, il reste encore très romantique à cette époque.
Mais la partie la plus intéressante de cette correspondance est celle des années 1866-1867, où il se montre assez prolixe sur sa crise et sur sa poésie. Période où il écrivait Hérodiade, qu'il ne finira jamais comme il ne finira plus jamais grand-chose. On assiste à une véritable transformation, même dans sa correspondance. Bien sûr, tout est déjà en germe dans les premières années : ses sentiments parfois ambigus, sa tendance à s'exiler dans le rêve, son perfectionnisme, sa lucidité. Mais, paradoxalement, l'énorme remise en question qu'il subit va aboutir à une radicalisation de sa manière d'être et de sa poésie : « je suis maintenant impersonnel, et non plus Stéphane que tu as connu, mais une aptitude qu'a l'Univers Spirituel à se voir et à se développer, à travers ce qui fut moi. »
Ce sont, à peu de choses près, les dernières paroles de Stéphane. Après il devient le bon Mallarmé, le légendaire, l'acteur, l'affable, le spirituel, celui qui demande - ou tend ? - lapidairement et chaleureusement « la main », celui qui ne parlera plus qu'indirectement de sa poésie. Et pour cause, il n'en publiera presque plus jusqu'à sa mort, ne fera qu'écrire et réécrire inlassablement son Oeuvre : le Livre ; parsemant dans quelques revues, des morceaux de proses, ses merveilleuses arabesques syntaxiques.
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pour une partie : Je me suis replongée dans les lettres sur la poésie de Mallarmé, auquel je pense assez souvent en marchant dans Avignon, souvenir des années qu'il y a passées, entre ses ennuis de professeur mal jugé, les maladies de la famille et la suite de la crise le menant, par la reprise d'Hérodiade et le Faune, à Igitur

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critiques presse (1)
Liberation
27 mars 2019
Rien de plus sciemment étanches que la poésie de Mallarmé et sa vie. Et c’est passionnant de découvrir, sur la durée, comment il a très tôt établi son programme, s’est organisé pour le remplir [...] Si son œuvre intimide, nul mieux que lui en parle.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
À Eugène Lefébure

Samedi [18 février 1865[1]]
et jours suivants.

Mon bon ami,
J'ai beaucoup pensé à vous ces derniers jours, au lit, où me retenait une vilaine toux compliquée d'un ennui vulgaire et sale. J'allais presque vous écrire quand j'ai reçu votre lettre. Je commence par y répondre, afin de causer un peu, et de vous dire enfin comme j'ai goûté vos vers.

Comment vous avez eu une telle tristesse ? Votre femme avait-elle été imprudente, s'était-elle fatiguée ? Un geste violent, un mouvement mal mené suffisent parfois à occasionner de tels malheurs. Enfin, je vois que vous n'êtes plus tourmenté, et que votre chère malade peut voyager de son lit à votre fauteuil, je me rassure. Mais, cependant, agissez sagement afin d'éviter les suites...

Ici, à part moi, tout le monde va bien. Ma Marie est toujours faible cependant, et, avec la dureté allemande de sa tête, n'a pas consenti à garder le lit assez longtemps après la naissance de Geneviève, ce dont elle se ressent par minutes. Ma fille est un merveilleux poupon qui fait les délices des commères du voisinage. Elle est fort intelligente et déclare, à grands cris, qu'elle ne lira décidément par les deux Reines de Monsieur Legouvé[2].

― Les Élévations[3] me semblent détestables : la pensée, lâche, se distend en lieux communs, et, quant à la forme, je vois des mots, des mots, mis souvent au hasard, sinistre s'y pouvant remplacer par lugubre, et lugubre par tragique, sans que le sens du vers change. On ne ressent à cette lecture aucune sensation neuve. Le rythme est très-habilement manié, voilà ce qui rachète tant de grisaille, et de bavardage, ― et encore ?

Vous me direz que je maltraite un ami ? Non, des Essarts est un des rares êtres que j'aime beaucoup, seulement, par un très grand malheur, je ne puis souffrir sa poésie qui dément tout ce que je pense de cet Art.

Pour vous remettre de ces pages écœurantes, je vous envoie un drame en prose pour lequel le théâtre serait trop banal, mais qui vous apparaîtra dans toute sa divine beauté, si vous le lisez sous la clarté solitaire de votre lampe, Elën[4], par mon ami Villiers de l'Isle-Adam.

