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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ça cause de nos nuits infranchissables qu'hantent nos fantômes, de nos fêlures à jamais ; ça confie aussi que tout ce qui ne me tue pas m'affaiblit.

C'est bien utile, ça explique la mécanique de nos séparations, la subtile économie de nos conduites d'échec. Ça aide à diminuer les regrets.

C'est une lucidité implacable qui, preuves à l'appui, raconte notre parcours humain depuis son époque archaïque, ontologiquement balisé de pertes, de ruptures consubstantielles à l'existence, jusqu'à, j'imagine, l'ultime, celle dont nous serons un peu empêchés, inquiétante étrangeté d'un sujet absent à lui-même et que seul l'Autre pourra envisager.

Ça dit encore que cet Autre lorsqu'il nous quitte emporte aussi ce qui nous constituait et qu'ainsi "dépouillé" (il arrive qu'on y laisse sa peau) on se découvre nu et vide de tout ce qui nous nourrissait dans l'échange et le partage.

Ça révèle alors que "je" est un autre et même plusieurs autres desquels, nanti de ces identités plurielles, il doit tenter d'extirper de substantielles ressources.

Ça parle aussi de nos loyautés, souvent filiales, accablantes, dont nous croyons être les obligés, fardeaux dont il faudrait savoir se décharger.

Ça dit enfin qu'il faut trouver de la joie dans le sourire des enfants pour y puiser la force d'affronter l'incertitude de la vie et le courage d'être. Mais il n'y a guère que Bobin pour croire à ces consolations.
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Oui, je suis d'accord avec Claire Marin lorsqu'elle affirme que notre vie n'est faite que de ruptures. Déjà notre naissance, nous dit-elle, est une rupture. Pour le nouveau-né, mais aussi pour les parents qui vont devoir rompre avec leur ancienne vie. Et tout le reste de notre vie sera une succession de ruptures. Amoureuses, familiales, professionnelles, liées à la santé... Ruptures en tout genre qu'il faut savoir accepter. L'auteur aborde également nos dissociations, l'éclatement de notre moi en plusieurs nous-mêmes, qui fait que l'on peut recommencer une autre vie. A grand renfort de références philosophiques, Claire Marin nous offre une réflexion tout à fait accessible, sur notre existence.
Je me souviens, d'une déclaration de Laurence Parisot, la présidente du Medef, il y a quelques années. Elle disait, que les employés devaient pouvoir accepter l'insécurité professionnelle tout comme l'insécurité sentimentale. Dans ce discours ultralibéral, elle voulait signifier que les individus ne sont que de simples objets considérés uniquement comme source de travail et donc de profits pour les entrepreneurs et actionnaires et pouvant être licenciés au bon vouloir de l'employeur. Parfait exemple de rupture possible. Mais au-delà de ces considérations sociales, je vois aussi dans les ruptures la preuve de l'impermanence et le fait que nous ne maîtrisons pas grand chose de notre vie.
si le sujet vous intéresse, je vous recommande la lecture de ce livre.
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Ruptures au pluriel, de nombreux thèmes sont abordés dans ce petit essai : la rupture amoureuse bien sûr, celle qui telle une lame de fond, nous laisse pantelant et sur le flanc, qui devient douleur physique, la rupture avec notre famille parfois nécessaire, la rupture avec un être aimé lorsque la maladie ou la vieillesse l'a tellement atteint qu'il faut faire son deuil avant la mort, la rupture avec ses croyances passées, la rupture de l'unité de notre être …

Bien évidemment, ces réflexions parleront à quiconque car nous avons tous dû faire face à ces épreuves, certaines très douloureuses, d'autres qui font partie intrinsèque de la vie comme la naissance, rupture avec la mère.

L'auteure met des mots clairs sur nos ressentis et parsème son ouvrage de références littéraires ou philosophiques. N'attendez surtout pas un ouvrage de développement personnel qui vous démontrera que la rupture est l'occasion d'une renaissance ! Dans cet essai assez court, il est surtout question de rupture existentielle et l'auteure n'écrit pas pour nous donner des solutions de mieux-vivre. Elle décrit la douleur simple, parfois implacable que causent certaines situations auxquelles nous serons tous confrontés.

Je n'ai rien appris de totalement nouveau mais j'ai aimé la manière claire et intelligente dont Claire Marin présente son vaste sujet.
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Rupture(s) est l'un des essais les plus médiatiques de 2019, en raison de sa thématique évidemment, mais aussi pour la qualité de vulgarisation de l'auteure qui rend sa philosophie accessible à tous.

