Citations sur Je remballe ma bibliothèque (49)
J’ai toujours senti que ma bibliothèque expliquait qui j’étais, me donnait une identité mouvante qui ne cessait de se transformer au fil des ans.
J'ai toujours aimé les bibliothèques publiques, mais je dois avouer un paradoxe : je ne m'y sens pas bien pour travailler. (...)
Je n'aime pas l'interdiction d'écrire dans les marges des livres que j'emprunte. Je n'aime pas avoir à rendre les livres si je découvre en eux quelque chose de surprenant ou de précieux. Tel un pillard avide, je veux que les livres que je lis m'appartiennent. (p. 21)
La consolation est essentielle. Les objets consolants sur ma table de nuit sont (ont toujours été) des livres, et ma bibliothèque elle-même était un lieu de consolation et de réconfort silencieux. (p. 59)
Le biologiste évolutionniste Marc Hauser a suggéré que tous les humains ont en commun une « grammaire universelle », inscrite dans nos circuits neuronaux et manifeste dans notre création artistique.
Des études scientifiques telles que celles de Hauser ont mené à une conclusion connue depuis longtemps des lecteurs : la littérature, mieux que la vie, offre une éducation morale et permet le développement de l’empathie, essentielle pour participer au contrat social. Peut-être l’art de raconter des histoires s’est-il développé en tant qu’instrument d’assertion de cette qualité humaine, une qualité qui joue un rôle si essentiel dans nos vies intellectuelles et sociales.
Les livres ont toujours parlé pour moi et m'ont appris beaucoup de choses longtemps avant que ces choses n'arrivent matériellement dans ma vie, et la présence physique des volumes a été pour moi très proche de celles de créatures vivantes partageant ma table et mon toit. (p. 60)
Parce que mon enfance était en grande partie nomade, j'aimais lire des histoires de vie stable suivant leurs cours ordinaire. Et pourtant, je savais que, sans perturbation, il n'y aurait pas d'aventure. Peut-être cette idée était-elle colorée par la supposition que les perturbations- infortunes, injustices, calamités, souffrances- sont les conditions nécessaires à l'invention littéraire. (p.41)
L'antique grange, dont les pierres portaient les signatures de leurs maçons du XVe siècle, a abrité mes livres pendant près de quinze ans. Sous un plafond de vieilles poutres, j'avais rassemblé les survivants de nombreuses bibliothèques antérieures, de mon enfance au temps présent. (...)
Mais je ne possédais ( et ne possède toujours) ni les fonds ni le savoir nécessaire pour devenir un collectionneur professionnel. Dans ma bibliothèque, de jeunes Penguin luisants côtoyaient , heureux, de sévères patriarches à reliure de cuir. (p. 13)
Tout traducteur sait que passer d’une langue à une autre est moins un acte de reconstruction que de reconversion, au sens le plus profond de changement de notre système de croyances. Aucun auteur français n’inventerait jamais la formule « Être ou ne pas être » pour To be or not to be, pas plus qu’un auteur anglais n’écrirait For a long time I went to bed early pour « Longtemps je me suis couché de bonne heure ». Leur langue, non leur expérience, le leur interdit, parce que bien que l’expérience humaine soit universellement la même, depuis Babel les mots que nous possédons pour nommer cette expérience commune sont différents. Après tout, l’identité des choses dépend des noms que nous leur donnons.
Mais la générosité de mes livres est toujours là, elle fait partie de ce qu'ils sont, et alors que je les sortais de leurs caisses après les avoir si longtemps condamnés au silence, ils étaient encore bienveillants à mon égard. (p. 36)
Les mots sont les seuls instruments nous permettant de prêter et de retrouver du sens et, en même temps qu'ils nous permettent de comprendre ce sens, ils nous montrent qu'il se trouve précisément au-delà du domaine des mots, juste de l'autre côté du langage . Les traducteurs le savent, peut-être, mieux que tous les artisans des mots : ce que nous édifions à l'aide des mots ne peut jamais saisir dans sa plénitude l'objet désiré. Le Verbe qui est au commencement nomme mais ne peut être nommé. (p. 79)