La pauvreté : une approche plurielle

" [...] derrière l'unanimité du discours reconnaissant l’existence de la pauvreté et sa recrudescence actuelle, il est facile de discerner les conceptions différentes du phénomène pauvreté. De manière abrupte nous pourrions résumer : à chacun ses pauvres, mais tout le monde a les siens." Claude Martin et Marc Henri Soulet dans l'article "Ce que ces mots ne nous disent pas"

"Toute politique d'assistance ou de charité, d'aide ou de contrôle, s'appuie en effet, sur des images et des représentations du pauvre, des motivations, dites ou tues, sues ou méconnues, qui l'orientent et l'informent. [...] il est possible, en traitant une situation historique, d'aller en deçà des discours explicites et justificatifs, qui accompagnent toute pratique sociale, administrative ou individuelle, pour déchiffrer quelle vision du monde social la porte. Et ce faisant, de rappeler aux hommes et femmes d'aujourd'hui que les décisions qu'ils prennent, que les institutions qu'ils construisent, que les gestes qu'ils font, sont toujours articulés sur des représentations point toujours sues comme telles, des fonctionnements et partage sociaux." Roger Chartier dans l'article "La pauvreté à l'âge moderne (XVI°-XVIII° siècles) Définitions, représentations, institutions"

"L'inégalité commence dès qu'il y a surplus économique et que se pose la question du partage du surplus. Une chose est la reconnaissance de l'existence de l'inégalité sociale comme principe d'organisation sociale, autre chose est l'imputation de l'inégalité aux individus vivant dans cet espace social. La représentation de la pauvreté organise ce glissement inévitable. Peut-on définir ce qu'est un pauvre si on ne définit pas en même temps ce qu'est un riche ? L'Etat nous propose des politiques sociales pour supprimer les pauvres, mais pourquoi ne nous propose-t-il pas des politiques sociales pour supprimer les riches ? [...] la censure fonctionne et c'est ce que j'ai voulu montrer en disant que la pauvreté est une question de mots et que les discours sur la pauvreté servent à légitimer la richesse." Michel Autes dans l'article "Les mots et les pauvres"

"Le travail social met en forme des situations innommables qui contredisent les logiques, la rationalité de la société en leur donnant un sens. Bourdieu appellerait cela un processus d'euphémisation. C'est plus que cela ; c'est donner un sens à ce qui n'en a pas, c'est-à-dire à des situations qui sont inacceptables sur le plan politique, intolérables sur le plan de la morale. Ainsi, à cause de l'euphémisation, la lutte n'est pas la guerre. La lutte contre la pauvreté devient sa gestion sociale." Michel Autes dans l'article "Les mots et les pauvres"

"Ce qui s'impose à la fin des années 70, c'est la pauvreté, c'est-à-dire une représentation qui ne faisait pas partie de l'ensemble des représentations concurrentes qui existaient auparavant. Ceci n'est pas un hasard. C'est l'indice d'un changement de dimension, d'un changement de regard, d'un changement de stratégie en direction de populations qui jusqu'à ce moment étaient désignées autrement." Michel Autes dans l'article "Les mots et les pauvres"