Citations sur Le bal des folles (727)
Il existe peu de sentiments plus douloureux que de voir ses parents vieillir. Constater que cette force, jadis incarnée par ces figures que l'on pensait immortelles, vient d'être remplacée par une fragilité irréversible.
– On va t'soigner. J'ai vu Charcot soigner des hémiplégies.
– Et si on me la soigne pas, à moi ?
Thérèse marque une pause. Elle n'a jamais vu Charcot soigner des patientes atteintes d'hémiplégie. Sa malhonnêteté envers Louise la gêne, mais mentir est parfois plus qu'une nécessité, c'est un confort.
Sa décision est prise depuis longtemps. Loin d'elle une vie comme celle de sa mère, assise à sa droite - une vie confinée entre les murs d'un appartement bourgeois, une vie soumise aux horaires et aux décisions d'un homme, une vie sans ambition ni passion, une vie sans autre chose que son reflet dans le miroir - à supposer qu'elle s'y voie encore -, une vie sans but autre que faire des enfants, une vie avec pour seule préoccupation de choisir sa toilette du jour. Voilà, c'est tout ce qu'elle ne souhaite pas. Autrement, elle souhaite tout le reste.
Il existe peu de sentiments plus douloureux que de voir ses parents vieillir. Constater que cette force, jadis incarnée par ces figures que l’on pensait immortelles, vient d’être remplacée par une fragilité irréversible.
Dans une salle d'examen, les deux individus qui s’y trouvent ne sont plus égaux, l’un évalue le sort de l’autre ; l’autre croit la parole du premier. L’un détermine sa carrière ; I'autrr détermine sa vie. Le clivage est d'autant plus prononcé lorsqu’une femme passe les portes du bureau médical. Celle-ci offre à l’examen un corps à la fois déiré et inconmpris par celui qui le manipule. Un médecin pense toujours savoir mieux que son patient, et un homme pense toujours savoir mieux qu'une femme : c'est l’intuition de ce regard-là qui rend aujourd’hui anxieuses les jeunes fenmes attendant leur évaluation.
(Page 123)
Mais la folie des hommes n’est pas comparable à celle des femmes : les hommes l’exercent sur les autres ; les femmes, sur elles-mêmes.
(Page 113)
u vois, j'me suis jamais sentie aussi tranquille qu'entourée de folles. Les hommes m'ont maltraitée. Mon corps est cabossé. J’boite, ma jambe m'fait mal. J'ai des douleurs à crever chaque fois qu'je pisse. J'ai une cicatrice qui m’traverse tout le sein gauche, on a voulu me l’couper au couteau. lci, j’suis protégée. On est entre femmes J'tricote des châles pour les filles. J’me sens bien. Non, dehors, plus jamais. Tant qu’les hommes auront une queue, tout l’mal sur cette terre continuera d’exister.
(Pages 111-112)
En septembre 1792, les sans culottes demandèrent à libérer les prisonnières de la Salpêtrière ; la Garde nationale s'exécuta, et les femmes, trop heureuses de s'enfuir, se retrouvèrent finalement violées et exécutées à coups de hache, gourdin et masse sur le pavé des rues. Libres ou enfermées, en fin de compte, les femmes n'étaient en sécurité nulle par. Depuis toujous, elles étaient les premières concernées par des décisions qu'on prenait sans leur accord.
(Page 102)
Son corset la gênait horriblement. […] Cet accessoire a clairement pour seul but d’immobiliser les femmes dans une posture prétendument désirable - non de leur pemettre d’être libres de leurs mouvements. Comme si les entraves intellectuelles n’étaient pas déjà suffisantes, il fallait les limiter physiquement. A croire que pour imposer de telles barrières, les hommes méprisaient moins les femmes qu'ils ne les redoutaient.
(Page 54)
Ele n'a pas le temps de répondre qu’il a baissé la tête et l'embrasse doucement. Il sent en elle une réticence et continue de l'embrasser, car c'est en forçant qu'on fait céder.
(Page 43)