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EAN : 9782253010272
251 pages
Le Livre de Poche (01/12/1976)
3.53/5   148 notes
Résumé :
Je considère Les Conquérants comme un événement de la plus haute importance, dans l'histoire morale contemporaine. Pour Malraux, l'essence du révolutionnaire ne consiste ni dans une foi - toujours niaise - ni dans une information - toujours incomplète, ni en des disciplines - toujours périmées -, mais dans un certain état de disponibilité et de courage. Garine ne s'intéresse pas à sa propre vie. Et il peut mettre une absence totale de scrupules au service d'intérêts... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Je ne reviendrai pas ici sur une analyse « littéraire » des Conquérants. Elle serait pour moi une redite de ma critique de la Condition Humaine, en moins fouillée. Je propose plutôt ici d'aborder cette oeuvre par une réflexion personnelle sur son thème principal, posé en titre.

Un film, un poème parnassien, une bande dessinée, un numéro spécial d'une revue d'Histoire… voilà tout… tout ce que nos puissants moteurs de recherche modernes offrent en réponse au mot-clé « Les Conquérants »… quelques rapides mentions du roman d'un certain André Malraux, et une analyse semble-t-il fouillée de leur rôle dans l'Histoire, d'un auteur inconnu, Muhamyankaka Damien Bambanza… indisponible à la vente. Rares sont donc les références de fond que j'ai pu trouver pour introduire cette interrogation : « qu'est ce qui fait courir les conquérants ? »

Pourtant, ils sont partout. Depuis les conquérants de l'espace, des pôles ou du nouveau monde, aux conquérants de l'inutile, de l'impossible, ou de l'accord parfait. Plus prosaïquement, chacun d'entre nous s'emploie chaque jour à conquérir… plus de parts de marchés, pouvoir et reconnaissance, l'amour de ses proches, la félicité, ou simplement plus de temps pour se ressourcer ; certains (et certaines) se spécialisent dans la conquête amoureuse et d'autres dans celle du jardinage (référence à la nouvelle plante crée par semis successifs).

L'esprit de conquête est tellement ancré dans l'adn de l'être humain que l'étymologie n'offre que des variations sur la « conquista » ; le « conquaere » est resté ce qu'il était du temps de César, ne faisant que se décliner dans toutes les activités sociales.

Et pourtant, qu'on oublie un instant le con- englobant, saisissant, totalisant, créant propriété et subordination –et donc historiquement et philosophiquement le plus souvent par la force-, et la « queste » du vieux françois, la quaesita latine se trouve révélée… mais que cherche donc ce conquérant de tout acabit ?

Au-delà du roman reportage sur la Chine révolutionnaire de 1929 et de ses qualités littéraires certaines et marquant son temps, au-delà de réflexions sur l'impact et les techniques de propagande au service d'un « cause », la question de fond que pose Malraux dans Les Conquérants, comme dans la Condition Humaine, reste bien celle-ci : qu'est-ce qui pousse ces « conquérants » à l'action ? En quoi cela participe-t-il de leur « condition humaine » ? Quelle est le sens de cette quête ?

On pourrait répondre qu'elle n'en a pas : la folle chevauchée d'Alexandre jusqu'à l'Indus et son exigence que lui soit rendu un culte divin pour cela l'aura-t-elle empêché de mourir jeune d'une crise de palu comme le dernier des touristes imprudents ?

Et même si les conquêtes laissent dans l'Histoire des traces importantes, souvent hors de la volonté de leurs initiateurs, à commencer par les « brassages » ethniques, culturels et religieux, peut-on oublier les destructions et la mort qui les accompagnent ? synonyme de succès aux yeux du peuple ou de la postérité lorsque la propagande est efficace, la conquête passe souvent par un travail de l'ombre sale et qui n'a rien d'épique.

Alors pourquoi les Conquérants ? S'il n'y a pas de succès durable et sans souffrance, si seule perdure la roue de la vie et de la mort, pourquoi cette énergie à aller au-delà, au-delà de soi, du « je », vers cet autre qui m'anime, m'émeut, m'attire, vers cet ailleurs que mon premier regard de découvreur déjà embrasse, possède secrètement… tandis que mes poings déjà se ferment pour en défendre l'accès à l'étranger.

Malraux répond « l'action ». Si l'homme ne se contente pas de cultiver son jardin, c'est qu'il lui faut l' « actio ». Mais comme l'écrit très justement Dorian Astor, le « deviens ce que tu es » de Nietzche et Pindare n'a rien à voir avec le slogan moderne de nos armées et autres détournements dont les grandes enseignes de vente ont le secret pour caresser notre désir infini d'être et de s'affirmer comme individu à des fins marketing.

