La vie sexuelle d'un islamiste à Paris, chez Albin Michel.
En dépit d'un titre un peu racoleur, ce récit amusant et plein de verve n'a rien d'un libelle : on y voit, dû au malaise de la population maghrébine en France, une tenace volonté d'échapper aux différents ghettos/ replis religieux, culturels et sociaux.
Mais l'emprise de la mère, prodigieuse dans son envahissement téléphonique matinal, et le constant souci de sa progéniture masculine, ne se relâchent pas sur "la prunelle de ses yeux" ("moumou aâyiniya").
En arrière plan des comportements féminins maghrébins et européens désireux de s'établir par tous les moyens.
- un petit extrait de son « Islamiste » ?
« Elle avait connu un Norvégien, un veuf d'une soixantaine d'années, sans enfant et sans le projet d'en avoir. Il était le correspondant d'un hebdomadaire d'Oslo et habitait un appartement de rêve, cent cinquante mètres carrés, rue Pigalle.
Il avait pour voisins un comédien célèbre et sa femme. en plein divorce, leurs scènes débordaient jusque sur le palier.Ca se déchirait pour un canapé usé, une horloge qui ne valait pas un sou. c'est dans cette ambiance-là que le Norvégien lui a proposé le mariage. Ils se connaissaient depuis à peine un mois.
- je ne peux pas dire que je crevais d'amour pour lui, a-t-elle dit. Il était plutôt laid et sentait le bouc, mais mes papiers traînaient à venir, le ras le bol des va-et-vient à la préfecture, du fameux bureau 8 où on nous accueillait comme des poux. Alors j'ai accepté. »
- un autre : le désenvoûtement du fils :
« En fin de journée, entre chien et loup, ma mère venait gratter à la porte.
- C'est l'heure du bain, annonçait-elle.
Un bain parfumé à l'eau de fleur d'oranger, auquel on ajoutait des gouttes de l'eau bénite de Zamzam, importée de la Mecque, et des essences de toutes sortes. Les parties intimes dissimulées sous un pagne, je m'y plongeais sous le regard et les incantations graves de la désenvoûteuse, que ma mère reprenait avec la même gravité.
Sèché et habillé, j'emportais mon dîner et regagnais mon antre. Au crépuscule, les deux femmes allumaient quarante bougies, puis enduisaient de henné les plinthes, ainsi que la plante de mes pieds.
Au terme du quarantième jour, la Marocaine a décrété que l'envoûtement était levé. »
Le récit est drôle, avec sinon des rôles à clefs (la fameuse romancière Loubna minbar), du moins des personnages symptomatiques crédibles et bien campés.