Le thème est tellement d'actualité que je ne sais même pas par où commencer. Aujourd'hui, tout est rupture : rupture écologique, rupture climatique, rupture économique… accompagnées en permanence de la rupture au niveau micro : savoir rompre, les bienfaits de la rupture, rompre pour devenir soi. Bref, à tout bout de champs, il faut rompre : rompre le modèle dominant, rompre sa routine, rompre ses habitudes, rompre son contrat de travail pour « suivre ses rêves », rompre sa relation amoureuse pour « devenir qui nous sommes » … Et même si vous êtes rompu(e) (que cela n'est pas votre décision) par l'amour, la maladie ou le destin, le mythe de la page blanche, de l'éternel recommencement, de l'invention qui sort du chapeau vous surplombent : rompre ou être rompu, que l'on veuille ou non, que cela soit conscient ou non, c'est tendance, ou tout du moins banal.

Claire Marin commence son essai par un parti pris que j'ai tout de suite beaucoup aimé, à l'encontre du développement personnel épuisant qu'on entend H24 et qui me donne envie de balancer des gifles tellement je n'en peux plus. le parti pris, c'est celui-ci :

« Je résisterai dans cet ouvrage, comme dans les précédents, par entêtement ou par conviction, à la tentation de l'optimisme en balayant d'emblée les lectures simplificatrices et positives de la rupture et du recommencement. On aimerait y voir l'occasion d'une vie neuve, d'une page blanche, de donner une valeur rétrospective à un échec en le transformant en savoir, en richesse, en expérience. Il y aurait des vertus de l'échec. Vraiment ? Mais la rupture n'est parfois qu'un gâchis, un manque de courage, une pure lâcheté, un renoncement. le constat d'échec d'un couple, d'une famille, d'une amitié, d'une politique, d'un projet. Et l'échec n'est souvent rien d'autre que lui-même, pauvre, décevant, un pur raté. La plupart des échecs ne nous apprennent rien. Pire, nous nous enlisons souvent dans le bégaiement des mêmes échecs, comme s'ils étaient inévitables, et ce, dans une jouissance paradoxale de leur répétition presque rassurante. […] Je ne suis pas, à la veille d'une nouvelle aventure, plus aguerri par les déroutes précédentes, mais bien susceptible de nouveau de me perdre dans les mêmes chemins de traverse. Il est possible que je n'aie finalement rien appris. »

C'est un peu dur, lu comme cela, mais le cheminement est intéressant et nous emmène à des questionnements identitaires forts (mais n'est-ce pas là la magie de la philosophie ?).

Tout d'abord, et c'est un préambule nécessaire, Claire Marin distingue la rupture de la séparation. Dans la séparation, on reprend ses billes, on repart comme on est venu, tel(le) quel(le). La rupture est un lien qui rompt, et jamais à l'exact moitié de la relation. On ne repart pas comme on est venu, mais un peu agrandi ou diminué par la relation d'origine : c'est une déchirure, et une déchirure, ce n'est jamais nette. Je ne repars pas indemne, comme s'il ne s'était rien passé. Il y a une trace, des séquelles, ce n'est pas un évènement neutre. Dit plus clairement : cela ne peut pas ne rien nous faire, puisque l'on emporte avec soi, ou on laisse sur place, quelque chose. Il ne faut pas minimiser les ruptures. Elles sont toujours une source de souffrance. Même quand on les a voulues et décidées, elle reste une source d'angoisse, de désarroi, et souvent de tristesse. Il faut apprendre à vivre avec ce qui n'est plus et ce qui est désormais et ce n'est jamais une chose facile.