La conception est aussi grandiose que l'eût rêvée Goethe ; c'est l'histoire éternelle de l'Homme et de la Femme. Les personnages y sont incomparables, depuis Samuel Wissler, ce grand philosophe qui se donne la peine d'avoir du génie quand il parle, et n'est pas le grand homme de parade qu'on a inventé pour les drames, jusqu'à cette fatale Elën ; et Tanuccio, perfide comme la lune Italienne, et Madame de Walburg « l'obscure fierté de ses regards ne laisse jamais transparaître la fête lugubre de son cœur » ― phrase étonnante ! et cet amant humain, Andréas de Rosenthal !

Vous y trouverez des scènes inouïes ; je n'en sais pas de plus belle que celle de ce souvenir des heures d'amour approfondi par l'opium bu par mégarde, la seconde de l'acte troisième. Et quant aux dernières heures elles égalent la scène du cimetière d'Hamlet.

Je ne dis rien du style. Vous ressentirez une sensation à chacun des mots, comme en lisant Baudelaire. Il n'y a pas là une syllabe qui n'ait été pesée pendant une nuit de rêverie. Depuis trois ans, du reste, Villiers préparait cette œuvre.

En un mot, la pensée, le sentiment de l'Art, les désirs voluptueux de l'esprit (même le plus blasé) ont là une fête magnifique. Dégustez goutte à goutte ce précieux flacon.

J'attends avec une vraie impatience votre appréciation.

― Merci du détail que vous me donnez [5], au sujet d'Hérodiade, mais je ne m'en sers pas. La plus belle page de mon œuvre sera celle qui contiendra que ce nom divin Hérodiade[6]. Le peu d'inspiration que j'ai eu, je le dois à ce nom, et je crois que si mon héroïne s'était appelée Salomé, j'eusse inventé ce mot sombre, et rouge comme une grenade ouverte[7], Hérodiade. Du reste, je tiens à en faire un être purement rêvé et absolument indépendant de l'histoire. Vous me comprenez. Je n'invoque même pas tous les tableaux des élèves de Vinci et de tous les florentins qui ont eu cette maîtresse et l'ont appelée comme moi.

Mais ferai-je jamais ma tragédie, mon triste cerveau est incapable de toute application, et ressemble aux ruisseaux balayés par les portières. Je suis un lâche, ou peut-être un malheureux abruti et éteint, qui retrouve parfois une lueur, mais ne sait resplendir pendant huit cents vers[8].

― Merci encore pour vos articles de Taine. Je ne les ai pas lus. Ce que je reproche à Taine, c'est de prétendre qu'un artiste n'est que l'homme porté à sa suprême puissance, tandis que je crois, moi, qu'on peut parfaitement avoir un tempérament humain très distinct du tempérament littéraire. Cela me fait porter sur lui un jugement contraire au vôtre : je trouve que Taine ne voit que l'impression comme source des œuvres d'art, et pas assez la réflexion[9]. Devant le papier, l'artiste se fait[10]. Il ne croit pas par exemple qu'un écrivain puisse entièrement changer sa manière, ce qui est faux, je l'ai observé sur moi. Enfant, au collège, je faisais des narrations de vingt pages, et j'étais renommé pour ne savoir pas m'arrêter. Or, depuis, n'ai-je pas au contraire exagéré plutôt l'amour de la condensation ? J'avais une prolixité violente et une enthousiaste diffusion, écrivant tout du premier jet, bien entendu, et croyant à l'effusion, en style. Qu'y a-t-il de plus différent que l'écolier d'alors, vrai et primesautier, avec le littérateur d'à présent, qui a horreur d'une chose dire sans être arrangée ?

― Mais, parlons de vous.

Quelles chères heures j'ai passées hier vos vers en main, respirant ce parfum léger de rose un peu fanée qu'ils émanent, sentant en moi le frisson des peupliers jaunes, et, par instants, ces atroces blessures qui ressemblent aux soudaines épées cassées que l'on q dans l'épine dorsale, et qui disparaissent avant que la rage soit montée aux yeux. Par exemple ce dernier vers, de cette pièce inouïe « A ma fenêtre »


Le désir irrité se tord comme un serpent.

Cet autre :


Ô mon Dieu ! la Mort m'entre au flanc....

Vous les connaissez.

Mes poèmes chéris sont, avant tous : Les Paradis, AU BORD DE LA MER, Ciel d'Hiver, L'AVENUE, « On célébrait des morts la messe révéréé.. », Les Marbres, Un Soir, A MA FENÊTRE, LA NOCE DES SERPENTS, KIEF, VERE RUBENTE, LE RETOUR DE L'ENNEMI, Le Pingouin[11], « LE SOLEIL DISPARAÎT DANS SON ROUGE BRASIER », l'Adieu[12].

