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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Cette fois-ci, Ian Manook n'a pas bâti une histoire policière comme avec Yeruldelgger, Les temps sauvages et La mort nomade, thrillers qui se déroulent en Mongolie. Il n'a pas non plus parlé du génocide arménien comme il l'a fait avec L'oiseau bleu d'Erzeroum, l'histoire de ses grands-parents, mais il m'a ramené en Islande comme dans Heimaey, thriller qui m'a motivé pour découvrir encore un autre genre littéraire démontrant tout le talent de cet écrivain.
Avec À Islande !, celui qui se nomme Patrick Manoukian confirme sa parfaite connaissance de cette île à cheval sur deux plaques tectoniques et c'est, pour moi, une nouvelle découverte complétée par le monde de la pêche à la morue.
C'est en pleine campagne de cette pêche, en 1904, sur un bateau, une goélette partie de Paimpol, que tout débute. Elle fait voile à Islande, comme on disait à l'époque.
S'inspirant de faits réels, Ian Manook fait vivre ces pêcheurs embarqués sur le Catherine. Leurs conditions de vie sont effroyables. L'hygiène à bord n'existe pas. Ils doivent travailler dur, aller au-delà de leurs forces pour gagner une misère avec le risque du naufrage, de la blessure grave ou de l'épidémie à bord.
Ian Manook utilise le vocabulaire des pêcheurs et son récit est rythmé, prenant. Je fais connaissance avec Corentin Lequéré qui a déjà dix campagnes à Islande et qui connaît bien la pêche et la navigation. Il devient vite un personnage essentiel. Il a pris en charge Kerano, blessé et fiévreux, que le capitaine ne ménage pas. Instituteur en Bretagne, il avait été conquis par Pierre Loti et son Pêcheur d'Islande, « lui qui n'a jamais navigué dans ces eaux. »
Quand la tempête fait rage et que la température descend à moins quinze degrés, il y a une trentaine d'équipages sur la zone et le risque d'abordage est réel. Tout au long de son récit, l'auteur m'apprend quantité d'informations comme cette tempête du 6 avril 1901 qui a vu quatorze goélettes mises à mal dont huit ont coulé corps et bien pour un total de 117 disparus laissant, à Paimpol, 45 veuves et 67 orphelins.
Finalement, le Catherine se fracasse sur le rivage, près de Fáskrúdsfjördur qu'on appelle aussi Búdir. Là, j'apprends comment les locaux organisent le sauvetage des hommes et se rétribuent en récupérant le maximum de choses du bateau.
Au moment où tout cela se passe, un certain Camille Pelletan, homme de lettres, ami de Verlaine et de Rimbaud, s'occupe de laïciser la marine française. Les oeuvres religieuses en place pour s'occuper des marins doivent être remplacées par du personnel laïc. Or, voici Marie Brouet qui, par un hasard que je vous laisse découvrir, se retrouve à Búdir pour seconder le Docteur Gunnarsson, directeur du nouvel hôpital. Les soeurs Elisabeth et Justine, obligées de s'effacer devant cette nouvelle organisation acceptent mal ce qui se passe mais l'histoire développée par Ian Manook révèle encore bien des surprises.
C'est donc à Búdir que se retrouvent Lequéré et Kerano. Ils font connaissance avec Eilin Arthurdottir, institutrice au village et avec son père, Arthur. Ma lecture, comme dans Heimaey, me fait découvrir l'Islande et sa géologie unique, ses bains d'eau sulfurée et ses tremblements de terre avec un volcanisme toujours actif. Entre la découverte des lieux et les échos sur les conditions de vie des marins-pêcheurs, les occasions de trembler, d'admirer, de s'indigner aussi ne manquent pas.
Quand L'Hermine fait escale devant Búdir, elle est en quarantaine à cause d'une épidémie. La typhoïde sévit mais Marie et le Docteur Gunnarsson n'hésitent pas à monter à bord pour constater que le poste d'équipage est un cloaque glauque et visqueux où se mêlent les odeurs de morue et de merde. Les hommes font leurs besoins sur le pont et personne ne nettoie. Les armateurs se moquent de tout ça, ne pensant qu'au profit. de plus, l'alcool fait des ravages car une goélette n'embarque que quatre litres d'eau par jour pour tout l'équipage. Par contre, le vin, le cidre et l'eau de vie abondent…
Ces morues que l'on pêchait au large des côtes bretonnes au XVe siècle, aiment l'eau froide. À cause du réchauffement climatique, elles cherchent les hauts fonds islandais. L'église catholique imposant de nombreuses périodes sans viande, la demande en poisson était importante et nous savons qu'aujourd'hui les problèmes de pêche sont toujours bien réels, surtout que les fonds marins ne sont pas inépuisables.
Avec son talent de conteur que j'adore, Ian Manook mène l'histoire de Marie Brouet, Lequéré, Elisabeth, Eilin, Arthur et Kerano jusqu'au bout donnant même des informations sur la fin de vie de ses principaux personnages dans « Épilogues ».
À Islande ! est un livre captivant, très instructif, témoin d'une époque pas si lointaine à ne pas oublier, foisonnant d'informations très intéressantes et j'ai à nouveau été conquis par Ian Manook. de plus, je connais un peu mieux l'Islande, son histoire et ses habitants sans y être jamais allé…

