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EAN : 9782857047094
313 pages
Pygmalion-Gérard Watelet (31/05/2001)
3.47/5   31 notes
Résumé :

Montségur, « ce nid d'aigle vers lequel convergent tous les nuages du monde », reste l'un de ces lieux privilégiés où souffle encore l'esprit, où planera toujours le mystère du Saint Graal, où viendront inconsciemment s'arrimer rêves et illusions des générations successives, en dépit des flammes du bûcher allumé naguère par les Inquisiteurs pour réduire à jamais la résistance cathare.

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Jean Markale est ce que l'on appelle un folkloriste. C'est-à-dire un spécialiste des mythes et des légendes populaires. Homme de lettres, il étudie les textes, les techniques littéraires, parfois l'évolution des thématiques et des idées dans ces écrits que L Histoire a laissé. Mais Markale a également un fâcheux défaut : il tend à s'auto-proclamer expert sur la société celte et vouloir faire de l'Histoire. Cette position lui a valu de nombreuses critiques : on lui a par exemple reproché de se baser beaucoup sur la linguistique pour fonder ses thèses alors que sa maitrise de la linguistique est assez moyenne. Bref, Markale n'aurait pas les compétences de ses prétentions. Personnellement, je trouve ces critiques un peu sévère. Certes, Markale n'a pas la rigueur scientifique d'un historien ou d'un anthropologue. Mais Markale ne se proclame ni l'un ni l'autre ! Il est évident, à la lecture de ses livres, qu'il fait preuve d'une bonne foi évidente, qu'il cherche toujours à être le plus honnête possible en démêlant le vrai du faux.

Quoi qu'il en soit, voilà "Montségur et l'énigme cathare", un livre que je trouve passionnant même si, il faut le dire, il a mal vieilli. C'est un livre qui a mal vieilli car les ¾ des informations historiques contenus dans ce bouquin sont aujourd'hui dépassées. Les thèses qui étaient dominantes sur le catharisme à l'époque de Markale ont été largement remises en cause. À ce titre, il est un peu dommage que les éditions France Loisirs (version dans laquelle j'ai lu le livre) republie cet ouvrage sans y insérer une Note aux lecteurs ou quelque chose du genre : ils diffusent beaucoup de bêtises. Reste le talent littéraire de l'auteur car c'est là, selon moi, la grande qualité de ce bouquin : c'est divinement bien écrit, l'enchainement des mots est un régal qui craque sous la langue. Markale a un talent évident pour raconter des histoires – à défaut de maitriser L Histoire (avec un grand H).

Le livre se décompose grosso modo en trois partie.

1- Contexte de développement du catharisme
C'est peut-être la partie la plus scandaleusement fausse. L'idée de Markale est que le catharisme a subi une sorte de complot ourdi par l'Église catholique et le royaume de France, tous deux s'étant acharné pour voir cette « hérésie » disparaître. Et cet acharnement serait bien la preuve qu'il y a un « secret » cathare, quelque mystère à élucider qui explique la fascination toujours bien vivante pour ce mouvement mort il y a plusieurs siècles.
SAUF QUE nous savons aujourd'hui que le roi de France ne voulait pas lancer la « croisade contre les Albigeois ». le contexte était celui d'une lutte entre les « Français » (actuelle France du Nord) et les « Anglais » qui occupait une bonne partie de la cote ouest de l'actuelle hexagone, et il y avait peu à gagner et beaucoup à perdre à se lancer dans une guerre ouverte contre le Comte de Toulouse et ses alliés occitans. Mais Rome insista tant et tant pour massacrer les hérétiques (elle avait besoin d'hérétiques pour affirmer son orthodoxie, à ce sujet lire Robert Moore) qu'une croisade finit par s'initier dans le dos du Roi. C'est-à-dire que des seigneurs du Nord s'organisèrent eux-mêmes, que Simon de Montfort pris la tête de cette expédition, pour punir ces gens du Sud bien peu pieux et, au passage, piller leurs terres. Et le roi de France laissa faire. Nous n'avons donc pas un acharnement du Roi de France, mais plutôt une indifférence assez manifeste. Ce qui met un sacré coup de plomb dans l'aile de la thèse de Markale.
Malgré tout, cette première partie du livre reste l'occasion de lire de somptueuses descriptions. Je n'avais jamais lu de témoignages aussi beau sur les Pyrénées, le Razès et le Sabarthès (vallées de l'Ariège). Je le répète : Markale écrit vraiment très bien.