C'est là où l'auteure prend une voie différente des discours ambiants. Les discours ambiants vous diront : ce n'est pas facile mais ça vaut le coup car vous allez vous retrouver, devenir qui vous êtes, recréer votre vie à votre image, blabla, blabla…
Perplexité de l'auteure.
Me retrouver ? Devenir qui je suis ? Créer une vie à mon image ?
Des formules qui pour elle ne veulent rien dire philosophiquement et intrinsèquement. Sommes-nous une personne que nous pouvons perdre puis retrouver ? Non. Pour Claire Marin, nous sommes une multitude de personnages qui cohabitent, certaines personnalités prenant le relais ou en doublant d'autres selon les moments de la vie, sans que cela ait nécessairement du sens ou un fil conducteur. On cherche un sens à tout, une unité de chair et de faits, mais cela reste un fantasme. Il n'y a pas un moi, mais des « moi », qui s'ajoutent, disparaissent, réapparaissent, sans queue ni tête, selon mes lassitudes, mes envies, mes aléas et tant de choses que l'on ne peut nommer. Mais pourtant, certains rompent avec des situations en se disant « que ce qu'ils vivent ne leur ressemble pas », que « ce n'est pas eux », que ce personnage qu'ils regardent évoluer n'a rien à voir avec la vie qu'ils devraient vivre.
Ici, la philosophe nuance son propos. Oui, dans certains cas, il y a un élan vital qui nous pousse à un certain alignement, et donc à rompre. Oui, parfois, le rôle endossé est trop décalé de sa personnalité et de ses envies fondatrices, il faut rompre pour vivre. Mais il ne faut pas être dupe, ce n'est pas toujours le cas, et l'élan vital a aussi bon dos pour empêcher de voir ce que l'on ne veut pas voir : l'espoir de se fuir soi-même : « Rompre est alors moins la quête d'une vérité intérieure qu'une tentation du vide, une jouissance de l'effacement ou de la négation de soi, une libération dans la disparition. […] Toute nouvelle vie ne serait finalement qu'une modulation de l'ancienne. Peut-on créer par la rupture amoureuse une existence radicalement neuve ? de quoi, de qui, pouvons-nous réellement nous défaire ? »

Il ne s'agit pas ici de prêcher contre la rupture. Il s'agit simplement de remettre la rupture à sa place, ce qu'elle est : une déchirure. Ni une promesse d'avenir joyeux, ni l'ouverture d'une descente aux enfers.

L'auteure continue son argumentation avec les ruptures liées aux maladies, ou aux aléas. Car finalement, la plus « grosse » rupture (si tant est que cela ait un sens), est la rupture que l'on a avec notre propre croyance : celle que rien ne peut nous arriver. Jamais nous perdrons un enfant, jamais nous n'aurons un grave accident, jamais ceci, jamais cela, cela arrive aux autres. Jusqu'au jour où… Et là, quelque part, la rupture avec notre croyance d'immortalité arrive. Et c'est ici que le choc se fait. Il y a un avant et un après. Comme dans toutes les ruptures. Pas un après mieux qu'un avant, pas un avant forcément mieux que l'après… Il y a juste eu « rupture » et il faut dorénavant composer avec.

Rupture(s) est un très bel essai. le style est un peu répétitif, on aurait parfois compris la même chose avec moins de mots pour le dire, mais cela fait partie de la dialectique de Claire Marin et c'est bien. Il y a également beaucoup de jolies références littéraires que j'ai appréciées. Mais finalement, ce qui m'a le plus plu, c'est ce détachement sur un sujet tendance, cette remise de l'église au centre du village : il n'y a pas d'un côté les bonnes ruptures qui font grandir, et de l'autre les mauvaises ruptures. Il n'y a pas non plus le culte de la rupture comme début d'une nouvelle vie (forcément mieux). Il y a juste la rupture en tant que telle : ce qu'elle est, ce qu'elle signifie. Et la possibilité pour tout à chacun de continuer une vie où l'on s'accroche aux moments de joie qui restent à vivre, si on en est capable.

Je ne comprends donc pas les critiques de Madame Figaro ou Elle ou tous les autres magazines féminins qui ont des unes du type « Rompre pour être heureuse », je pense très sincèrement que l'ouvrage n'a pas été lu, ou alors on n'a pas du tout lu la même chose :



Je me reconnais plus dans l'interprétation qu'en a fait Libération :



Bref, un essai qui arrive à point nommé pour contrer la déferlante assommante des dernières années en développement personnel bidon et superficiel.