Dieu, que vous êtes mon frère ! Je crois que vous ressentirez une singulière sympathie pour Villiers ; lui, Mendès et vous, parmi les jeunes poètes, composez ma famille spirituelle.

― Maintenant un reproche. L'Amour est trop le but de vos poèmes, et ce mot, très incolore, revient souvent d'une façon un peu affadissante. S'il n'est pas relevé par un condiment étrange, la lubricité, l'extase, la maladie, l'ascétisme, ce sentiment, indéfini, ne me semble pas poétique. Pour moi, je ne pourrais prononcer ce mot qu'en souriant, dans le vers. Peut-être est-ce une expression usée ? Non, je crois que voici pourquoi : l'amour, simple, est un sentiment trop naturel pour pouvoir procurer une sensation aux poètes blasés qui lisent les vers ; et leur en parler est comme si vous vouliez faire goûter l'eau profonde et fraîche d'une source aux palais, enflammés par l'eau de vie et qu'une allumette incendierait, d'ivrognes anciens.

Je suis bien cruel, mon bon ami, de vous dire cela près de votre « petit ange chinois[13] » qui m'arracherait bel et bien les yeux de ses ongles peints, s'il me lisait ― mais ne m'en veuillez pas ; ce qui m'a surtout indisposé contre ce mot que je ne dis et n'écris qu'avec une certaine impression désagréable, c'est la sottise avec laquelle cinq ou six farceurs, et des Essarts a été du nombre, se sont institués les prêtres de ce gros garçon, rouge et joufflu comme un fils de boucher, qu'ils appellent Éros, se regardant avec l'extase du martyre chaque fois qu'ils accomplissaient ses rites faciles, et montant sur les femmes qu'ils avaient séduites comme sur des bûchers ! En un mot, disant que tout est là, tandis qu'en vérité l'Amour n'est qu'un des mille sentiments qui assiègent notre âme, et ne doit pas tenir plus de place que la peur, le remords, l'ennui, la haine, la tristesse.

― Mais j'aurais bien mieux fait de consacrer tout ce papier à l'analyse de la rare sensation que me donnent vos vers que je crois avoir faits, tant ils me ressemblent.

Adieu, mon bon ami ― tâchez de venir pour m'éviter le travail navrant d'aussi longues lettres, car j'ai toujours tant à vous dire ! Soignez bien, en attendant, celle qui me déchirerait de ses griffes carminées, et nous espérons que votre première missive sera toute souriante de bonnes nouvelles. Ma femme lui presse les mains de tout son cœur et Geneviève lui sourit, tout ce qu'elle sait faire. Pour moi vous savez si et comme je vous aime.

Votre
STÉPHANE MALLARMÉ
― Faites-vous toujours de l'Anglais ? ― Je croyais lord Chesterfield[14] un parfait gentleman seulement, mais creux comme un Massillon[15] épistolaire. ― Je vous renverrai vos vers, empaquetés, avec Taine, quand j'aurai copié les uns et lu l'autre ― Je vous adresse, en attendant, le Voyage aux Pyrénées[16], très vivant, Arnim[17] que j'aime, et Schlemyl[18] que je n'aime pas, à part l'ombre roulée... ―

Ne m'oubliez pas auprès de votre pauvre grand-mère.


La lettre de Lefébure est datée du 16 février.
Cf. la lettre à Aubanel du 27 novembre 1864. Les Deux Reines de France, drame en quatre actes, venait de paraître.
Recueil de des Essarts.
Paru le 14 janvier.
« J'ai en ce moment sous la main une tragédie latine d'Hérodiade, contemporaine de Shakespeare et composée par un anglais (Buchanan) pour le collège de Bordeaux [...]. Je ne sais si vous avez lu la Bible de l'humanité de Michelet : peut-être cela pourrait-il vous servir pour Hérodiade si, votre plan s'élargissant, vous laissiez entrevoir par quelque
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À Eugène Lefébure

