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sur 675 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En 2015, lors d'une mission anthropologique chez les rares nomades Evènes subsistant encore des rennes au Kamtchatka, l'auteur partie seule en forêt est attaquée par un ours : le fauve lui emporte la moitié du visage avant de s'enfuir, lui laissant miraculeusement la vie sauve. S'ensuivra pour la jeune femme une longue et douloureuse reconstruction physique, mais aussi une vaste introspection sur les raisons et l'impact de cette fulgurante collision entre l'humain et l'animal.


L'on reste d'abord sans voix devant l'inimaginable et terrible mésaventure de cette femme : une épreuve atroce, à l'issue improbable, suivie d'un parcours médical à faire froid dans le dos, à la merci de la brutalité d'un petit hôpital russe d'un autre âge, mais aussi, très ironiquement, des failles des plus grands établissements de santé français. L'on devine ensuite la tornade qui a dû s'emparer du psychisme de cette survivante, l'énorme travail sur soi pour parvenir à passer le cap, concrétisé par ce livre posé, réfléchi, plein de la maturité et de la sagesse de qui a déjà vécu cent vies.


C'est avec toute son expérience d'anthropologue, son ouverture d'esprit et sa conscience de la complexité des êtres que l'auteur envisage l'enchaînement de faits qui l'ont menée à ce face-à-face avec un fauve. Sans jamais trancher, elle ouvre une à une des hypothèses issues de différentes cultures, explorant aussi bien la psychanalyse, le chamanisme ou l'animisme. Cela l'amène avant tout à mieux se connaître, à comprendre ce que cet ours lui a pris et lui a donné en échange. Cela finit par nous faire réfléchir à notre avenir d'humains sur une planète au bord de la ruine, où l'anthropologue met en lumière ce que nous sommes en train de perdre : les mythes anciens, l'harmonie avec la nature et l'équilibre entre les espèces vivantes, les espaces de liberté et de vie sauvage…


Cette méditation, au texte parfois exigeant et toujours lucide, se lit avec d'autant plus d'intérêt qu'elle accompagne le récit sincère et sans complaisance d'une authentique expérience de terrain, où transparaissent l'estime et l'amitié d'hommes et de femmes au mode de vie en voie de disparition, et en l'avenir desquels, pourtant, l'on aimerait bien pouvoir croire encore.

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Il n'eut pas été compliqué de donner un coup de griffe au roman de Nastassja Martin. « Croire aux fauves », c'est Sylvain Tesson qui tombe sur un ours, s'en sort miraculeusement, tel di Caprio dans le film « The revenant » puis se fait rafistoler les maxillaires à la Salpêtrière comme Philippe Lançon. Tout ça reste dans la famille Gallimard, et la caravane passe. Pour évoquer les bêtes sauvages, Tesson n'a pas son pareil - son dernier livre en témoigne. Quant au martyr d'une gueule cassée, « le lambeau » restera une oeuvre inégalée. Alors à quoi bon se coltiner un livre qui aborde des sujets traités avec maestria par d'autres auteurs ? Parce ce que la voix de Nastassja Martin est singulière, profonde, inoubliable. Je n'en reviens toujours pas. Ce récit m'a pris à la gorge dès les premières pages et ne m'a plus lâchée. Il y a quelque chose d'hypnotique et de viscéral dans ce livre, aux limites du surnaturel. La science ne parvient pas à expliquer certains mystères. L'ours croque Nastassjya au visage. Elle en ressort vivante mais persuadée que l'animal vit en elle depuis la morsure, qu'il fait corps avec son être (très beaux passages sur l'animisme). Défigurée, Nastassjya s'interroge sur son identité et sur sa place dans le monde. Son seul moyen de s'en sortir, c'est d'accepter la présence douloureuse de l'animal qui, quelque part au Kamtchatka, pense à elle en pansant sa blessure. Car la nature nous observe, elle nous a précédés. J'ai eu la chance de descendre le lac Baïkal, de rencontrer un chaman. Sans doute ce voyage m'a prédisposée à aimer ce livre qui, j'en suis certaine, vous touchera au coeur et à l'âme. Il ne vous reste plus qu'à vous faire une opinion.
Bilan : 🌹🌹
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Un livre fort, personnel, atypique, profond, intime...

