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EAN : 9782848761893
414 pages
Philippe Rey (18/08/2011)
3.32/5   28 notes
Résumé :

Aujourd’hui, en Inde, on ne dit plus « intouchable » mais dalit. Un mot, toutefois, suffit-il à changer la donne ? Ce n’est pas l’avis d’Ayyan. D’un côté, du sien, une pièce minuscule partagée avec sa jeune épouse et son fils dans une exécrable cité de la banlieue de Bombay, tandis qu’il exerce un emploi de secrétaire dans un institut de recherche... >Voir plus
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Ayyan, Intouchable, travaille dans un célèbre institut et est bien évidemment entouré de scientifiques et professeurs, des Brâhmanes censés tout savoir. Si la loi interdit désormais de considérer les Intouchables comme des parias, la réalité est toute autre et Ayyan ne supporte plus l'injustice et le mépris constant que lui et sa communauté subissent quotidiennement. Lui vient alors l'idée de faire passer son fils de onze ans pour un vrai génie afin de s'attirer la lumière et surtout de se venger d'un système qu'il exècre...

Sur un ton espiègle, Manu Joseph nous présente une Inde moderne toujours scindée par un système de caste hérité dont elle a un mal fou à se défaire. Ayyan, un homme intelligent mais né Dalit (Intouchable) a peu d'espoirs pour sa vie à cause de la caste dans laquelle il est né. En faisant de son fils le nouveau Einstein, il secoue les pensées, se moque des idées reçues, raille ouvertement l'idée que seuls les Brâhmanes peuvent détenir la connaissance et en être dignes. Dans ce roman, l'auteur nous présente des scientifiques qui possèdent le statut mais tourne beaucoup en dérision leurs expériences et discours. Cette histoire démontre que faire partie de la caste historiquement la plus méprisable ne rend pas moins intelligent et que tout un chacun est un être humain à part entière.
Certes, pour parvenir à ses fins, Ayyan use de stratagèmes pas très glorieux, mais c'est la société indienne elle-même qui lui offre sur un plateau ce qu'il se permet de faire. En cela, c'est une fable contemporaine très intéressante et assez bien foutue.
L'on pourrait néanmoins reprocher plusieurs choses à ce récit, surtout sur le fond. On comprend que le but est de montrer que les Intouchables ne sont pas de la merde face aux Brâhmanes. Mais pour parvenir à cette conclusion, l'auteur tourne tellement en dérision les scientifiques que ça en devient vraiment trop caricatural. La Science a toujours tâtonné pour atteindre la connaissance et les avancées technologiques, voire édifier des règles physiques et biologiques. Il y a toujours eu des scientifiques moqués pour leurs idées, mais certaines ont révolutionné de manière catégorique la vision du monde d'aujourd'hui. Alors oui, parmi les milliers d'hypothèses soulevées chaque années, certaines ont de quoi faire rire. Mais critiquer la Recherche ne fait pas avancer le schmilblick, et surtout pas le monde. Peut-être Manu Joseph va-t-il un peu trop dans ce sens en suggérant que les scientifiques étudient des choses qui ne servent à rien et dépensent des milliards sans réfléchir ou de manière raisonnable, et surtout en insinuant qu'ils pensent tous qu'ils sont plus utiles et plus intelligents que le reste de la planète. J'accorde néanmoins à l'auteur le fait qu'il s'intéresse majoritairement au territoire indien, et donc relie cette interprétation au système des castes précédemment cité.
Ensuite, l'on pourrait croire qu'il dénonce un problème actuel et qui a toujours été actuel : la faible proportion de femmes dans le corps scientifique. Grâce à son personnage d'Oparna, trentenaire biologiste qualifiée qui détonne dans le milieu purement masculin de l'Institut avec ses talons qui résonnent dans les couloirs, il critique allègrement le caractère souvent machiste de ce milieu, notamment grâce aux scènes d'hommes dans l'Institut qui imaginent ce qui se trouve sous son sari, ou apprécient le mouvement de ses cheveux, ou quand Oparna préfère se taire et rester discrète lors de colloques de peur de se faire encore plus remarquer, les femmes devant toujours plus justifier leur présence dans de tels milieux. Or, alors qu'on croit avoir affaire à un personnage féminin qui défie les lois machistes et tente de s'imposer légitimement, Manu Joseph la transforme, au fil de son histoire, en simple dame vengeresse qui punie l'homme qui l'a trompée et devient ainsi une menteuse et une manipulatrice. Bonjour l'image de la femme !!! Quelle déception que de voir ce personnage prometteur être encore une fois stigmatisé et entériné dans cette vision de la femme dans encore beaucoup de pays orientaux comme la tentatrice, la faible, l'antithèse de la vertu ! Les évènements du bouquin annihilent grâce à ces faits tout lien femme/intelligence ou femme/savoir. Et le pouvoir qu'on espérait qu'elle ait au regard de la science se voit transformé en pouvoir sur les hommes, un pouvoir dévastateur. Notons d'ailleurs qu'après son méfait et ses mensonges, Oparna se fiche complètement de sa carrière et ne semble pas vouloir garder une place pourtant méritée au vu de ses diplômes et son expérience, tout cela à cause d'une histoire d'amour avortée. La femme, encore reléguée au seul pouvoir de l'amour et du coeur... Plutôt réducteur, comme vision... Sans compter que toute l'histoire d'amour entre Oparna et le directeur du centre vient encore plus jeter du discrédit sur le monde scientifique...
C'est justement cet aspect, qui au fur et à mesure de mes lectures de littérature indienne, m'exaspère. Ce statut de la femme, cantonnée à jongler avec les sentiments et le sexe plutôt qu'avec sa tête. Ohh, je ne suis pourtant pas une féministe pure et dure, tout comme je sais bien que le statut de la femme en Inde n'a (encore) rien à voir avec le nôtre en Occident (et encore). Il reste toutefois, et quoi qu'on en dise, fatigant de voir les personnages féminins enfermés dans les fonctions du coeur, généralement pris violemment pendant des scènes de sexe (ce roman ne fait pas exception) et dont le corps est continuellement convoité et admiré et décrit, presque léché par la simple pensée.
L'intrusion de l'histoire d'amour entre Arvind et Oparna, justement, et même si elle est nécessaire pour le déroulement de l'intrigue, vient beaucoup casser le rythme instauré par la tromperie organisée par Ayyan. Elle occupe presque la moitié du récit, et pendant longtemps on ne voit pas vraiment l'intérêt. Vu sa nécessité révélée vers la fin du roman, l'on pourrait du coup dire que l'auteur aurait pu raccourcir de beaucoup ce passage. Son propos n'en aurait pas été moins compris.
Malgré les critiques que j'ai pu faire, cela reste un roman assez intelligent, qui soulève de manière plutôt vive et taquine une problématique grave dans laquelle l'Inde est embourbée. Il offre depuis un angle original une vision complémentaire fictive mais pas tant du pays.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Ce roman navigue entre deux mondes : celui d'Ayyan, un dalit qui travaille comme secrétaire dans un Institut de recherche et qui aspire à une meilleure vie à la fois pour lui et pour son fils, Adi, qualifié de petit génie mais qui est finalement un enfant normal se laissant emporter par le jeu dangereux de son père visant à lui assurer une plus belle place dans la société ; et celui des savants de l'Institut, des brahmanes (la "caste" indienne supérieure) qui se chicanent autour de la recherche de vie extraterrestre, et dont les luttes de pouvoir sont innombrables.