2- La pensée et la religion cathare
Ici, Markale ne fait que répéter ce qui était la thèse dominante à son époque. On ne peut pas trop lui en vouloir, même si cette thèse a été battu en brèche depuis. Cette thèse, c'était que le catharisme n'est pas réellement une hérésie chrétienne mais plutôt une résurgence d'une religion dualiste héritée de la nuit des temps. En ce sens, le catharisme serait plus proche du manichéisme ou de mazdéïsme, voire même des bogomiles, que du christianisme. Sauf que cette thèse s'appuyait sur les écrits médiévaux des prêtres qui avaient combattu les cathares, et qui accentuaient évidemment les points de désaccord de ces derniers avec la doctrine chrétienne officielle pour bien montrer combien ils avaient raison de les traquer. Depuis, on a traduit des textes cathares. On connait donc mieux la doctrine cathare puisqu'on y a accès par ses théoriciens directement et non plus seulement par ses ennemis. Et il se trouve que le catharisme n'est pas si oriental qu'on l'avait cru, que c'est du christianisme assez classique finalement, même si c'est une sorte de « christianisme d'extrême gauche » puisque très critique vis-à-vis de l'accaparation des richesses par le clergé. Il y a un livre qui résume magistralement toutes ces questions et les apports des principaux historiens : "Les archipels cathares" de Anne Brenon.

3- le « mystère » cathare
Là aussi c'est un peu dépassé. Markale reprend la thèse d'un vieux livre, "L'énigme sacrée", qu'on peut résumer ainsi : Jésus aurait eu des enfants avec Marie-Madeleine, qui se serait cachés en France, et le secret cathare consisterait à protéger cette lignée issue du Christ. Plus tard, ce même bouquin servira de base au best-seller Da Vinci Code. Et du coup il sera sévèrement décortiqué par tout un tas d'historiens. Résultat : la thèse est originale et séduisante sauf qu'elle prend pour pierre de voute un document signe du « Prieuré de Sion », prieuré qui n'a jamais existé sauf dans la tête de certains adeptes de la théorie du complot. Thèse assez bancale donc. Quand au prétendu « secret » cathare… On le cherche encore.

En écrivant cette critique je me rends compte que je suis assez négatif sur ce livre. Et pourtant je l'ai lu trois fois ! En vérité, je me régale à lire du Jean Markale. C'est un auteur qui a une plume délicieuse, un sens de l'ironie fabuleux, et surtout un talent à conter des anecdotes incroyables.
Mais peut être aurait il du rester hommes de lettres, et ne pas avoir trop de prétention historiques. Ses ouvrages ne sont pas très solides, résistent mal au temps (surtout ce "Montségur…"). À lire pour le joli travail littéraire malgré tout.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
« Pour le sens commun, tout ce qui est occitan est marqué par la latinité, par l'esprit méditerranéen. Le comté de Toulouse est de droit écrit, par opposition aux États du nord qui sont de droit coutumier. L'influence romaine paraît évidente comme dans le domaine linguistique : la langue occitane, ou plutôt les divers dialectes occitans, sont dit plus proches du latin que les dialectes de langue d'oïl. Ce ne sont que des contre-vérités. La langue occitane a subi une évolution parallèle à la langue d'oïl, mais ce qu'on oublie de dire, c'est que cette langue a subi moins de brassage que la langue du nord. Elle est restée plus pure, c'est-à-dire que, d'une façon générale, il s'agit de l'évolution d'un bas-latin parlé par des populations qui, à l'origine, utilisaient la langue gauloise, et cela jusqu'à une époque avancée. Le fonds celtique est important dans les dialectes d'oc, beaucoup plus important que dans les dialectes d'oïl. Quand au droit, s'il était écrit, et s'il présentait d'évidentes marques romaines, il était équilibré par les coutumes locales, bien différentes de celles du nord, très marquées de germanité.

En fait, à la fin du XIIe siècle, l'Occitanie des comtes de Toulouse constitue une synthèse harmonieuse entre la civilisation latine et la civilisation celtique, un creuset où sont en train de se développer les germes d'une autre civilisation qui eût pu submerger l'Europe occidentale si elle n'avait pas été cassée, brisée, détruite, systématiquement et consciemment, par le pouvoir royal capétien et les seigneurs du nord, avec la complicité de l'Église romaine, et sous couvert d'une croisade pour défendre la vraie foi.