C'est cette intimité que Nastassja Martin souhaite nous faire partager dans Croire aux fauves, partage public mais pudique de son parcours introspectif après son attaque par un ours dans le Kamtchatka en 2015. Attaque ou plutôt rencontre. Rencontre ou plutôt naissance. Naissance ou plutôt renaissance.

Car peu importe les faits, ce corps laissé à moitié mort par la bête, ce visage défiguré, ces multiples opérations réparatrices et ces nuits de douleurs à 9,9 sur une échelle de 10. L'anthropologue reprend le dessus sur la femme en souffrance et analyse l'accident sous un angle différent : par cette rencontre, une partie de son corps et de son âme est devenue ours, et Nastassja a besoin de retourner là-bas pour comprendre et vivre pleinement son nouvel état.

Ses amis évènes du Kamtchatka l'avaient déjà baptisée « mathuka », l'ourse ; la voilà désormais devenue « miedka », mi-femme, mi-ourse. Les frontières entre l'homme et l'animal s'estompent, les rêves décodent le réel et le retour en milieu naturel accomplit son oeuvre reconstructrice.

Une lecture parfois ardue et complexe, mais assurément belle, poétique et inspirante.
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Croire aux fauves est le récit d'une anthropologue française qui s'est fait attaquer par un ours brun en Russie.
Elle s'est fait arracher une partie du visage et elle parle de ce qu'elle considère avec le recul comme une expérience spirituelle, elle pense avoir désormais un lien unique avec l'ours.
Elle nous raconte ses blessures, sa convalescence tant physique que psychique, dans divers hôpitaux et surtout en pleine nature, là où elle se sent elle-même.
Ca parle de chamanisme, c'est poétique et puissant, parfois un peu onirique, et on n'en ressort pas indemne.
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J'ai commencé la lecture de ce récit sans avoir prêté attention au fait qu'il ne s'agissait pas d'un roman mais bien du récit et de la réflexion de Nastassja Martin, anthropologue après qu'elle ait croisé un ours en 2015 et qu'elle soit sortie vivante de cette étreinte hors du commun ! J'y avais vu plutôt une histoire autour du mythe et des fantasmes de l'Union de la femme et de l'ours. Finalement les frontières ne sont pas si marquées qu'on pourrait le penser .L'auteurr s'interroge sur le sens de cette rencontre et de son dénouement. le regard de la bête et la belle était il dû au hasard? Est elle devenue " miedka" c'est à dire moitié humaine moitié Ours ? Alors qu'elle doit faire face aux rivalités entre hôpitaux,entre le front russe et français elle renvoie avec humour l'incohérence et l'absurdité qui régissent nos vie. Comment se reprendre en main? Comment retrouver son identité ? Où se situe t'elle ?ayant en quelque sorte dû affronter deux mondes,celui animal et l'humain,elle cherche sa place " j'ai vu le monde trop alter de la bête, le monde trop humain des hôpitaux. J'ai perdu ma place...je cherche un entre deux....parce qu'il faudra bien les construire ces ponts et portes entre les mondes..."
Cette plongée dans les montagnes du Kamtchatka mais aussi des méandres intérieures de l'auteure n'a pas été si évidente que ça pour moi. Ce n'est pas une lecture facile mais ce récit a le mérite de soulever beaucoup de questions et notamment sur l'altérité, j'en ressort donc sans réponse mais pourtant un peu moins niaise!😉
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Nastassja Martin a écrit là le récit extra ordinaire et terrible d'un évènement tragique et fondateur pour elle : Elle a subi l'attaque d'un ours, dans les montagnes du Kamtchatka, où l'a conduit son métier d'anthropologue. Une partie du visage arrachée, il la laisse pour morte… Va débuter pour elle, le long chemin de la reconstruction faciale. Au fur et à mesure que son visage reprend forme humaine, tout son être est transformé, comme happé par cette part d'âme animale qui bat maintenant en elle. Dit comme cela, c'est distant et factuel. Mais à le lire, c'est explosif. de beauté et d'émotions.
« Je veux du sombre, une grotte, un refuge, je veux des bougies, la nuit, des lumières douces et tamisées, du froid dehors, du chaud dedans et des peaux d'animaux pour calfeutrer les murs. »
Je suis restée accrochée à ses mots du début à la fin. J'ai encore du mal à m'en défaire. Ce n'est pas le tragique de l'histoire qui me reste en mémoire mais ce sentiment d'envoûtement que m'a laissé la lecture de Croire aux fauves. cette fusion des âmes et cette appropriation mutuelle de l'autre dans l'arrachement des chairs...
Nastassja Martin ne peut plus être la même après un tel accident. C'est une évidence. Mais cette différence, plus que physique, est ontologique. Elle est femme-ourse : animale et humaine à la fois…
« Il n'a pas voulu te tuer, il a voulu te marquer. Maintenant tu es miedka, celle qui vit entre les mondes. »
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Nastassja Martin est anthropologue. Au coeur de ses recherches, les groupes humains dans leurs diversités physiques et culturelles.
En 2015, lors d'une mission chez les rares nomades Evènes subsistant encore au Kamtchatka (extrême-orient russe), l'auteure est attaquée par un ours : le fauve lui arrache la moitié du visage, la laissant miraculeusement en vie.
Défigurée et fragilisée moralement, la jeune femme doit subir de délicates interventions chirurgicales, en Russie puis en France, avant d'être autorisée à retrouver les siens.

