La production capitaliste [...] détruit non seulement la santé physique des ouvriers urbains et la vie spirituelle des travailleurs ruraux, mais trouble encore la circulation matérielle entre l'homme et la terre, et la condition naturelle éternelle de la fertilité durable du sol.
Le capitaliste commence par se dispenser du travail manuel. Puis, quand son capital grandit et avec lui la force collective qu'il exploite, il se démet de sa fonction de surveillance immédiate et assidue des ouvriers et des groupes d'ouvriers et la transfère à une espèce particulière de salariés. Dès qu'il se trouve à la tête d'une armée industrielle, il lui faut des officiers supérieurs (directeurs, gérants) et des officiers inférieurs (surveillants, inspecteurs, contremaîtres), qui, pendant le procès de travail, commandent au nom du capital.
Tout progrès de l’agriculture capitaliste est non seulement un progrès dans l’art de piller le travailleur, mais aussi dans l’art de piller le sol; tout progrès dans l’accroissement de sa fertilité pour un laps de temps donné est en même temps un progrès de la ruine des sources durables de cette fertilité. Plus un pays, comme par exemple les États-Unis d’Amérique, part de la grande industrie comme arrière-plan de son développement et plus ce processus de destruction est rapide.
Si Le Capital demeure aujourd'hui une œuvre "en phase" avec l'histoire réelle et la culture universelle, parente des très grands livres de la littérature, c'est sans conteste en vertu du sentiment que ce livre orchestre de plus en plus profondément le chant du monde réel, malgré le vieillissement de nombreuses figures objectives. Mais c'est aussi sans doute parce que les lecteurs y perçoivent secrètement, sous les démonstrations massives, l'inquiétude d'un défi longtemps solitaire au Moloch capitaliste universel et à son arrogante prétention à l'évidence "naturelle". (Préface de Jean-Pierre Lefebvre)
L'accumulation du capital, qui n'apparait à l'origine que comme l'élargissement quantitatif de celui-ci, s'accomplit, ainsi que nous l'avons vu, dans un changement qualitatif continuel de sa composition, dans une augmentation permanente de sa composante constante aux dépens de sa composante variable.
Le 19 mai 2012, l'émission “Une vie, une oeuvre” dirigée par Matthieu Garrigou-Lagrange et diffusée tous les samedis sur les ondes de France Culture, évoquait la figure et l'oeuvre de Karl Marx. “Marx, l'horizon du monde” : Sur les traces de l'auteur du “Capital”, juriste et philosophe, mais aussi économiste et critique de l’économie politique, sociologue du travail, militant révolutionnaire et père d’une famille bourgeoise qui échappa à la misère grâce à l’amitié d’Engels. Par Thibault Henneton - Réalisation : Lionel Quantin. 1841, Karl Heinrich Marx [1818-1883] devient docteur en philosophie après une thèse sur Démocrite et Épicure. Le 2 septembre, Moses Hess écrit à un ami écrivain (Berthold Auerbach) : « C’est un homme qui a fait sur moi une impression extraordinaire, bien que nous ayons le même champ d’études ; tu peux t’attendre à faire la connaissance du plus grand et peut-être même du seul vrai philosophe actuellement vivant. Bientôt, lorsqu’il se manifestera publiquement par ses ouvrages et ses cours, tous les yeux d’Allemagne seront tournés vers lui […] Le Dr Marx, c’est ainsi que s’appelle mon idole, est un tout jeune homme, âgé tout au plus de 24 ans, qui donnera le coup de grâce à la religion et à la politique médiévales. Il joint à l’esprit philosophique le plus profond et le plus sérieux l’ironie la plus mordante ; représente-toi Rousseau, Voltaire, Holbach, Lessing, Heine et Hegel, je ne dis pas rassemblés, mais confondus en une seule personne ».
En réalité le docteur Marx sera conduit bien au-delà des frontières de l’Allemagne, à Paris, Bruxelles, Londres où il passe la majeure partie de sa vie d’exilé, avant qu’un dernier voyage ne le conduise à Alger. Non seulement juriste et philosophe, mais économiste et critique de l’économie politique, sociologue du travail, militant révolutionnaire et père d’une famille bourgeoise qui échappa à la misère grâce à l’amitié d’Engels. Quelques mois avant que ne se noue leur amitié, Engels écrit déjà, en 1842 (dans “Le triomphe de la foi”) : « Mais qui s'avance ainsi plein de fougueuse impétuosité ? C'est un noir gaillard de Trèves, un monstre déchaîné. D'un pas bien assuré, il martèle le sol de ses talons et dresse plein de fureur les bras vers les cieux, comme s'il voulait saisir la voûte céleste pour l'abaisser vers la terre. Il frappe avec rage et sans arrêt de son poing redoutable, comme si mille démons l'empoignaient aux cheveux. »
Avec :
Isabelle Garo, philosophe, professeur au lycée Chaptal (Paris), présidente de la GEME (Grande édition des œuvres de Marx et d’Engels en français)
Jean-Pierre Lefebvre, germaniste et traducteur, professeur de littérature allemande à l’ENS Ulm, traducteur du livre 1 du “Capital” (PUF) et producteur avec Yves Duroux d’un Atelier de Création radiophonique en 1983 « Marx, dernier voyage, dernier retour » (France Culture)
Jacques Bidet, philosophe, professeur émérite à l’Université Paris-Ouest, directeur honoraire d'Actuel Marx, président du Congrès Marx International
Frédéric Monferrand, doctorant à l’Université Paris-Ouest, prépare une thèse sur Marx sous la direction de S. Haber.
Pierre Dardot, philosophe, et Christian Laval, sociologue, auteurs de “Marx, prénom : Karl” (Gallimard, mars 2012)
Ainsi que des lectures de la correspondance de Marx (Ivan Cori et Lucile Commeaux)
Références :
SONS (entre autres)
- Auber : “La Muette” de Portici
- Schubert : “Marguerite au rouet”
- Immortal Technique : “Poverty of Philosophy”
FILMS
- “La Commune”, P. Watkins (2003)
- Charlie Chaplin, “Modern Times”
Hors Série Le Monde : “Marx, l'irréductible”, décembre 2011
http://boutique.lemonde.fr/hos-serie-...
Thèmes : Arts & Spectacles| 19e siècle| Economie| Philosophie| Karl Marx| Thibault Henneton
Source : France Culture
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