Il est difficile en réalité de résumer ce livre en quelques lignes, tant l'intrigue est riche et tant l'entremêlement des histoires de tous les personnages peut paraître complexe. On y trouve de tout : de la science; de l'ambition; de l'amour et un adultère; une supercherie extraordinaire, etc. En bref, une subtile comédie humaine, une danse jubilatoire entre tous les aléas et écueils de la vie, qui donne à ce roman un souffle très particulier.

J'ai eu un peu de mal à accrocher à ce roman, peut-être en partie car je ne lisais au départ que quelques pages par soir. Mais s'il met quand même du temps à démarrer, à nous "séduire", la deuxième moitié est bien plus entraînante, plus dynamique et c'est grâce à elle que je finis par avoir un avis positif sur ce livre ! Car il est vrai qu'au début, je ne savais pas vraiment où il voulait en venir, et je n'étais d'ailleurs même pas sûre qu'il le savait lui-même ... mais en fait la première partie est une véritable préparation du feu d'artifice qui explose dans la deuxième moitié du livre. Comme s'il avait patiemment tissé tous les fils, lentement, et qu'ils se démelaient brusquement en une véritable apothéose d'intelligence (celle d'Ayyan Mani), de subtilité (de la part de l'auteur) et de soulagement (de la part du lecteur). Manu Joseph se montre ici un maître incontestable de la narration.

Dans un style fluide et plaisant, il nous livre un roman extrêmement riche, qui aborde de très nombreux thèmes, et qui invitent à la réflexion (et pas seulement sur la société indienne, mais aussi sur les mécanismes qui régissent toutes les sociétés; sur les erreurs et les petitesses humaines qui sont hélas universelles). Avec ironie et vivacité, il s'attaque au système des castes, nous offrant un conte satirique savoureux.

