Il a bien de la chance de savoir d'avance. C'est parce qu'il est petit. Moi aussi quand j'étais petite j'étais tout le temps sûre ; tandis que maintenant je suis tout le temps à me demander.
J'ai écrit le titre à l'encre de Chine, il s'appelle "Le château de la fée" et il a 43 pages. Maintenant je vais en écrire un autre, une histoire de lutins. C'est un peu comme si j'étais un écrivain en somme. Malheureusement Maman me coupe la lumière à 10 heures, fâchée, pour que je dorme, et ça tombe toujours au moment où ça marche le mieux. Je vais essayer de piquer une pile électrique au bazar. Mais ce n'est pas drôle d'être un écrivain quand ta maman ne te laisse pas écrire.
Tu as l'air bien plus vieux quand tu as une montre.
C'est bien d'écrire tout ce qui arrive et puis c'est amusant. Plus tard j'aurai un vrai stylo qui marche tout seul.
Il m'a dit qu'il préférait quand même sa flûte. Remarque, il en joue tellement bien maintenant ! Des fois, si la fenêtre est ouverte et que des gens passent, ils l'écoutent. Une fois une dame a dit à son mari "mais attends, écoute un peu, c'est si joli !"
Il y invente des choses, des tristes et des gaies qui font comme une danse. La plus jolie s'appelle "chanson de la pluie qui tombe sur des roses" et tu croirais presque entendre les gouttes.
Quand on lui fait des compliments il dit que ce n'est pas lui, mais sa flûte qui est magique !
Le Chevalier il dessine bien, il sera peintre plus tard parce que son farfadet est dans son crayon. Le mien est dans mon porte-plume pour écrire des histoires et celui de Pascal dans sa flûte. Bygrec dit que tout le monde en a un quelque part. Mais sauf Maman. Quand on lui demande elle rit et elle dit "moi je n'en ai pas je n'ai pas le temps".
Un jour j'irai. Mais il dit, n'en parle pas, c'est un endroit secret de merveilleux.