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Ian Manook n'est pas Pierre Loti. Il pose un autre regard sur les pécheurs d'Islande du début du XXe siècle. Un regard qui n'a rien d'esthétique ni de romantique puisqu'à travers une fiction richement documentée il raconte ce qu'il y a de moins glorieux et de plus sombre dans ces campagnes de pêche à la morue qui voient s'éloigner des côtes françaises les islandais de Paimpol pendant six mois.
L'auteur s'attachant à rendre sensible l'itinéraire de ces pêcheurs dans sa dimension sociale et politique, on découvre des marins amarrés à presque rien naviguant entre deux drames, le pire de l'existence qu'ils mènent c'est la dureté et la maltraitance érigées en mode de fonctionnement élémentaire à bord des goélettes, conséquence du cynisme des appétits des armateurs.

Il y a donc de la noirceur et un sentiment d'impuissance qui embrassent le récit mais l'humanisme et le volontarisme qui animent les protagonistes éloignent la tentation du misérabilisme. Dans ces eaux receleuses de désastres, l'auteur a su se tenir à bonne distance de tout ce qui lesterait son histoire. Les personnages dotés d'une noblesse morale et de caractère sont attachants, l'écriture particulièrement immersive nous laisse voir ce que les légendes préfèrent ignorer et le texte dense est mené magistralement.
J'ai véritablement été fascinée par la précision du langage, des phrases réfléchies capables de renvoyer des images qui transpercent les yeux, pénètrent l'esprit et trouvent facilement prise sans que la langue soit spécialement travaillée ou sonore. En aventurier qu'il a été, Ian Manook donne richesse à un texte en décrivant parfaitement les paysages minéraux, ces falaises de basalte baignées par des eaux noires toujours menaçantes qui attendent leur heure en léchant les rochers des côtes islandaises.

Ce roman à la puissance incomparable n'est certes qu'une fiction mais l'exactitude de ses évocations l'érige en véritable recueil commémoratif.
Lecture passionnante.
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Ce roman se passe en Islande, et ce n'est pas un polar.
L'auteur de ce roman est Ian Manook, et je confirme, ce n'est pas un polar.

Dans un roman aux personnages très attachants, Ian Manook nous parle de la pêche à la morue, aux abords de l'Islande, dans les premières années du vingtième siècle. Ceux dont on suit l'histoire sont des bretons de Paimpol, pécheurs par tradition, par obligation, parce qu'il ne savent rien faire d'autre, parce que rester à terre ne rapporte rien.
Les conditions de vie à bord des bateaux sont inhumaines et beaucoup y laissent leur vie.
Le Catherine pris dans une tempête s'échoue sur la cote islandaise, les rescapés sont pris en charge dans le tout nouvel hôpital, que le gouvernement français vient d'ouvrir, pour mettre fin à l'emprise du clergé sur les soins apportés aux marins.
L'auteur nous décrit plus précisément pendant les quelques semaines qui suivent le naufrage la vie de quelques personnages, Corentin Lequéré, pécheur expérimenté qui voudrait oeuvrer pour l'amélioration de la vie des marins, Kérano, instituteur, embarqué par romantisme, il voulait vivre par lui-même Pêcheur d'Islande. Il y a Marie, nouvelle arrivée en Islande, infirmière en chef, Soeur Elizabeth, qui jusqu'à présent s'occupait des soins aux marins, Eilin l'institutrice islandaise et son père Arthur. Leurs destins vont s'entrecroiser pour le meilleur et parfois le pire.
Le talent de l'écrivain se révèle tout autant dans ce récit que dans ses polars. l'écriture nerveuse prend aux tripes. L'Islande est là dans toute sa beauté sauvage, les personnages nous deviennent proches et nous captivent. Et chose appréciable pour ceux qui comme moi n'aiment pas quitter ceux qui ont peuplé notre esprit pour quelques heures, l'auteur nous donne dans des épilogues le détail de la fin de vie de chacun.
Un roman surprenant, découvert grâce à la critique de mon ami Fandol et l'appréciation positive de mon mari. Je n'aurais jamais pensé en l'ouvrant l'aimer autant.