Besançon, Lundi 27 Mai 1867

Comment allez-vous ? Mélancolique cigogne des lacs, immobiles, votre âme ne se voit-elle pas apparaître, en leur miroir, avec trop d'ennui — qui, troublant de son confus crépuscule, le charme magique et pur, vous rappelle que c'est votre corps qui, sur une patte, l'autre repliée malade en vos plumes, se tient, abandonnée ? Revenu au sentiment de la réalité, écoutez la voix gutturale et amie d'un autre vieux plumage, héron et corbeau à la fois, qui s'abat près de vous. Pourvu que tout ce tableau ne disparaisse pas, pour vous, dans les frissons et les rides atroces de la souffrance ! Avant de nous laisser aller à notre murmure, vraie causerie d'oiseaux pareils aux roseaux, et mêlés à leur vague stupeur lorsque nous revenons de notre fixité sur l'étang du rêve à la vie — sur l'étang du rêve, où nous ne pêchons jamais que notre propre image, sans songer aux écailles d'argent des poissons ! — demandons-nous cependant comment nous y sommes, dans cette vie ! Je réitère donc ma première question, frère : « Comment êtes-vous ? Et de combien s'est avancée cette guérison ? »

Je vous enverrai demain deux divins volumes de nouvelles de Madame Valmore : « Huit Femmes. » Des femmes comme elle !

Le « Parnassiculet » — affreux mot ! — est épuisé, mais je saurai l'extraire, ainsi que le « Nain Jaune » (et vous les envoyer) de l'effroi de des Essarts, qui doit en receler des amas mystérieux, dérobés par lui à la postérité. Quant à mes lignes au crayon, elles sont bien faibles — mais ma pensée est si nue encore et si horriblement sensible — que j'ai peur d'y toucher. Mon cœur est près de vous, ce qu'il en reste ! — et c'est si peu, que j'aime mieux vous le laisser en dépôt que de l'employer, ayant peur de l'user : c'est donc mon bon vieux corps de chat qui se caresse à votre fauteuil, espérant tirer de lui quelques étincelles. — Vous me comprenez assez, ami, pour ne pas m'en demander davantage.

Je n'ai rien recueilli non plus, digne de vous être redit, dans la revue que je fais le Lundi des journaux et magazines — si ce n'est dans la Revue des deux mondes du 15 Mai un article de Montégut dans les belles quatre ou cinq premières pages duquel j'ai senti et vu avec émotion mon livre. Il parle du Poëte moderne, du dernier, qui, au fond, « est un critique avant tout ». C'est bien ce que j'observe sur moi — je n'ai créé mon Œuvre que par élimination, et toute vérité acquise ne naissait que de la perte d'une impression qui, ayant étincelé, s'était consumée et me permettait, grâce à ses ténèbres dégagées, d'avancer plus profondément dans la sensation des Ténèbres Absolues. La Destruction fut ma Béatrice.

Et si je parle ainsi de moi, c'est qu'Hier j'ai fini la première ébauche de l'Œuvre, parfaitement délimité, et impérissable si je ne péris pas. Je l'ai contemplé, sans extase comme sans épouvante, et, fermant les yeux, j'ai trouvé que cela était. La Vénus de Milo — que je me plais à attribuer à Phidias, tant le nom de ce grand artiste est devenu générique pour moi ; La Joconde du Vinci ; me semblent, et sont, les deux grandes scintillations de la Beauté sur cette terre et cet Œuvre, tel qui l'est rêvé [sic], la troisième. La Beauté complète et inconsciente, unique et immuable, ou la Vénus de Phidias, la Beauté, ayant été mordue au cœur depuis le Christianisme, par la Chimère, et douloureusement renaissant avec un sourire rempli de mystère, mais de mystère forcé et qu'elle sent être la condition de son être. La Beauté, enfin, ayant par la science de l'homme, retrouvé dans l'Univers entier ses phases corrélatives, ayant eu le suprême mot d'elle, s'étant rappelé l'horreur secrète qui la forçait à sourire du temps de Vinci, et à sourire mystérieusement — souriant mystérieusement maintenant, mais de bonheur et avec la quiétude éternelle de la Vénus de Milo retrouvée — ayant su l'idée du mystère dont la Joconde ne savait que la sensation fatale.