- La plus grande partie du roman nous éclaire sur la situation des dalit (qui signifie "opprimé" et remplace celui d'"intouchable", montrant ainsi une certaine évolution des mentalités ...) en Inde, qui, si elle s'est améliorée ces dernières années, reste encore marquée par les profonds préjugés et fractures qui hantent la société indienne. On le voit bien évidemment par la relation entre Ayyan et les brahmanes de l'Institut, pour qui il est invisible, sauf quand son fils est qualifié de génie : alors, pour eux, ce serait une grande perte que de le laisser entre des mains dalit ... La scène la plus cruciale passe pourtant presque inaperçue : lorsque les brahmanes critiquent les dalit, mais aussi les femmes, etc. faisant preuve d'un racisme grossier et peu digne de soi-disant intellectuels. Et pourtant c'est cette scène qui va déterminer la fin du roman ...

- L'histoire d'un homme, Ayyan Mani, qui est d'une rare intelligence mais non exploitée, cantonné comme il l'est dans sa "caste" (castes qui n'existent plus officiellement ...). Sa peur de voir son fils suivre le même chemin, alors qu'il est aussi intelligent, mène en réalité toute l'intrigue. C'est le personnage pivot, qui domine les autres, y compris les brahmanes, jusqu'à la dernière page. Certes au départ il est un peu antipathique, très amer quand à la vie qu'il mène. Mais en réalité cette amertume laisse place rapidement à une lucidité féroce vis-à-vis de la société indienne. Il est conscient de la manière dont les brahmanes le traite, mais au fond de lui, il se moque d'eux et va prouver à la fin qu'il a bien plus de valeur que ces scientifiques enfermés dans leur tour d'ivoire. Entre espoir d'une vie meilleure, espiéglerie et fatalisme, Ayyan montre que le destin n'est pas écrit par avance mais qu'un petit grain de sable peut tout changer.

- L'histoire d'un autre homme, Arvind Acharya, directeur de l'Institut, que l'on suit par le regard d'Ayyan, son secrétaire, qui l'espionne constamment. Un homme qui va se laisser emporter vers l'adultère, au départ détail infime mais qui va se transformer en un véritable ras-de-marée et emporter tout ce qui compte pour lui ... Même si je n'ai pu m'empêcher de ressentir du mépris pour lui qui est persuadé qu'il existe des bactéries extraterrestres dans l'espace et lancer un Ballon pour tenter de les attraper.

Ce qui est fort finalement dans ce livre est le décalage entre ces deux personnages, qui sont centraux, dans leur vie, leurs préoccupations, leurs ambitions.

Certains aspects de l'Inde ne sont qu'évoqués mais ils ne passent pas inaperçus :

- Un thème abordé en passant : l'immolation des femmes par leurs maris. Sans s'y attarder, mais sans cacher non plus la réalité, Manu Joseph l'évoque "juste" en passant. Tout comme la pression exercée par Mère Chasteté pour tenter de convertir Ayyan au catholicisme...

C'est donc par petites touches que procède l'auteur pour finalement nous brosser un panorama gigantesque, précis et extrêmement efficace de l'Inde d'aujourd'hui. Une Inde qui oscille entre tradition et modernité; entre croyances populaires et savoirs scientifiques; sur laquelle se promène le regard dur, sans concession, de Manu Joseph.

Dans tous les cas, il fera partie d'un de ces romans qu'il faut lire plusieurs pour en comprendre tous les sens et en apprécier pleinement la richesse. Indispensable pour appréhender l'Inde d'aujourd'hui.
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L'Inde est un pays qui m'est totalement inconnu et c'est par le biais d'Ayyan ainsi qu'avec les autres protagonistes de ce premier roman étranger que j'ai pu découvrir, un peu au-delà des clichés, une société qui se veut de plus en plus occidentalisée, mais encore largement engluée dans ses traditions et son passé.
Exotisme, dépaysement, mais l'ensemble est tout sauf low-cost ! Ayyan, notre guide principal, ne veut point se brader, il a conscience de sa valeur et de celle de son fils, Adi (qualifié de petit génie et enfant handicapé car sourd d'une oreille). On ne peut pas vraiment lui donner tort car le système des castes ainsi que la loterie des naissances ont bloqué le chemin de la réussite à trop de véritables hommes et femmes, si ce n'est de génie, de qualité tout au moins. Il est temps de réparer les injustices, de remettre les éléments à leur juste place, d'être enfin lucide et clairvoyant. Enfin tout ceci est assez facile sur le papier car dans les faits, c'est autrement plus complexe.
L'homme n'est pas bon par nature, du moins, ses actes de manière générale ne le laisse pas vraiment supposer même si les bonnes volontés ne manquent pas non plus. Disons donc que Manu Joseph résume cela assez bien en écrivant : "Car ce que tout homme voulait vraiment, c'était être plus important que son voisin."
Il ne faut surtout pas être du côté des loosers ! Cependant Ayyan, trop porté par ses griefs de petit secrétaire est allé loin, très loin ! Il aurait dû stopper sa machine infernale bien plus tôt, mais il n'a pu s'y résoudre et a tenté sa chance jusqu'au bout.
A trop vouloir changer le court des évènements, on risque fort de se faire dépasser par ces derniers. Reste pourtant qu'un retour à la "normalité" peut être insupportable. Pire que la mort ! L'immobilité n'est-elle pas plus terrible encore que la fuite en avant sans contrôle ? Question de perception et de tempérament sans doute. A vous de voir où vous vous situez.

