La forêt paraissait un peu moins froide. Tout devint flou et liquide tandis qu'il restait assis à tanguer dans le noir complet. Il avait froid et n'avait pas froid, il était mortellement las et parfaitement éveillé. La peur tournoyait dans les buissons mais restait hors d'atteinte, jusqu'à ce qu'il ne prenne plus la peine de se fourrer des choses dans la bouche. Vouloir suivre ses pensées, c'était comme marcher seul dans une rue déserte où tous les magasins fermaient l'un après l'autre.
L'enfer, c'est la vie, et la vie, c'est tout ce qu'il y a.
Les silhouèttes recroquevillées à chaque coin de rue, sous chaque porche empestant la pisse, prouvent que la musique de la civilisation s'enraye souvent et qu'il ne reste jamais assez de chaises pouir tout le monde.
Plus une théorie parait bizarre, plus elle a de chances d'être vraie. Elle n'a l'air tordue que dans le contexte des mensonges qu'on nous apprend à gober.
La vérité est une fiction que l'on complète après coup pour rendre les circonstances moins épouventables, plus explicables, pour en rejeter la faute sur un autre, même si c'est forcement la sienne.
La journée passe, et on se demande quelle est sa récompense. Il devient vite évident que le seul trophée à gagner est le droit d'avoir à supporter le lendemain.
on la retrouva dans les buissons ça arrive.On retrouve aussi des gens dans les bois, dans des chambres surchauffées et désordonnées, dans des ruelles, des parkings, des sorties de cinéma, on en retrouve dans les piscines ou les voitures. On retrouve des morts presque partout, mais les buissons, c'est souvent le pire. leur état et leur situation laissent peu de place à l'idée réconfortante qu'ils sont peut-être simplement endormis, ivres, évanouis, inconscients pour une raison ou une autre mais capables de revenir dans le monde des vivants. dans les buissons, les morts sont vraiment mort
Bill et Patricia Anders avaient passé presque toute leur vie à Portland dans les années 80, quand les enfants quittèrent la maison, ils tentèrent, non sans hésitation, de se souvenir comment occuper leur temps libre, comme s'ils étaient les gardiens d'un zoo abandonné dont les animaux aurait été relâchés dans la jungle ils commencèrent, de manière un peu futile, par passer les weekend hors de la ville...
tout bien considéré, c'était l'endroit idéal pour dîner, à un détail près :le service était nul. j'attendais depuis longtemps, personne n'était venu me saluer, m'assurer que je faisais partie de la maison ou offrir de l'eau glacée que je ne boirais pas. Et en fait, ce n'était pas seulement le personnel qui déconnait. à mon arrivée, j'avais constaté que quelqu'un avait renversé presque toutes les chaises au centre de la salle, ce qui faisait désordre. Je les avais remises en place, mais après tout ce n'était pas mon boulot. Pas plus d'ailleurs que de remplacer les ampoules. J'ai songé à passer à la cuisine, mais je savais que ça ne servirait à rien. c'était encore plus calme, là-bas, et plus sombre. Je me penchai sur ma table en me demandant ce que je pouvais bien foutre là. attendre 3 jours un bol de chili, c'est long.
Vous comprenez brusquement que c'est bien là le problème – un bon résumé de l'existence. Il n'y a jamais d'endroit où se reposer quand on en a besoin.