Mais outre la lente et douloureuse reconstruction physique, la narratrice éprouve le besoin impétueux de comprendre ce que l'ours lui a pris et donné lors de l'effroyable confrontation. Un mystère que ni la science ni la raison ne peuvent expliquer. Encore convalescente, elle « chausse ses lunettes » d'anthropologue pour entreprendre un long voyage (dans un premier temps intérieur) et examiner les hypothèses issues de différentes cultures : psychanalyse, onirologie, mythologie, chamanisme, animisme.
Ce récit est donc avant tout une profonde réflexion sur la signification et les conséquences de la violente rencontre entre l'humain et l'animal. Si le propos peut être déstabilisant pour des occidentaux non initiés à ces croyances et traditions éloignées des nôtres, il initie justement une distanciation et un questionnement essentiel de notre rapport à la nature et à la vie animale.

Ce qui fait sa singularité et sa beauté, c'est la sincérité et la voix de Nastassja Martin, profonde, captivante, intense.
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Nastassja Martin est anthropologue et elle nous livre un récit éprouvant et lumineux à la fois, celui de son combat après l'attaque qu'elle a subi lors de sa rencontre avec un ours dans les montagnes du Kamtchatka.
De l'accident, on ne saura pas grand-chose, il faudra attendre les dernières pages du livres, mais nous suivons le long cheminement de Nastassja Martin jusqu'à sa « réparation »
Brusquement séparée de ses amis Avènes, elle va devoir se battre pour se reconstruire, tout en affrontant la suprématie médicale. Gravement blessée au visage, elle passe du temps dans les hôpitaux russes avant de poursuivre sa guérison en France. Sans cesse, elle doit composer avec la douleur.
Elle devra subir plusieurs opérations et vaincre une infection nosocomiale.
L'ours est toujours là, présent dans son visage ravagé et dans ses rêves. Pour les Evènes, elle est
« matukha », l'ourse, à cause de ses rêves. L'anthropologue partage leur vision animiste, elle a pris une part de l'ours et lui un fragment de son humanité, la frontière entre les deux mondes est perméable, elle est devenue « miedka ». Elle est confrontée à ces bouleversements de civilisation, ce progrès qui réduit l'espace de liberté des peuples arctiques qu'elle étudie.
Loin d'être un simple témoignage sur son terrible accident, ce récit tente de creuser le sens de cette confrontation avec l'animal sauvage.
Il n'y a pour elle qu'une issue, celle de retourner dans la forêt, auprès de son amis Daria et de son peuple, pour continuer sa quête. Elle retrouve sa place parmi les Evènes, et leur regard est tout autre que celui des occidentaux. Elle ne doit pas en vouloir à l'ours dont elle a croisé le regard, ce que l'animal ne supporte pas. Elle peut aussi confier ses rêves, ici ils font partie de la culture.