Malraux, comme Nietzche, considère la volonté de puissance comme le moteur fondamental mais n'allègue pas de valeur en soi à l'individu : c'est le processus d'individuation lui-même qui compte et fait exister. Penser, parler, agir : tel serait donc la conquête dont nous parle Malraux –comme bien d'autres-, sans apporter de réponse toute faite.

Ainsi, chacun pourra continuer de chercher la transcendance dans une action pensée, consciente qu'au-delà d'une fuite devant nos peurs personnelles et collectives, l'être « agissant » est, par l'action même, plus que par son résultat ; et chacun pourra également s'employer à penser l'action juste, question sans fin elle aussi, depuis l'antiquité, d'autant qu'elle aussi ne se dénoue que dans le rapport complexe entre l'intention, l'action et l'effet.
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1925. le narrateur est embauché par son ami d'enfance Pierre Garin ( Garine ) à Canton, comme secrétaire et traducteur, au sein du Kuomintang de feu Sun Yat Sen, dirigé par Borodine ( qui a vraiment existé ). Canton est en guerre contre Hong Kong aux mains des Anglais.
Tchang KaÏ Chek et l'Armée Rouge de Gallen se battent contre les troupes chinoises des Anglais. le récit est ponctué des attentats de Hong, anarchiste, mais aussi des fusillades isolées contre les Cantonnais. le sage Tcheng Daï, au pouvoir ( ? ) essaye de modérer les deux factions. Il se suicide ou est assassiné. Hong Kong en profite pour coller des affiches contre Canton, et Garine, chef de la Propagande du Kumintang, les fait rapidement recouvrir d'affiches accusant Hong Kong.
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Je ne connais pas assez André Malraux. Il est prouvé biographiquement qu'il ne peut pas être physiquement le narrateur de ce livre. Il a qualifié plus tard ce roman de 1928 de création d'adolescent.
Le style utilisé est celui d'un journal de guerre, comme celui de Mussolini. On s'y croirait. le narrateur est en admiration devant Borodine, communiste, et surtout Garine.
Malraux était-il communiste à cette époque ?
Etant contre les conquêtes territoriales ou financières, je ne peux cautionner ce livre, surtout avec Borodine, un Russe qui vient exporter sa révolution en Chine ; Hong le dit bien : nous n'avons pas eu besoin d'eux auparavent ! Cependant, ce roman est bien écrit, même s'il y a des éléments laissés dans le flou.
Il est aussi possible que Malraux ait fait ce roman contre la guerre, mais aucun élément ne le laisse supposer.
A t-il changé plus tard ?
Dans la postface écrite en 1948, il fait une conférence. Il condamne nettement ce qu'il appelle les psychotechniques, la propagande, quelles soient américaines pour inciter à consommer, ou staliniennes pour adhérer au parti ; et il pose la question :

"Comment empêcher les techniques psychologiques de détruire la qualité de l'esprit ?"
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Une première publication en feuilleton dans « La Nouvelle Revue Française » suivie d'une sortie en librairie en 1928, voilà « Les conquérants », un roman de jeunesse d'André Malraux. Et quel roman ! Nous voilà plongés dans la Chine révolutionnaire de 1925 qui verra la prise de pouvoir de Tchang Kaï-chek.

Dans le but de faire échec à l'Angleterre, puissance coloniale, Borodine et Garine, en dignes représentants de l'obédience soviétique fomentent une grève générale à Canton et à Hong Kong …

Un beau livre militant comme on n'en écrit plus guère ; tantôt journal, tantôt roman, tantôt reportage… Mais ne nous y trompons pas, c'est Malraux avec son tempérament de baroudeur passionné d'Asie qui parle à travers le narrateur…

Et puis quand on lit ce livre à quinze ans, l'aphorisme le plus célèbre de l'auteur vous saute à la figure : « J'ai appris qu'une vie ne vaut rien, mais que rien ne vaut une vie ».