— Mais je ne m'enorgueillis pas, mon ami, de ce résultat, et m'attriste plutôt. Car tout cela n'a pas été trouvé par le développement normal de mes facultés, mais par la voie pécheresse et hâtive, satanique et facile de la Destruction de moi, produisant non la force, mais une sensibilité, qui, fatalement, m'a conduit là. Je n'ai, personnellement, aucun mérite ; et c'est même pour éviter ce remords (d'avoir désobéi à la lenteur des lois naturelles) que j'aime à me réfugier dans l'impersonnalité — qui me semble une consécration. Toutefois, en me sondant, voici ce que je crois. « Je ne pense pas que mon cerveau s'éteigne avant l'accomplissement de l'Œuvre, car, ayant eu la force de concevoir, et ayant celle de recevoir maintenant la conception, (de la comprendre), il est probable qu'il a celle de la réaliser. Mais c'est mon corps qui est totalement épuisé. Après quelques jours de tension spirituelle dans un appartement, je me congèle et me mire dans le diamant de cette glace, — jusqu'à une agonie : puis, quand je veux me revivifier au soleil de la terre, il me fond — il me montre la profonde désagrégation de mon être physique, et je sens mon épuisement complet. Je crois, cependant encore, me soutenant par la volonté, que si j'ai toutes les circonstances (et jusqu'ici je n'en ai aucune) pour moi — c. à d. si elles n'existent plus, je finirai mon œuvre. Il faut, avant tout, par une vie exceptionnelle de soins, empêcher la débâcle ― qui commencera par la poitrine, infailliblement. Et jusqu'ici le Lycée et l'absence du soleil ― (il me faudrait une chaleur continuelle), la minent. J'ai parfois envie d'aller mendier en Afrique ! L'Œuvre fini, peu m'importe de mourir ; au contraire, j'aurai besoin de tant de repos ! ― Mais je cesse car ma lettre commence, mon âme épuisée, à tourner en doléances charnelles ou sociales, ce qui est nauséabond. A Vendredi. Je vous aime,

Votre
STÉPHANE

— J'oubliais de vous dire que ce qui m'avait causé cette émotion dans l'article de Montégut, était le nom de Phidias au début, et une invocation au Vinci ― ces deux aïeux réunis de mon œuvre, avant de parler du Poëte moderne ! —


[Au crayon, sur d'autres feuillets :]


Comme, même à travers tous les obstacles, Circonstances et Bêtise, — circonstances, bêtise de la Vie, — l'Idée jaillit toujours avec son mot juste et fatal : la femme, ignoble, et vulgaire, trouve le summum de sa préoccupation dans ce qui l'abjection de l'état féminin, passif et malade, destruction passive comme activement elle l'est pour nous, ses règles — qu'elle appelle « affaires » ― comme l'homme, si noble quand il n'est qu'un exemplaire pur de la Vie, et si imbécile quand il la développe dans ses nécessités sociales ― trouve le summum de sa préoccupation en ces nécessités qu'il dénomine [sic] également « affaires ». Et l'un et l'autre s'affirment par ces misères, (qui seraient des grandeurs si elles étaient parvenues à leurs Beauté, — quand la Femme, devenue au lieu de Maladie la Destruction est courtisane, ou l'homme, devenu au lieu d'un cerveau un Esprit ―) ils s'affirment, les superbes, dis-je, par ces misères, et répondent avec cet air de Mystère ― qui n'a pu s'effacer même en ces tristesses, tant c'est la marque indélébile de Beauté ― même de la Beauté de la Bêtise — « J'ai mes affaires. » Signifiant tous deux deux choses si différentes d'aspect menteur, mais identiques au fond. Si je faisais une cantate, cela entrerait dans le Chœur, et se diviserait en strophes masculines, et féminines.

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Puisque nous en sommes à ces hauteurs, continuons à les explorer, puis nous aspirerons à en descendre : voici ce que j'ai entendu dire ce matin à ma voisine ― désignant du doigt la croisée qui fait vis-à-vis de l'autre côté de la rue : « Tiens, Madame Renaudet a mangé des asperges, hier » ― « À quoi vois-tu cela ? » — A son pot, qu'elle a mis hors de la fenêtre. » ― Cela n'est-il pas toute la province, ― sa curiosité, ses préoccupations, et cette science de voir des indices dans les choses les plus nulles ― et lesquelles grand Dieu ! Dire que les hommes, en vivant les uns sur les autres, en sont arrivés là ! ― Je ne demande pas la vie sauvage, parce que nous serions obligés de faire nos chaussures et notre pain, et que la société nous permet de confier ces soins à des esclaves que nous salarions, mais je m'enivre de la solitude exceptionnelle, et, à moins d'être deux frères comme nous, ou des cousins comme Catulle, Villiers, ou des pères, comme nos maîtres dont nous somme bien les fils, — je rejetterai toujours toute compagnie, pour promener mon symbole partout où je vais, et, dans une chambre pleine de beaux meubles comme dans la nature, me sentir un diamant qui réfléchit, mais n'est pas par lui-même ― ce à quoi on est toujours obligé de revenir quand on accueille les hommes, ne serait-ce que pour se mettre sur sa défensive.

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Toute naissance est une destruction, et toute vie d'un moment, l'agonie dans laquelle on ressuscite ce qu'on a perdu, pour le voir. ― On l'ignorait avant.

