Autant j'ai été totalement conquise par le premier tome de cette trilogie, autant ce deuxième tome me laisse sur ma faim !
Au début, quand j'ai lu le sous-titre "L'histoire de Peter, j'étais toute contente de me dire que j'allais retrouver ce personnage qui m'avait tant plu dans le premier tome ! Je m'étais de suite attachée à lui et à son courage, sa force, sa détermination et il faut bien l'admettre, à son côté rebelle. Même si tout ça le définit encore et fait partie de lui, on a une sensation tenace pendant une grande partie du livre que tout ça a été mis en sourdine dans cette suite, plus calme, plus sage ... observation valable jusqu'au milieu du livre à peu près, à la fin tout bascule, enfin ! J'ai eu la triste impression que Peter avait perdu ce côté pétillant, explosif, qui le caractérisait précédemment pour devenir un autre garçon, plus terne, moins éclatant. Il réfléchit beaucoup au lieu d'agir, ne fonce plus tête baissée, se pose énormément de questions sur lui-même et sur la Longevité ... finalement, on découvre, après l'avoir vu en homme d'action, un homme de tête. A voir, je ne suis pas convaincue par ce revirement ...
A sa décharge, il faut dire que ce roman manque cruellement d'actions palpitantes. Même si on ressent le danger, toujours là quelque part, la menace qui pèse sur Peter et Anna à cause de leur statut d'anciens Surplus, l'absence d'actions "réelles" diminue un peu les effets dramatiques produits par le récit. On s'embourbe dans l'introspection, la questionnement et la recherche de la vérité, finalement, tout cela est plus psychologique qu'autre chose. le fait que Peter joue un rôle, se freine, se retienne, le rend tellement anti-naturel qu'on a le sentiment d'avoir en face de nous une copie de Peter et pas l'original. Même s'il est intéressant de voir cet adolescent en proie à tous les sentiments qui l'assaille, victime des évènements et des personnes qui l'entourent, à se battre contre lui-même, à tenter de trouver la meilleure solution pour lui et pour Anna ... ah, j'en ai pleuré de rage quand il a découvert ce fameux dossier dans le bureau de son grand-père ... Son personnage n'a rien d'amusant dans ce livre, il prend plus de profondeur, plus de noirceur aussi, il devient un homme et laisse l'insouciance de l'enfance derrière lui.
Et encore, je trouve que ce n'est pas lui qui a le plus souffert de cette "dépréciation" de caractère ... c'est encore pire avec Anna qui n'est plus que l'ombre d'elle-même ! Elle devient sous la plume de l'auteur une sorte de potiche qui attend sagement le retour de son "mari" le soir à la maison et qui passe ses journées à pouponner ... mon Dieu ! J'ai tremblé en voyant que l'auteur avait fait de ce personnage que j'aimais tant et auquel je m'étais attachée, une sorte de plante verte ! Une lueur d'espoir m'est venu lorsqu'elle a rencontré Maria et qu'elle a commencé à s'animer ... elle avait moins l'air d'une poupée sans vie. Là, au moins, je n'avais plus l'impression d'avoir affaire à une petite fille docile et inoffensive. On a toutefois le sentiment tenace qu'elle ne vit que par et pour Peter, et accessoirement son frère, et qu'elle ne réfléchit plus par elle-même. Il faut la provoquer pour qu'elle se décide à agir ... A la fin seulement, j'ai cru entr'apercevoir la Anna dont j'avais gardé un si tendre souvenir.