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Ian Manook vient de m'embarquer à la pêche à la morue et ça n'a pas été de tout repos, croyez-moi.
Je suis parti de Paimpol, cité bretonne, pour me retrouver dans les eaux glacées à Islande, c'est ainsi que l'on dit, dans le milieu.
Si vous connaissez l'expression, "les forçats de la mer", elle prend, ici, tout son sens.
Les conditions de vie à bord du Catherine sont quasi inhumaines.
Ces hommes, pour faire vivre leur famille, se sacrifient littéralement, au profit d'armateurs qui les exploitent.
Lequéré et Kerano sont de ceux-là.
Sous la plume du romancier, le lecteur est plongé (croyez-moi, là aussi, le terme est approprié) dans le coeur et dans le corps de ces marins.
Les ordres du capitaine, le roulis, les vagues, le poisson qu'on remonte avec peine, la sueur, la crasse, la fatigue que l'on doit oublier, la maladie, les hommes harassés et soudain la tempête, vicieuse, mortelle.
Marie Brouet, jeune infirmière,  est envoyé pour reprendre, aux religieuses, les institutions françaises établies sur l'île pour prendre en main les soins des quelque cinq mille marins qui, chaque année, se retrouvent dans la région pour ces grandes pêches.
Ce sont ces personnages que vous allez suivre tout au long d'un roman captivant et d'un réalisme incroyable, comme sait les écrire Manook.
Avec lui, vous allez vivre des moments de folie, celle des hommes et celle d'une nature qui a souvent le dernier mot.
À Islande, vous sentirez le vent, le crachin, vous allez vous perdre dans la brume, mais vous allez aussi être tenté de vous baigner nus dans les fameuses sources d'eau chaudes.
Parce que l'écriture de Ian, c'est tout cela qu'elle vous fait vivre et ressentir et vous allez vous attacher à ces personnages aux destins tragiques.
Après la Mongolie (Yeruldelgger) ou le Brésil (Mato grosso) je ne regrette pas ce voyage à Islande, même si, la mer agitée, je ne suis pas très fan...





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Inspiré de faits réels, ce livre nous conte l'histoire des pêcheurs paimpolais se rendant près des côtes nord-est de l'Islande pour la pêche à la morue. Nous sommes en 1904. Fervents catholiques, les français consomment beaucoup de poissons, seul met synonyme de jeûne lors des très nombreuses périodes de carêmes annuels. Auparavant présente près des côtes bretonnes, la morue s'est déplacée vers des eaux plus froides et c'est près du port de Fàskrùdsfjördur que l'histoire se passe.

En même temps, la France, république laïque et sous l'impulsion du ministre de la Marine, Camille Pelletan, décide de supprimer toutes subventions accordées aux curés et religieuses qui assistaient dans les hôpitaux et dispensaires maritimes, depuis 400 ans, les marins-pêcheurs victimes de naufrages ou de maladies.
La mise en place d'un nouvel hôpital français et la venue d'un chirurgien et d'infirmières bretonnes, attirés par des primes alléchantes, aurait pu susciter rancoeurs et jalousies dans ce petit port situé au bout du monde. Il n'en fut rien, face à l'étendue de malheurs que vivaient les pêcheurs. Gangrène, typhoïde, pneumonie, dysenterie, dues aux conditions de vie déplorables sur ces goélettes, véritables cloaques de merdes et de puanteurs propices aux pires maladies. En effet, les armateurs et capitaines étouffaient la honte de leurs hommes à grand renfort d'alcool emportés sur les bateaux en lieu et place de l'eau. Des hommes qui embarquaient, déjà malades, en l'absence de visites médicales obligatoires, attirés par la seule paye du retour ou de la prime de veuve ou d'orphelin pour leur famille, mais seulement quand l'armateur acceptait de payer la prime d'assurance avant le départ. Des hommes que l'on qualifiait de héros de la mer parce qu'ils étaient le chaînon indispensable à l'expansion économique du pays mais qui n'étaient en réalité que des forçats de la mer en raison des conditions infâmes dans lesquelles on les forçait à se maintenir tant qu'ils étaient utiles.