Je ne sais pas si on peut parler de résilience, mais l'anthropologue se tient en équilibre entre deux mondes, le civilisé et l'autre où le sauvage a sa part. On suit sa démarche avec intérêt, sa réflexion n'est jamais pédante. Avec ses questionnements et ses incertitudes, ce récit déborde d'humanité et c'est cela qui nous touche. Après cette lecture, on ne peut que porter un autre regard sur l'ours, et sur cette nature sauvage qui peut se montrer si cruelle parfois.

Ce livre a été sélectionné pour concourir pour le Prix littéraire Terres d'Ailleurs 2020 qui récompense un livre d'aventure vécue, une aventure/voyage /découverte d'un ailleurs au travers du regard d'un(e) auteur(e)

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C'est la chaîne Arte qui m'a fait découvrir l'extraordinaire aventure que Nastassja Martin relate dans son récit très justement intitulé "Croire aux fauves".
La jeune anthropologue évoque effectivement les croyances animistes aux forces de la nature et l'ours qui l'a attaquée au visage le 25 août 2015 lorsqu'elle était en mission dans les montagnes du Kamtchatka à l'est de la Russie.
Au rythme des quatre saisons de l'année, elle raconte son hospitalisation en Russie puis en France et son retour sur place pour tenter de comprendre ce qu'elle pense être une renaissance, les âmes ayant été mélangées après la morsure de l'animal.
Elle apprend aussi l'importance des rêves chez les peuples animistes qui ont renoué avec leur territoire après la chute de la Russie soviétique.
Si ce récit n'est pas à la hauteur de celui de Philippe Lançon "Le lambeau" sur l'expérience du système hospitalier et la chirurgie maxillo-faciale notamment parce que Nastassja Martin garde l'usage du langage, il est passionnant sur sa dimension mystique pour la Miedka considérée comme étant moitié humaine et moitié ours.
J'aime beaucoup ses interrogations à ce sujet et son expérience d'écriture sur ses deux cahiers : le cahier diurne et le cahier nocturne pour exprimer la dualité qui la ronge entre l'intime et sa relation avec le monde, l'interne et l'externe en quelques sortes.
Ce récit donne vraiment envie de "Croire aux fauves".


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Croire aux fauves, tout est dit dans le titre.
Car cette rencontre entre un ours et Nastassja Martin, jeune anthropologue, a été violente et a laissé la jeune femme défigurée et en grande souffrance physique.
Pourtant tout au long de sa lente reconstruction, c'est à l'animal qu'elle pense, à ce que ce fauve a laissé en elle, à ce que la femme et l'ours ont en commun, ça tient du chamanisme, c'est un récit qui me dépasse un peu mais que j'ai trouvé fascinant, avec les nombreux retours en arrière, les évènements précédant l'accident.
Le passage de l'auteure dans les différents hôpitaux s'avère également très édifiant. Entre l'hôpital russe sommaire et le grand hôpital parisien, il y a des kilomètres ...
Un récit troublant.
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