Il y a quelques années, j'étais sensible à ce genre de livre, maintenant beaucoup moins, même plus du tout. Je dois dire que je ne connaissais pas
Martin de la Soudière (chercheur CNRS, EHESS), je m'attendais alors à un livre historique, rigoureux, voire philosophique sur le paysage, à partir de ceux qui le traverse : poètes, géographes et montagnard. Un peu comme ceux, dans l'air du temps, de
Frédéric Gros sur le thème de la marche, avec une analyse précise des textes convoqués. Il ne s'agit pas de ce genre d'ouvrage. Pour cette raison, je nuancerai mon propos, car Arpenter le paysage, est un livre sincère, où l'auteur se dévoile et nous « raconte » beaucoup de lui.
Le concept clé de l'ouvrage est celui d'entrer dans le paysage : comment entre-t-on dans le paysage ? L'une des idées principales défendues est de dire que l'entrer dans le paysage se fait généralement dans l'enfance, ce qui fait qu'on est sensible à tel type de paysage ou tel autre. Pour cette raison, les 174 premières pages retrace l'histoire du petit Martin, en culotte courte qui suit son père, ses frères et ses soeurs, à la montagne, l'été. Se lever tôt, regarder par la fenêtre, préparer sa ration de raisins secs et de dattes. Photographie du fond familial à l'appui.
Ensuite, dans la deuxième partie, à l'instar de promenades, il y a une quinzaine de courts textes dont la teneur, les visées, l'intérêt varient et il est parfois difficile de bien saisir la cohérence de l'ensemble, sinon comme une série de variation sur un même thème, personnel, le paysage. En revanche, cette multiplicité de points de vue sur le paysage nous empêche de le saisir clairement : c'est la montagne, la forêt, le bout de ville, les gens, les saisons, la météo, etc. Ce sera d'ailleurs sa conclusion, « tous les regards se valent, légitimes, et toutes les postures. « Personne ne possède le paysage » écrivait Thoreau. »
Ces quelques textes présentent des « approches » singulières du paysage et il est possible d'y trouver quelques beaux passages. Certains écrivains, comme
Pessoa, n'entrent pas réellement dans le paysage (
Lisbonne), car ils y sont depuis toujours. Mais l'expérience de l'auteur lors d'un voyage étudiants, en montagne, qui dessinent n'apportent, à mon sens, rien.
Un autre point qui m'a été difficile est la vitesse à laquelle l'auteur passe d'un écrivain à un autre, enchainant les citations, comme autant de mots de passe, qui parfois nous empêche d'avoir accès à ce qu'il nous raconte. Chaque chapitre (de la deuxième partie) est associé à un auteur-écrivain-poète-géographe. Il s'agit souvent d'un prétexte, pour voir y associer des idées, des expériences personnelles, des lectures, citations… Il s'en inspire plus qu'il les approfondit.
Je m'attendais à un livre intense, dense, mais c'est un livre léger, qui virevolte, les cheveux dans le vent de la montagne. Ce qui n'est pas nécessairement une accusation, ni une critique, mais un avertissement pour le futur lecteur, car il m'a semblé que la présentation (titre et 4e), pouvait porter à confusion.