Comme dans la vraie vie, on oscille dans ce texte entre le sordide, la joie, la légèreté, l'intelligence, la bêtise, la beauté, la laideur… etc. C'est la comédie humaine version indienne bien loin de Bollywood, de ses paillettes, de ses chansons, de ses histoires d'amour qui se terminent en véritables contes de fées.
Cet ouvrage se lit aisément, avec plaisir et pour un premier roman, on se dit que voici un auteur plein de promesses. Il a gardé la simplicité du style journalistique, mais c'est assez étoffé pour que l'on parle alors de littérature. Un juste compromis.

J'ai aimé le regard d'Ayyan (mais aussi celui des autres protagonistes qui prennent le récit en main tour à tour) qui n'est pas toujours tendre (loin de là même) avec ses semblables alors que lui-même n'est point parfait. C'est tout au moins comme cela que je l'ai perçu.
"L'Homme est un loup pour l'Homme" et ce que l'on découvre à travers les sites, les lieux où évoluent les protagonistes de ce récit, ne contredit pas cette expression. Chacun tirant la couverture à soi. Ces luttes intestines sont risibles, ridicules, mesquines et inutiles. C'est contre productif et pourtant banal. Je trouve que l'on touche là quelque chose de plus global et que l'on ne peut pas seulement appliquer à l'Inde. C'est d'ordre planétaire. le monde marche sur la tête et il serait temps d'y remettre de l'ordre.

Dans "Les savants", on aborde des sujets graves comme les épouses immolées par leurs époux. Pratique d'une cruauté sans nom !!!! Comment cela peut être encore possible de nos jours ?!!!!! Manu Joseph ne s'y attarde pas vraiment, mais ne cache pas cette réalité. C'est mieux que de la passer sous silence même si c'est très peu. Cela tranche encore un peu plus avec Bollywood. D'ailleurs au fil de la lecture, ce ne sera pas le seul détail noir qui entachera la belle carte postale et c'est tant mieux. On ne vit pas au pays des Bisounours.
La religion sera assez présente et si pour une fois, on se tiendra un peu éloigné des fanatiques (encore que), nous aurons l'occasion de voir que pour obtenir des conversions, on n'hésite pas à faire miroiter les avantages financiers liés à telle ou telle confession. L'argent est le nerf de la guerre, mais doit-on brader pour autant Dieu, sa foi et tout le reste ?