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Je n'admets qu'une sorte de femmes grasses : certaines courtisanes blondes, au soleil, dans une robe noire principalement, ― qui semblent reluire de toute la vie qu'elles ont prise à l'homme, donnent bien l'impression qu'elles se sont engraissées de notre sang, et, ainsi, sont dans leur vrai jour, une heureuse et calme Destruction : ― de belles personnifications. Autrement, il faut que la femme soit maigre et mince comme un serpent libertin, dans ses toilettes.

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À Frédéric Mistral

Dimanche, 31 Décembre 1865

Mon cher Mistral,
Voici une triste année pour moi, puisque je ne vous ai pas vu. Il en est toujours ainsi : vous ayant connu, et sachant que vous habitez un des diamants de la voie lactée, j'inventerais des ailes insensées pour vous y rejoindre : quarante lieues nous séparent, et je ne trouve pas le moyen de vous presser la main. Laissez-moi vous promettre, j'aime les vœux qui me lient, en commençant cette nouvelle année, que nous nous rencontrerons, n'importe comment, n'importe où. Cette heure sera divine pour moi, car, alors, j'aurai lu votre poème splendide, (dont l'attente me désespère,) et, de mon côté, je vous offrirai sans doute un des premiers exemplaires de l'Hérodiade, œuvre de mes nuits ravies.

Vous aviez raison, le spleen m'a presque déserté, et ma poésie s'est élevée sur ses débris, enrichie de ses teintes cruelles et solitaires, mais lumineuse. L'Impuissance est vaincue, et mon âme se meut avec liberté. Merci de votre amicale prophétie, d'elle est née, sans doute, cette résurrection.

J'ai, de plus, des heures terrestres qui sont charmantes, près de ma jolie Geneviève qui marche seule, dans une maison penchée sur ce Rhône bien-aimé dont vous me recommandiez il y a un an l'influence.

Mais qu'un jour il me mène encore à Avignon, et je n'y serai pas longtemps sans aller à Maïanes [sic] vous remercier de la sympathie inconnue qui nous mêle, ce bon fleuve et moi. En effet, je ne fais plus un poème sans qu'il y coule une rêverie aquatique.

J'oublie, cependant, le sujet de ma lettre, qui est de vous dire mes vœux de belle et heureuse année. Je ne les détaille pas, vous avez un cœur qui supplée à l'absence des paroles ! Recevez-les donc.

d'un de vos meilleurs amis,

STÉPHANE MALLARMÉ

à Tournon.
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À Catulle Mendès.

Tournon, Mardi matin
(24 avril 1866).

Mon cher Catulle,

Vous avez maintenant mon treizain de Poèmes[1], et vous me pardonnez mon retard, n'est-ce-pas ? Ce serait mal à vous de ne pas le faire, car toutes ces veillées de la semaine, et les nuits des deux derniers jours ont été consacrées à rendre ces vers présentables. Vous savez combien je tiens à la justesse de l'impression, et que, par conséquent, le changement d'un mot entraîne un remaniement. Or ne me fallait-il pas un jour par poème ? J'ai mis moins que cela. Songez donc ! pour évoquer les étés, les automnes, les minutes, et pour rester dans la manière de ces époques, en ne faisant que corriger ce qui, alors, comme maintenant, eût été fautif. D'autant plus que ces vers ayant surtout pour moi la valeur de souvenirs[2], je tenais à ce que tous gardassent leur dates.

J'ai quelques prières à vous faire. 1. De me dire s'il y aurait quelqu'une des corrections que vous n'aimiez pas, ― après avoir longtemps examiné sa signification, car il faut vous défier de la sensation désagréable qu'on éprouve à voir de nouveaux mots à la place de ceux que la mémoire finissait d'avance. J'y ai moi-même été pris parfois. Toutes les substitutions ont eu leur but, relatif généralement à la composition, et je n'ai pas hésité à sacrifier des vers qui me semblaient d'une jolie peinture. ― Mais quand on est seul, sans conseil ni ami, sans épreuve, on peut se tromper ! Du reste, ces quelques sacrifices seraient rachetés, amplement, par d'heureuses choses que j'ai replacées, dans le goût de ces temps, toujours.