Jo la Frite

Lien : http://coincescheznous.unblo..
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Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir dans la vitrine de Gallimard, devant laquelle je passe chaque jour, mon ancienne prof de philo du lycée ! Je ne pouvais qu'acheter ce livre et aller à la rencontre qui était organisée.
Dans cet ouvrage l'autrice revient sur toute la déclinaison des moments de ruptures que nous rencontrons au cours de nos vies. de la rupture amoureuse, en passant par la maladie, la perte d'emploi, les conflits familiaux... Nous ne pouvons que nous reconnaître dans au moins un des chapitres. le ton est juste, la vulgarisation juste comme il faut, les sources empiriques et théorique sont là mais les anecdotes et les illustrations sont également bien présentes. Trop complexe pour être un simple livre de développement personnel, mais trop d'histoires de vie pour être un essai philosophie, ce texte est la la jonction des deux genre et cela fonctionne très bien. le texte nous fait réfléchir, nous interpelle, et parfois, nous percute. Les nombreuses références littéraires disséminé au fil des pages est un petit plus pour les littéraires.
Un ouvrage accessible, intelligent et humain.
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Si vous vous attendez à un livre optimiste pour vous rebooster, vous allez être déçu. Livre direct, sec, pas d'artifice ou de vaseline.
Une rupture c'est dure, profondément dur, viscéralement dur, identitairement dur, bouleversant, déchirant, et certains peuvent ne jamais s'en remettre. Tout le monde n'est pas résilient, en fait.
Et si on vit tous des ruptures, certaines ont été acidifiées volontairement ou non Et puisqu'on vit tous des ruptures, ce livre peut peut-être vous éviter ça, éviter de mettre et remettre du sel sur la blessure.

Touche essentiellement à la rupture amoureuse, mais aussi le deuil dans un sens plus large, et la rupture avec la mère.

Tout le monde est concerné.

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Quand on lit un tel livre, c'est forcément qu'on se sent concerné(e). Soit parce qu'on a déclenché une rupture, soit parce qu'on la subit (cette seconde option étant sûrement la plus fréquente). On dévore alors ces pages, à la fois pour essayer d'aller mieux (oui, je suis plutôt "deuxième option"), mais aussi pour comprendre ce qui nous arrive. Et tenter de relativiser le drame, la tragédie.
Alors oui, en lisant ce livre tout à fait pertinent, on perçoit des choses, on en comprend d'autres, mais hélas sa lecture ne peut annuler la rupture. La souffrance reste là, après avoir fermé le bouquin, car même si on comprend les choses, la réalité vous étrangle malgré tout dès la lecture achevée.
Mais bon, il faut le lire quand même, hein !
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Claire Marin, philosophe, aborde les rupture(s) que l'humain est amené à connaître, volontairement ou non, dans beaucoup de domaines de sa vie. A commencer par sa naissance, qui constitue la rupture première et essentielle.
Elle développe de façon poussée la rupture amoureuse désirée ou subie qui dans un cas comme l'autre, conduit à une perte de l'identité commune et à la nécessité de reconstruire une nouvelle identité singulière.
Elle démontre comment au-delà de la perte et du deuil, les ruptures et les mutations qu'elles engendrent peuvent conduire sur le chemin de la libération et du devenir soi.
Elle aborde également la rupture vitale du lien familial qui peut être toxique en annihilant la personnalité de l'enfant, même devenu adulte, et en lui interdisant de vivre sa propre existence.
La perte des capacités est de même retracée en ce qu'elle constitue une rupture avec une vie antérieure à la suite d'un accident ou d'une maladie.
Tous ses propos sont étayés par de nombreuses citations ou renvois à des oeuvres littéraires ou philosophiques abordant le sujet et qui illustrent parfaitement ses développements et analyses.
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Dans Rupture(s), Claire Marin s'appuie sur des exemples rencontrés dans la littérature (Marguerite Duras,Lionel Duroy, Philippe Forest et Charles Juliet ) pour rendre plus parlante l'idée de rupture. Comme dans ses autres ouvrages de vulgarisation, l'auteure consacre chaque chapitre à l'analyse concise et convaincante d'une situation de rupture: la rupture amoureuse, être soi,le plaisir de la dispersion, naissance et séparation, la rupture avec la famille,disparition.Le lecteur revisite ainsi son vécu et parfois le comprend mieux quand il est ainsi mis en mots.
L'on retiendra que nos actes définissent notre personnalité.La métamorphose de soi est une violence pour soi et pour les autres.On est plusieurs « soi ».
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Livre enrichissant n'étant pas une grosse lectrice j'ai pris mon temps pour le lire et bien le comprendre. Je cache pas qu'il y a quelque « chapitre » ou je me suis perdu dans les explications et d'autre où je m'y suis plutôt pas mal retrouvé.
J'ai acheté ce livre car en cette année 2020 j'ai été touché par un décès d'une personne proche qui a déclenché la rupture avec mon conjoint. J'éprouvai le besoin de lire à livre comme celui ci en cette période de la vie.
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