— Je suis rentré en France avec les bestioles, ça m’a coûté bonbon, et j’ai demandé à un détective privé de retrouver Aïcha. Il est allé à Aït Insah, il est revenu, il a enquêté, et bingo ! Il l’a localisée. En France. Vous savez où ? Eh ben ici, pardi. À Lantoufique. Eh oui. C’est pour ça que je suis là. Elle vivait avec la patronne du magasin Kriss Fring’. Aïcha, pouffa-t-il, aimait les femmes, j’avais vraiment aucune chance. Je débarque ici, je rencontre Kriss. Elle pleurait. Aïcha était restée un an avec elle. Le temps d’intégrer l’équipe locale, ensuite une autre à haut niveau. Et un jour Kriss la voit dans un bar avec un inconnu. Un agent, paraît-il. Il lui proposait un contrat du côté de Munich, 5000 euros mensuels, plus un logement, sans même un essai. Il lui demandait 4000 euros pour sa prestation. Kriss était complètement amoureuse. Elle envisageait de s’installer à Munich avec sa copine. C’est elle qui a payé. Une semaine plus tard, Aïcha quittait Lantoufique. Une fois sur place, elle devait appeler. Kriss attend toujours son appel.
Un peu plus tard, arpentant la plage, je reconnus cette façon de balancer les hanches en inclinant le buste. La grande blonde, en survêtement fuchsia, jouait au football avec des enfants. Cela me rassura. De chaque côté, deux maillots en boule dans le sable matérialisaient les cages.
Elle évoluait dans l’équipe majoritairement féminine. Sous sa veste et son pantalon roulaient ses seins-melons, le fuselé de ses cuisses. Je l’imaginais déjà au vestiaire après un match, ruisselante de sueur, mes assauts de bouc honorant la magie de son pied gauche, l’intelligence de ses changements d’ailes, son sens du placement. Fruit de mon obsession pour le foot ? C’étaient des tripoteuses de ballon hors pair qui m’avaient procuré l’illumination sexuelle, et avec Solange que j’avais connu l’au-delà de l’extase, et l’amour fou. Une reine du coup de pied arrêté, une sorcière de la lucarne, une orfèvre de l’aile de pigeon, m’exciteraient toujours mille fois plus qu’une superbe profane. Mon expérience avec Solange clarifiait ma libido : celle-ci ne s’extériorisait pleinement que dans l’univers footballistique. Seul dans mon fauteuil devant la télé lors de la finale de la Coupe du Monde 1998, au troisième but de la France contre le Brésil, qui lui assurait le titre, j’avais inopinément éjaculé dans mon caleçon.