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Avec re roman, récit primordial dans l'oeuvre de l'écrivain, Malraux s'attaque au problème de la mort et veut en saisir enfin le sens. La mort constitue en effet le thème central de ce récit ; son écrasante obsession se manifeste à toutes les pages.
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"Qu'ai-je fait de ma vie moi? Mais bon Dieu que peut-on en faire à la fin?"
Cette question existentielle, celle du sens à donner à sa vie, posée dans Les conquérants par Garine "commissaire de la propagande" révolutionnaire du type conquérant, homme puissant et dur qui a désiré le pouvoir et se remet en cause, se retrouve dans les principaux romans d'André Malraux (écrivain de génie et homme politique). Ainsi dans La condition humaine (prix Goncourt), il traite du thème "comment s'affranchir de sa condition d'homme?" et dans La voie royale, il aborde également la solitude du héros qui n'échappe pas à son destin.
Les conquérants a d'abord été publié en feuilletons. André Malraux, sur place au moment des faits, prend la parole à travers son narrateur (ami de Pierre Ganin dit Garine) venu d'Europe en paquebot (une escale à Saïgon, une à Hong-Kong) qui relate les évènements historiques (de juin 1925 à aout) lors des grèves visant à la cessation de travail des ouvriers d'Hong-Kong (aux richesses mal acquises dues "à l'impérialisme anglais") alors que le gouvernement de Canton rêve de "restituer l'unité de la Chine" et donc d' atteindre l'Angleterre dans "son prestige".
Fanatisme,idéal,haine....l'angoisse et la violence montent crescendo. "Guerre latente contre l'Angleterre immobile", interventions militaires, arrestations,tueries,tortures...absurdité de la vie.
Garine, l'anarchiste ambitieux qui veut une révolution culturelle, est ici opposé à Borodine, le corrompu qui souhaite une révolution sociale. Hong, qui a été le secrétaire de Garine, est le chef des terroristes. Tcheng-Daï le "chef spirituel de la droite du parti". Les forces s'opposent, les manipulations de tout genre et les enjeux financiers survolent la politique.
Un excellent livre, un peu trop intellectuel à mon goût, qui interpelle le lecteur à travers Garine mourant: j'éprouvais "le sentiment de la vanité de toute vie, d'une humanité de forces absurdes".
La volonté de puissance entraine-telle la chute des conquérants?
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Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
Tolstoï. Duquel parlons-nous ? L'auteur "d'Anna Karénine" et de "Guerre et Paix" ne fait pas seulement partie de l'Europe, il est un des sommets du génie occidental. Lorsqu'il écrivait ses romans, il se voulait d'ailleurs Européen, se sentait nommément en rivalité avec Balzac.
Mais s'il s'agit du comte Léon Nicolaïeviitch qui, lui, tente de vivre comme une sorte de Gandhi chrétien, meurt dans la neige à la manière d'un héros de byline ( 1 ) ; qui écrit "qu'il préfère à Shakespeare une bonne paire de bottes", alors je pense à l'un des grandss inspirés de Byzance.. ou à Tagore.


1-- La byline est un chant épique russe de nature orale qui narre les aventures et hauts faits d'un héros donné.
( Postface, écrite vingt ans après.)
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-- Ah ! En voilà assez ! Qu'il réponde immédiatement !
-- Tu as dit qu'il avait cinq minutes, dit Nicolaïeff, respectueux et ironique.
-- Toi, fous moi la paix, hein !
Il a pris le révolver sur le bureau. La main droite, en raison du poids de l'arme, est ferme ; la gauche, qui sort de l'écharpe blanche, tremble de fièvre. Une fois de plus, je dis au Chinois de répondre. Il fait un geste d'impuissance.
La détonation. le corps du Chinois ne bouge pas ; sur son visage, une expression intense de stupéfaction.
Nicolaïeff a sauté et s'appuie au mur. Est il blessé ?
Une seconde...Deux... Le Chinois s'effondre, mou, les jambes à demi pliées. Et le sang commence à couler.
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Je les préfère [les pauvres], mais uniquement parce qu'ils sont des vaincus. Oui, ils ont, dans l’ensemble, plus de cœur, plus d'humanité que les autres : vertus de vaincus. Mais je sais très bien qu'ils deviendraient abjects, dès que nous aurions triomphé ensemble…
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Quand la France a-t-elle été grande ? Quand elle n'était pas retranchée sur la France. Elle est universaliste. Pour le monde, la grande France, c'est plus celle des cathédrales ou de la Révolution, que celle de Louis XIV. Il y a des pays, comme la Grande-Bretagne - et c'est peut-être leur honneur - d'autant plus grands qu'ils sont plus seuls. La France n'a jamais été plus grande que lorsqu'elle parlait pour tous les hommes, et c'est pourquoi son silence s'entend de façon aussi poignante...
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Hong s'est libéré de la misère ; mais il n'a pas oublié sa leçon, ni l'image du monde qu'elle fait apparaître, féroce, colorée par la haine impuissante.
"Il n'ya que deux races, dit-il, les mi-sé-ra-bles et les autres."
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Quel roman parvient à concilier l'engagement politique et la réflexion existentielle sur ce que nous sommes vraiment, vous et moi ?
« La condition humaine », d'André Malraux, c'est à lire en poche chez Folio.
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