Seconde prière, qui se rapporte ― je n'ose pas dire à l'impression, mais à l'imprimerie. Je voudrais un caractère assez serré, qui s'adaptât à la condensation du vers, mais de l'air entre les vers, de l'espace, afin qu'ils se détachent bien les uns des autres, ce qui est nécessaire encore avec leur condensation. J'ai numéroté les poèmes, est-ce utile ? En tous cas, je voudrais, aussi, un grand blanc après chacun, un repos, car ils n'ont pas été composés pour se suivre ainsi, et, bien que, grâce à l'ordre qu'ils occupent, les premiers servent d'initiateurs aux derniers, je désirerais bien qu'on ne les lût pas d'une traite et comme cherchant une suite d'états de l'âme résultant les uns des autres, ce qui n'est pas, et gâterait le plaisir particulier de chacun. ― Leur ordre est bon, n'est-ce-pas ? à l'exception du Mendiant que j'ai rejeté à l'avant-dernière place, ne sachant où le caser. ― Que pensez-vous du titre ? J'ai hésité entre Angoisses et Atonies, qui sont également justes, mais j'ai préféré le premier qui met mieux en lumière l'Azur, et les vers dans la même note.

Enfin, suprême grâce, mais demandée à genoux, celle-ci ! Envoyez-moi une épreuve, que je ne garderai que vingt-quatre heures, je vous le jure, par Dieu qui voit mon âme ! Supposez qu'elle soit mise à la poste un Mardi, je l'aurais le mercredi à dix heures, et, le Jeudi, la renverrais pour que vous la receviez le vendredi matin ; ce sont là mes meilleurs jours, mais prenez-en d'autres, s'ils vous gênent. Je tiens à cette Épreuve, non pour les fautes matérielles, dont vous voudrez bien vous charger, n'est-ce-pas, mon ami, mais pour voir par moi-même l'effet d'ensemble, d'abord, et, s'il n'y aurait pas avantage à déplacer certains poèmes : puis des détails, qui seraient répétés à trop peu de distance, et se contrediraient, même. Enfin, il y a un ou deux titres que je n'ai pas encore trouvés, celui du Mendiant, par exemple, et de Tristesse d'été, qui répète un mot du sonnet[3].

De même, je me rappelle que le mot fin se trouve deux fois dans Épilogue. Mais assez !

Que de minuties, vraiment chinoises, mon bon Catulle, mais vous les comprenez, et vous ne les oublierez pas. Publiant ces quelques vers, il vaut autant le faire le mieux possible et les offrir d'une façon qui déguise tant de choses qui manquent encore !

Et le journal, quand paraîtra-t-il ? J'attends avec joie ce premier numéro. Vous m'en parlerez dans votre lettre, n'est-ce-pas, lettre que vous m'écrivez. (De suite ?)

Parlez-moi de vous, comme je vous parle de moi, c'est le seul moyen de se réunir un peu. Travaillez-vous ?

Quant à moi, je suis toujours à l'ouverture d'Hérodiade que je ne reprendrai que dans huit jours, étant fatigué par la revision de mes poèmes. (Il est, en effet, si difficile de faire un vers quand on l'a dans l'âme ; qu'est-ce, lorsqu'il faut le faire longtemps après avoir oublié ce qui eût pu le faire naître.) Je reviens à Hérodiade, je la rêve si parfaite que je ne sais seulement si elle existera jamais. Et puis, il faut dire que ce commencement qui m'attarde, est le plus difficile de l'œuvre. J'en étais à une phrase de vingt-deux vers, tournant sur un seul verbe, et encore très effacé la seule fois qu'il se présente. Enfin, d'ici aux vacances, j'ai encore du temps ! Je me tais, parce que je n'aime pas en parler : ce sont des souffrances à ressentir chaque fois que j'ouvre la bouche à ce sujet.

Pourtant, elle sortira, la Reine ! de toutes ces tristesses, ― mais quand ? Je ne dois pas trop écouter le découragement de l'instant où je vous écris ces mots, parce que beaucoup de lassitude s'y mêle.

= Adieu, mon cher Catulle ; ma femme porte la main de Geneviève à la bouche de cette petite fille qui vous envoie un baiser, et moi je serre la main et vous assure que je ne passe jamais un jour sans songer à vous. Amitiés à tous mes chers amis que je ne nomme pas, pour ne pas mettre l'un avant l'autre. Ne m'oubliez pas auprès de de Banville. Mes meilleurs souvenirs à Monsieur et à Madame de Lisle.

