Les chênes qu'on abat...

Le style m'a paru lourd, chargé de grandiloquence pour ce plaidoyer pro- domo et ce document à ranger dans l'enrichissement du culte de la personnalité. Beaucoup de conversations à bâtons rompus, où revient sans cesse Napoléon. Ce qui m'a interpellé c'est qu'à aucun moment, le Général de Gaulle ne se remet en question, n'a la clairvoyance de mettre à jour ses ses erreurs, ses défauts. Qui n'en a pas ? Je viens de finir récemment "La disparition de Josef Mengele" d'Olivier Guez et je suis frappé de voir que ces deux hommes publics n'ont pas la faculté jusqu'à leur dernier souffle de prononcer le moindre mea culpa donnant ainsi raison à Spinoza pour qui "Il y a dans tout être une tendance de l'être à persévérer dans son être".

Indigeste (dans la forme).

Je m'avoue assez déçu de cet ouvrage qui fatigue par la profondeur intellectuelle et historique qu'il affiche mais qui ne m'apparaît que pédantisme. Déçu aussi de ma réaction face à cet ouvrage qui, peut-être, aurait nécessité plus d'efforts de ma part ?
Il s'agit là du récit d'une visite de Malraux à Colombey-les-deux-Églises après le départ de de Gaulle du pouvoir. Tous les sujets passent dans leur conversation relatée par Malraux : la destinée de la France, le rapport de de Gaulle aux Français, ses actions passées, la résistance, l'Algérie, les grands personnages qu'il a côtoyés, les questions sensibles pour le général de la mort et de la religion… Mais aussi la sculpture grecque et le chat d'Yvonne. Tout s'enchaîne sans transition, de façon presque sans queue ni tête. Malraux nous assomme d'anecdotes et de citations mieux choisies les unes que les autres. La culture, c'est comme la confiture.
Parfois inspirant (la réflexion sur le sens de l'histoire notamment), souvent exaspérant, cet ouvrage m'a également refoulé par son côté trop travaillé. Paru (apparemment) un an après sa rencontre avec le général, le discours s'enchaîne trop facilement, à toute vitesse semble-t-il, fusant de culture historique et de répliques intellectuelles bien choisies. Impossible de prendre ce livre pour une discussion ayant réellement eu lieu puisque basée uniquement sur des souvenirs évidemment retravaillés – je vois mal Malraux prendre des notes devant le grand Charles. Une façon tout de même d'approcher « de Gaulle de l'intérieur », comme le défend Jean Grosjean ?