Dans ce roman, on évolue dans un autre pays que l'on ne connait pas forcément (du moins, moi, je ne le connaissais pas plus que cela) et dans le milieu scientifique, mais je vous rassure immédiatement, on n'a nul besoin d'avoir bac+12 ou d'être un génie des mathématiques ou de la physique pour tout comprendre. Manu Joseph nous offre là des portraits humains façonnés par les traditions, mais également par des courants plus modernes, plus contemporains, plus occidentaux (vive la mondialisation) et donc il y a des télescopages. C'est à la fois un récit exotique et familier, chaud et froid, sucré et salé que je vous invite à découvrir fin août 2011 lors de sa sortie. Vous devriez y trouver votre bonheur.
Lien : http://espace-temps-libre.bl..
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Roman qui dévoile une facette de l'Inde actuelle, traversée de contradictions, entre modernité et poids des traditions
Ce premier roman de Manu Joseph laisse une impression à la fois familière et exotique. Les enjeux de pouvoirs et rêves de promotion sociale restent universels mais la société indienne fonctionne selon des codes qui ne nous sont pas familiers.
Ayan, un dalit, nouveau nom, plus politiquement correct donné à la caste des intouchables est le secrétaire du directeur d'un des plus éminents instituts de recherche d'astrophysique indien. Père d'un jeune garçon de onze ans, il ambitionne pour son fils un avenir meilleur que le sien, rêvant de le voir rejoindre les équipes de chercheurs de l'institut. D'un jeu qui peut paraître innocent au départ, il convaincra son entourage que son fils est un génie. Parallèlement, Arvind, le directeur issu de la caste des Brahmanes poursuit des projets scientifiques insolites, prometteurs ou insensés qui pourraient lui ouvrir les portes du Nobel.
Le roman met en scène Ayan et sa famille, son quartier pauvre dans un bidonville de Bombay et Arvind, Brahmane, directeur fantasque et sûr de lui-même dont la destinée correspond aux parcours des castes supérieures de l'Inde. Ces deux univers se côtoient, se croisent sans se mêler. Bien qu'évoluant dans un milieu scientifique, ce roman est n'est pas un ouvrage de vulgarisation sur l'astrophysique mais bien un roman social qui décrit des interrelations entre des individus porteurs des ambitions et travers de leurs castes respectives.
Le roman passe par plusieurs registres : le sordide avec les bribes de descriptions de conditions de vie des dalits, mais aussi des femmes indiennes plus généralement, la dérision et l'humour avec les mensonges et stratagèmes montés par Ayan pour convaincre les institutions des talents de son fils, la comédie humaine enfin avec les épisodes amoureux d'Arvind et les rivalités ambitieuses des chercheurs de l'institut.
Portrait partiel de l'Inde, microcosme à l'échelle de ce sous continent d'1.3 milliard d'habitants, l'auteur nous montre dans un texte simple et efficace les relations entre les individus, les préjugés et les tensions qui s'exercent à tous le niveau : dans les familles entre maris et femmes, dans les cercles de travail, entres les classes sociales. C'est une société dure et ambitieuse qui nous ait décrite, loin des clichés bollywoodiens ou européens.
C'est un roman distancié et critique, sans concession dont l'attrait est aussi l'humour et l'oeil amusé, voire ironique que l'auteur porte sur ses contemporains. C'est aussi un roman très riche et foisonnant dont les fils se tissent progressivement pour terminer dans un dénouement spectaculaire.
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Il est malin et malicieux, le premier roman de Manu Joseph, journaliste indien réputé pour ne pas utiliser la langue de bois. Centré sur deux personnages principaux, un dalit (intouchable) et un brahmane (classe dominante), le premier étant le secrétaire/assistant du deuxième, scientifique "nobélisable" et directeur d'un institut de recherche prestigieux, Les savants s'attaque au système des castes, avec une vivacité et une ironie qui font tout le sel de ce livre qui a le bon goût de ne pas céder à l'exotisme facile, ce qui ne l'empêche pas d'être furieusement divertissant, par ses côtés ludique et narquois, dans l'illustration de l'éternel combat du pot de terre contre le pot de fer. Comme dans Les fabuleuses aventures d'un indien malchanceux ..., Les savants ne brille pas par son style, mais par sa construction, ses intrigues parallèles qui se rejoignent, et la description savoureuse d'un microcosme, celui de scientifiques de renom qui se livrent une lutte sans merci pour le pouvoir. S'il est parfois alourdi par des discussions ésotériques entre savants, le roman est irrésistible quand il évoque les stratagèmes de son héros dalit qui tente de faire passer son fils pour un génie des sciences, ce qui permet à l'auteur de se gausser de la rigidité, du conservatisme et des hypocrisies d'une société indienne toujours régie par des règles archaïques. Réaliste, moqueur, léger sur des sujets graves, Les savants n'a pas la prétention de se hisser au niveau des meilleurs romans sociaux indiens. Plutôt conçu comme un conte satirique, il donne une vision lucide d'un pays en pleine mutation, pétri de contradictions et de paradoxes, qui pourrait bien être à la veille d'une vraie révolution culturelle.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
On ne peut pas être exactement comme on veut être si on souhaite garder sa femme.
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Toute sa vie il avait tenté de dissimuler les tourments d'une expérience enfantine paranormale...
Sa réputation ayant volé en éclat, en fait, il était libéré.
Car c'est nous-mêmes qui accordons à autrui le pouvoir de nous humilier.
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Car ce que tout homme voulait vraiment, c'était être plus important que son voisin
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Video de Manu Joseph (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Manu Joseph
Most Indian writers make guesses about poor and weak: Manu Joseph In this interview, writer-journalist Manu Joseph opens up his views on satire and sarcasm, activists and their moral refuge and the perceived insensitivity in his writings. Sous-titres en anglais
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