Citations sur Nos résiliences (71)
Les jours qui suivaient son retour, Xavier était toujours ailleurs, toujours un peu loin, toujours un peu soucieux. La même question me hantait ; avait-il fait le voyage de trop ? Celui dont il ne reviendrait pas. Son esprit était-il encore là-bas ?
Quand une histoire débute, on est dans l'euphorie, dans le désir insatiable, on veut s'aimer, on veut se prendre, ne jamais être séparé ou alors juste le temps de susciter une frustration jouissive qui sera apaisée dans un corps à corps passionné.
- Son regard partit au loin, il pensait à sa femme, tout comme je pensais à Xavier. Nos douleurs étaient similaires. Malgré l'incongruité de la situation, il y avait un je-ne-sais-quoi de rassurant à ne plus se sentir seule.
Le manque, la faim de nous appartenir nous emmenaient dans un autre monde, notre monde. Il fallait le recréer, nous réadapter, nous le réapproprier.
- On s'est perdu tous les deux, on a oublié qui nous étions... On voulait juste survivre, même si on en paye le prix aujourd'hui. Je veux te retrouver, je veux nous retrouver...Je t'aime, si tu savais comme je t'aime...
- Encore ? sanglotai-je.
- Ça ne ferait pas si mal si je ne t'aimais plus.
Même dans une grande histoire d'amour, rien n'est acquis, il faut sans cesse en prendre soin et l'alimenter.
Mon père était un funambule des mots. Cela s’était imprimé dans chaque fibre de mon être, j’avais absorbé cette passion, elle était devenue mienne. Le sens de la communication, cet art de la séduction et cet amour pour les artistes qui étaient le propre des galeristes s’étaient inscrits en moi d’une manière irrévocable. Je laissais Grand-Père dire que ses gènes l’avaient emporté sur ceux de maman, sachant pertinemment que contredire un vieil homme buté comme lui aurait été une dépense d’énergie inutile.
Je ne savais plus ce qu’était la sensation d’être prise dans les bras, d’être effleurée, ou d’étreindre l’homme que j’aimais. Le manque de chaleur broyait mon cœur. On m’avait privée de la moitié de mon corps et celle qui me restait était devenue froide; mon épiderme, m’a bouché, mes sens s’étaient endormis.
Moi aussi, je souffre, moi aussi, j'étais perdue. Moi aussi j'avais besoin qu'on s'occupe de moi.
Ce que l’on dit dans la passion a bien peu de valeur, de parole quand la réalité, les responsabilités et la culpabilité remontent à la surface.