Votre
S. MALLARMÉ.
Question insidieusement discrète : « Et le cœur[4] ? »


Des treize poèmes envoyés (« Les Fenêtres », « Le Sonneur », « A celle qui est tranquille », [« Angoisse »], « Vere novo » [« Renouveau »], « Tristesse d'Eté », « L'Azur », « Les Fleurs », « Soupir », « Brise marine », « Le Château de l'Espérance », « Le Pitre châtié », « A un mendiant » [« Aumône »], « Epilogue »), onze seulement paraîtront (la liste citée moins « Le Château de l'Espérance » et « Le Pitre châtié »). Encore « Tristesse d'Eté » ne parut-il que le 30 juin, à la fin du volume repenant les livraisons de la revue.
Comme l'indique l'« Épilogue » (« Las de l'amer repos... ») des poèmes du Parnasse, ce treizain relève déjà d'une inspiration dépassée.
« A un mendiant » deviendra « A un pauvre », mais « Tristesse d'été » gardera son titre.
Catulle Mendès était fiancé à Judith Gautier.
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Avignon, 8, Portail-Mathéron,

dimanche 4 septembre 1870.

Mon cher ami,

Je suis honteux de l'aventure du journal et je voulais, il y a déjà quelques jours,
t'expliquer cette énigme.
Repris par le travail, immédiatement Villiers parti, j'ai cessé ma course au kiosque qui
défaisait ma séance du matin, et, tout étant contradictoire dans les feuilles, m'en suis
tenu an, dépêches.
J'avoue que la lecture de celle de ce matin, que tu connais à cette heure-ci, n'est-ce pas?
(40.000 Français prisonniers, l'empereur du nombre, et Mac-Mahon grièvement blessé)
a été sévère. Il y a dans l'atmosphère d'aujourd'hui une dose inconnue de malheur et
d'insanité.
Et tout cela, déjà, parce qu'une poignée de niais, il y a cinq semaines, s'est dite insultée
et a méconnu l'histoire moderne qui subsiste d'autre chose que de ces vieilleries
puériles. Je n'ai jamais si complètement détesté la Niaiserie.
Mais rien de ceci dans ce billet. Je te serre la main et, sans l'intention de te faire sourire,
je place sous cette enveloppe une série de timbres qui nous arrivent d'un bureau de tabac
à Arles Je ne sais si tu te souviens d'une somme équivalente que tu m'as prêtée lors de
ma dernière visite.
An revoir, amitiés de mon entourage. Ton
Stéphane M.
1. Mallarmé réexpédiait sans doute à Mistral les journaux d'Avignon.
2. Villiers avait prolongé de quelques jours son séjour à Avignon pour y voir sa tante, Gabrielle Villiers
de L'Isle-Adam, religieuse au Sacré-Cœur.
3. La bataille de Sedan avait eu lieu le 1er septembre.
4. Quinze jours plus tôt, Mallarmé avait reçu de Cazalis une lettre particulièrement amère : — Mon cher
enfant, où allons-nous? Je n'ai pas encore mon ordre de départ. Lefébure que j'ai été embrasser hier sera
réformé pour sa vue, il l'espère du moins. J'ai vu Mendès avant-hier, qui m'a longuement parlé de toi, de
vous et il a été ravi de votre hospitalité. Je suis triste qu'aux os : cette guerre est horrible à force d'être
absurde. Puis cette canaille de Paris qui ce soir peut-être va se soulever, tout cela est hideux, fait mal à la
pensée comme un mauvais rêve, comme un charivari dans une rue de province , comme une cacophonie
de vers sans rimes ni raison, comme La Marseillaise chantée par Thérésa. Comment rêver encore quand
tous ces voyous gueulent, pouah! J'ai des envies de vomir et, si je croyais dans l'âme immortelle, je
mourrais volontiers, Mais quitter ses amis, les vieux livres, les statues (les vers de terre sont de si mauvais
artistes) ne plus rêver , ne plus aimer, ne plus caresser de belles femmes, crois-le cela m'ennuierait
effroyablement. Enfin, je ferai ce qu'il faudra faire ; mais si le destin est l'auteur
de tout cela, ah! le pitoyable et le ridicule musicien!
Du début d'octobre, Triel à Aviation, pour Mallarmé, ce message de guerre signé Lefébure: — Un mot
seulement pour vous dire que je ne suis pas mort, que je porte bien, que je ne repose, et que nous sommes au milieu des compatriotes de Marie dont l'unique soldat s'est si effroyablement multiplié. C'est fort
triste...
Une cacophonie de vers sans rimes ni raison, belle anticipation!
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Vidéo de Stéphane Mallarmé
Stéphane MALLARMÉ – Le Poète et la Chine (CREOPS, 2014) Une conférence de Laurent Matuissi donnée le 6 juin 2014 au Centre de Recherches sur l’Extrême Orient de Paris-Sorbonne à l'occasion de la publication de son essai 'Mallarmé et la Chine'.
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