L'Occitanie n'est pas un bloc monolithique, bien au contraire. Les nombreuses seigneuries qui sont plus ou moins vassales de la Maison de Toulouse ne le sont que d'une façon très élastique : la vassalité dépend de la bonne volonté de chacun. À l'intérieur même de leurs domaines, les grands feudataires sont payés de retour par leurs vassaux, pour la plupart possesseurs de forteresses imprenables, et qui n'en faisaient pratiquement qu'à leur tête. Les rapports entre les seigneurs étaient avant tout des rapport d'hommes à hommes et n'étaient pas régis par des règles hiérarchiques dictées par un centre absolu, comme sur le modèle romain. Au contraire, la société occitane apparaît nettement de type horizontal, comme c'était le cas dans les sociétés celtiques primitives. »
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Les premiers temps du christianisme ont été marqués par une étonnante prolifération de sectes de toutes natures, de toutes origines et de toutes opinions. Cela tient d’abord à ce que l’époque était une période où, dans le monde méditerranéen, les anciennes valeurs s’effondraient et que les peuples commençaient à ressentir une profonde angoisse métaphysique. La religion officielle de Rome n’était plus qu’une suite de rituels d’ordre politique, et personne ne croyait plus aux dieux d’un Olympe que Prométhée avait contribué à ébranler par un excès de rationalisme. La religion grecque s’était fondue dans les religions à mystères qui se développaient de part et d’autre de la mer Égée. Le mithraïsme gagnait les rives du Rhin, emporté dans les bagages des légions. Le druidisme se réfugiait dans les forêts, à l’écart des grandes voies romaines où commençait à se manifester une certaine persécution. Dionysos envahissait les rues de Rome par bacchanales interposées. Dans cet invraisemblable brassage de populations et d’idées, plus personne ne s’y retrouvait.
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Car la Croisade contre les Albigeois, personne ne peut plus en douter, était tout autant politique que religieuse, les deux motivations se rejoignant et s’harmonisant parfaitement sous l’angle de l’économie. Cette « injustice » de Montségur est devenue un crime. Et les crimes ne sont pas oubliés de sitôt : ils ont même tendance à promouvoir de façon définitive ceux qui en sont les malheureuses victimes. Le sang des martyrs chrétiens tache toujours le sol des cirques romains, et la croix de Jésus se dresse toujours sur le Golgotha. Mais ce n’est pas la même croix : celle de Jésus était en forme de tau, et celle qu’on nous montre est un symbole solaire hérité de la nuit des temps.
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Ce que l’on appelle aujourd’hui le gnosticisme, du mot grec gnosis qui signifie « connaissance », est le résultat d’une rencontre parfois tumultueuse entre trois traditions essentielles, le christianisme, bien entendu, le mazdéisme zoroastrien et la philosophie grecque de source platonicienne ou néoplatonicienne. Ce gnosticisme ne constitue pas une religion en soi, encore moins un bloc monolithique : on a pu dénombrer de
soixante à quatre-vingts écoles qui se réclamaient de ce courant de pensée. Certes, il existait, entre ces écoles, des différences sur les méthodes et les points de détails, mais toutes se rattachaient à une direction d’idées qui en font un système parfaitement spécifique.
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Comme en Brocéliande, tout est organisé pour attirer l’oeil vers des sentiers fort larges et qui se perdent complètement dans les broussailles. Dans certaines versions de la Quête du Graal, des chevaliers en quête de l’objet sacré sont parfois reçus dans des châteaux qui ont toutes les apparences du Château du Graal. Mais ils s’aperçoivent bientôt qu’ils traversent les domaines enchantés de Klingsor. Ou de Merlin, le maître de l’illusion, mais celui qui sait, parce qu’il est la figuration du druide primordial. S’il fallait d’un mot qualifier le Razès, je dirais que c’est un pays déroutant.
Est-ce l’ultime piège des Cathares ?
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Vidéo de Jean Markale
POÉSIE MÉDIÉVALE – Qu’est-ce que BROCÉLIANDE ? (France Culture, 1993) L’émission « La matinée des autres », par Jacqueline Kelen, diffusée le jour de noël 1993 sur France Culture. Invités : Jean Markale, Claudine Glot, Philippe Le Guillou, Pierre Dubois, Patrik Ewen et Jean Thos.
>Religion>Confessions et sectes chrétiennes>Eglises protestantes d'origine européenne (33)
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