Ce livre est écrit comme un roman, avec des personnages plus qu'attachants et des histoires d'amour magnifiques. J'y ai vécu des naufrages, j'ai survécu à une tempête et aux bris des mâts, je me suis perdue dans un brouillard laiteux et opaque. Je me suis réchauffée aux sources chaudes, j'ai contemplé les fjords du haut des montagnes, j'ai bravé les sentiers escarpés, accrochée à la crinière volante de mon cheval. J'ai souffert et espéré avec les personnages et je me suis émerveillée devant cette nature rude que l'auteur décrit de manière flamboyante.
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Ian Manook est un conteur passionnant
Nous voici donc en Islande avec ces bretons de Paimpol venu faire fortune dans les eaux poissonneuses autour de l' Islande
Très vite l'affaire est entendue :ce sont les armateurs qui dictent leur loi et amassent les bénéfices
Les autres , les marins ,hormis le capitaine ne comptent pas
Accrochez-vous bien au début quand Ian Manook décrit les conditions de pêche et de survie à bord
C'est époustouflant. Quel talent pour nous immerger dans cet environnement hostile , puant , où ne compte que la quantité de poisson
Le pêcheur n'est rien .Aucune hygiène , des blessures, des maladies , des morts, voilà le quotidien
Il y'a tellement de dégâts que la France se sentira obligée de créer des dispensaires en Islande qui seront tenus par des congrégations religieuses avec les moyens du bord , quasiment rien hormis les prières et des soins dévoués et rudimentaires issus des coutumes locales
C'est là que se retrouveront deux pêcheurs bretons Lequéré et Kerano après le naufrage
Lequéré, instituteur breton avait été séduit par le récit de Loti, Pécheurs d' Islande qui décrivait à Paimpol de véritables héros à leur retour de pêche
Mais , il le dit lui-même
« Utopie prétentieuse des rêveurs,Je voulais me frotter,sur un bateau à la Rimbaud, à l' océan majestueux de Loti.Je ne savais pas encore la vague scélérate et l ‘ écume traîtresse.La mer, Eilin, ce n'est pas Loti, la mer c'est Hugo »
Oceanopo Nox, ô combien de marins, combien de capitaines…..
Eilin, c'est l'instutrice islandaise , francophone et cultivée qu'il a rencontré dans le petit village de Budir
Il y'a aussi Marie , une jeune infirmière bretonne qui accompagne le docteur officiel qui vient mettre de l'ordre et de la rigueur scientifique dans ce petit dispensaire
Conflit immédiat entre la religieuse qui est là depuis des années et les nouveaux arrivants, sûrs de leur savoir
C'est le seconde partie du roman beaucoup plus douce
Un peu d'amour, de beaux échanges entre deux personnages cultivés et beaucoup de questions
La première : retourner à Paimpol , reprendre la vie de marin pour l'un, rester en Islande où les gens sont simples dans leurs habitudes mais cultivés, adopter leur philosophie de vie bien éloignée des appétits mercantiles
C'est vraiment un très beau livre qui sait passer de la fureur à de beaux moments de sérénité
Une vraie réussite et un talent qui se confirme au fil des livres
Je vous conseille ce livre dur et subtil à la fois
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Il y a Pierre Loti, il y a le folklore et les chansons de marins, il y a la légende des courageux et intrépides pécheurs de morues, mais il manque un « Germinal » à la Zola sur ces bagnards de la mer. C'est le sujet de ce livre, qui remet les pendules à l'heure. A lire avant d'aller visiter un musée sur la grande pêche. Dans ce roman émouvant, inspiré de faits réels, Ian Manook nous confronte à la logique cynique des armateurs. Aujourd'hui ce sujet précis relève plutôt de l'histoire mais l'auteur a suffisamment voyagé pour savoir que le monde n'en a pas fini avec ce type d'exploitation. le style est classique et la lecture captivante.
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Paimpol en Islande.