Mais revenons-en au roman, à son sujet : la Longévité, ou plutôt à son "producteur", Richard Pincent, le grand-père de Peter. J'ai eu froid dans le dos à chacune de ses apparitions. Cet homme avide de richesses et de pouvoir est juste immonde ! Il reflète une image bien peu ragoûtante de l'âme humaine et on a qu'une envie : se débarrasser de lui ! Il manipule tout le monde, y compris sa propre famille, dont, ou plutôt, surtout, Peter, pour obtenir ce qu'il désire, il n'a aucune morale, aucune limite, c'est un tyran sans coeur ! Mais il n'est pas encore ce qu'il y a de pire dans le roman, non, ce qu'il y a de plus affreux dans le livre, c'est ce qui découle des agissements de cet homme ... c'est monstrueux, révoltant, inimaginable et pourtant ! Tous ces actes ont lieu dans l'unité X de Pincent Pharma, le lieu où l'on produit la Longévité. Là, l'auteur a réussi à m'atteindre, à me faire sentir humiliée, abaissée, anéantie. J'ai eu envie de crier de fureur, de ma révolter face à ces horreurs et surtout d'agir pour faire changer les choses ! Voilà des scènes qui restent dans nos mémoires, qui nous touchent, obligatoirement, qui ne nous laissent pas indemne et encore moins indifférent ! Un trait de génie de la part de l'auteur ! Elle sait toucher son public là où ça fait mal pour lui faire comprendre toute l'horreur du monde qu'elle a créé.
Là où l'auteur réussit un tour de force magistral, c'est qu'elle met au coeur de son récit deux thématiques qui nous sont familières : la quête de l'éternelle jeunesse et l'utilisation des cellules souches. Elle prend le parti de nous montrer, à partir du prétexte de la Longévité, un monde à vous glacer le sang. Honnêtement, ce monde de dystopie fait peur, rien que d'y penser on sent des frissons glisser dans notre dos. Pourquoi ? Parce que ça a l'air tellement réel, tellement probable, possible, que l'on se prend à y croire. Oui, cela peut arriver, des hommes comme Richard Pincent, la Terre en porte beaucoup, des hommes et des femmes comme ses "clients" existent déjà ... C'est finalement très proche de nous tout ça, de quoi augmenter notre angoisse ! C'est un monde inhumain, sans limites, et pourtant, même si j'étais choquée, je n'ai pas été surprise. Car oui, c'est certain, les dérives de l'Homme peuvent le conduire à de telles folies ! de quoi nous faire faire des cauchemars un bout de temps !
Et les victimes innocentes de ce monde sont les enfants. Tout d'abord, les Surplus ... que dire si ce n'est que leur sort me rappelle cruellement celui des victimes des nazis ... ils sont réduits à l'état de "robot", déshumaniser au possible ... c'est révoltant ! Il y a aussi les "légaux" tels Anna, Ben, Peter et ... Jude ! Ah, comment ne pas mentionner ce nouveau personnage qui amène un peu de piment dans le roman grâce à toute la fougue de sa jeunesse ? Au début, je l'ai trouvé arrogant, trop sûr de lui et puis, finalement, j'ai retrouvé en lui ce qu'il manquait à mes yeux à Peter dans ce deuxième tome : de l'énergie, de la témérité, de l'inconscience, et pour cause ... (non, je ne vous en dirais pas plus, il faut lire le livre pour voir de quoi je parle). Je dois dire qu'arrivée à la fin du roman, je me suis prise à espérer qu'on le retrouve plus amplement dans le troisième tome ! Il amène une touche d'effronterie, d'humour et de légèreté au récit et ça fait du bien au milieu de toutes ces "lourdeurs".
Même s'il paraît ennuyeux au début, ce nouvel opus de
Gemma Malley sait nous captiver, les pages se tournent toutes seules à un rythme effréné sans même qu'on s'en rende compte ! A travers ce roman, on découvre un Peter plus adulte, mais surtout les terribles vérités du monde dans lequel il vit. Un roman plus sombre, plus menaçant, plus pesant, qui laisse présager des bouleversements majeurs de l'ordre établi dans le prochain et dernier tome de cette trilogie et pour conclure je n'aurais qu'une chose à dire : qu'est-ce que j'ai hâte de découvrir ce dernier tome et de commencer ma lecture !
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