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Critique de Sachenka


Les autobiographies sont souvent l'occasion pour des gens connus pour remettre les pendules à l'heure, rectifier, s'expliquer, et même se justifier envers et contre tous. Ou tout ça à la fois, même inconsciemment. Pire, c'est parfois même un exercice d'égocentrisme, pour parler d'eux, encore et encore, en abreuvant les lecteurs d'une ritournelles d'événements anodins et d'informations insipides. C'est pourquoi j'en lis très peu. Toutefois, le tournant est une exception à la règle. Dans cet ouvrage, Klaus Mann dépasse le « moi, je ». Bien sûr, il doit parler de lui, mais bien souvent à travers ou en réaction à des événements qui le dépassent. Toujours d'une façon à impliquer le lecteur. Il commence par aborder ses années de jeunesse, ses parents (qui ne voudrait pas savoir à quoi ressemblait une enfance dans la maison du grand prix Nobel de littérature, Thomas Mann ?), l'Allemagne, Munich au début du 20e siècle.

Klaus Mann est un enfant comme les autres, les échos de la Première guerre mondiale viennent jusqu'à lui, puis les opinions anti-nationalistes de son père et de son cercle d'amis. Je passe vite sur le reste de ces années de jeunesse, il suffit de dire qu'il devient très proche de sa soeur Erika et que, adolescent, il démontre un intérêt vif pour la littérature. Ce qui marque surtout cette période, c'est la montée du nazisme. À partir de ce moment, les événements importants que la vie de Klaus seront toujours mis en perspective avec la nationalisme qui frappe l'Allemagne. C'est le tournant : Histoire d'une vie. Selon moi, c'est là un des intérêts majeurs du livre : outre montrer les aélas d'un jeune auteurs des années 1930, c'est donner le point de vue, une voix, à tous ces hommes et ces femmes de courage qui ont tourné le dos au nazisme. Et qui l'ont même combattu à leur façon.

Les Mann se sont opposés rapidement au nazisme avec leurs écrits (Klaus a même fondé une revue antifasciste), avec leur théâtre, mais ils ont dû fuir en exil pour éviter la persécution. Plus tard, pendant la Deuxième guerre mondiale, le jeune homme l'a fait avec les armes. Émigré aux Etats-Unis, il s'est enrôlé dans l'armée américaine et, après des combats en Italie, a foulé à nouveau le sol de sa patrie du côté des vainqueurs. La partie du bouquin qui relate ces années de guerre sont des entrées de son journal intime, qu'il tenait même sur le front. Mais le retour à la vie civile fut difficile. Écrivain prometteur, il eut toujours à vivre avec le fait d'être le ‘'fils du génie'', de n'être qu'une ombre de son père. Il s'enleva la vie quelques années plus tard, à 42 ans.

Le tournant offre un éclairage intéressant sur cette période troublée. C'est enrichissant à plus d'un point de vue et, pour cette raison, il mérite d'être lu et relu. C'est une lecture ambitieuse, tout un pavé, mais ça vaut le coup. C'est que ce chef d'oeuvre est passionant et pas seulement instructif. Klaus Mann était un individu complexe et marquant. Ses réflexions sur la nature de l'homme (teintée par son expérience du totalitarisme) apportent un éclairage nouveau sur sa personne mais aussi sur la société en général et tout un chacun.
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