Quoi ? la IIIe République, après l'exploitation de ses masses populeuses dans les mines et autres usines sidérurgiques de cette affreuse Révolution industrielle, traite aussi ses pêcheurs pire que des bagnards ?
L'ouvrage nous emmène au coeur de ses équipages bretons partant de longs mois "à Islande" pêcher la morue. L'atroce condition de vie de ces forçats est décrite sans concession, abominable de descriptions les plus crues, pleine d'une promiscuité hygiénique déplorable et maladive...et les conditions de navigation sur une mer tempétueuse et une météo glaciale ! L'enfer de Dante !
Heureusement, les habitants des rivages d'Islande, habitués de longue date aux naufragés de cette absurde entreprise, veillent aux rescapés. Sur cette terre, deux de nos "héros" sauront y trouver leur salut. Et peut-être y créer leur Paimpol "à Islande"...
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J'avais quitté Ian Manook avec son roman "Askja", la suite d'"Heimaey", deux romans qui se passaient en Islande. "Askja" m'avait un peu déçu car l'Islande faisait un peu, pour moi, office de carte postale. Je l'attendais donc au tournant.
Et là, l'écrivain voyageur réussit à nous passionner pour ce bout de terre volcanique. avec "A l'Islande", Ian Manook nous raconte la vie d'un hôpital francais à l'Est de l'Islande à Budir (faskrudsjfordur) au début du XXeme siècle. Cet hôpital avait été créé pour soigner les blessés des campagnes de pêche et recueillir les naufragés des bateaux qui s'échouaient sur les côtes. Avec peu de moyens, beaucoup de foi et d'engagement, on y soignait le scorbut, la typhoïde, le tétanos, et autres épidémies de dyssentrie des équipages...
Il décrit donc un pan de l' histoire de cette petite île perdue au nord de l'Atlantique et dont les mers regorgent de poisson.
Depuis la fin du XIXeme, en effet, des goélettes partaient des ports de Dunkerque, de Normandie et de Bretagne pour y pêcher la morue. On les appelait les Islandais, ou Terre-Neuvas (pour ceux qui pêchait dans ce coin).
A travers l'histoire de quelques marins et des infirmières de l'hôpital, Ian Manook décrit la vie de ces bagnards de la mer (démystifiant l'héroïsme loué par Pierre Loti dans "pêcheurs d'Islande").
Corentin Lequéré, second sur le Catherine, goélette gréée par des armateurs paimpolais survit au naufrage de celle-ci, avec Kerano et la plupart des hommes de son équipage. Lequéré est un révolté. Dans son récit des conditions de vie à bord. Il dénonce l'exploitation des marins et tout le folklore héroïque qui mène des jeunes Paimpolais à l'abattoir et dont la vie vaut moins que la morue, pour le compte de riches armateurs.
Kerano atteint de gangrène suite à un panaris non soigné va payer chèrement ce manque de soin.
Ces deux marins se retrouvent entre les mains de soeur Elizabeth et de Marie Drouet, la jeune infirmière nommée récemment par le ministère de la mer pour épauler le docteur Gunnarsson à l'hôpital.
Même si les Islandais se méfient de ces français qui agissent souvent comme des colons, Eilin, jeune institutrice islandaise, et Kerano vont se lier et partager leurs meilleurs moments. Lequéré va lui se laisser séduire par la soeur Elizabeth.
Ian Manook, à travers ce roman, décrit donc les conditions abominables de travail et d'hygiène à bord de ces bateaux et les caractères durs de ces pêcheurs, souvent influencés par la religion et les légendes. Il écrit aussi formidablement bien la mer, magnifique, puissante, sauvage et dangereuse. Les femmes sont également mises à l'honneur, libres, fortes et courageuses. Il y a du Jack London ou du Victor Hugo (les travailleurs de la mer) dans ce roman qui prend souvent des airs de récit. Ce format plutôt court (283 pages) est politique parfois, profondément humain, et va à l'essentiel pour nous passionner. Ceux qui aiment la littérature maritime seront comblés, et pour les autres c'est un très beau roman historique qui se dévore (avec un verre de Brennivin) !
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Quand Ian Manook traite d'un sujet, il y met les formes. D'une écriture riche au vocabulaire soigneusement choisi, ce roman nous présente un pan d'histoire à la saveur révoltante. Il nous fait voguer au travers d'un périple tragique qui mêle harmonieusement récit marin et beautés et histoires d'Islande, rôle et responsabilité de l'église, cruauté des hommes poussés par l'avidité, et la force de l'amour.
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