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Critique de LaBiblidOnee


« Tout commença dans la steppe, dans le cercle des regards qui crépitaient avec le feu de camps. »


Avec ce conte tzigane sur ce dresseur de chevaux, j'ai voulu goûter au vent de liberté, à la magie poétique d'un cirque itinérant à l'ancienne, déambulant en roulottes au gré d'itinéraires aléatoires dans les villes et paysages qui leurs plaisent, dans ces steppes emplies d'espaces et de légendes.


« L'enfance ne fut qu'errance et mouvement, à la lenteur d'une paire de chevaux, la parfaite vitesse pour prendre la mesure du monde ».


Avec eux j'ai plié et déplié le chapiteau, écouté le violon de Jag autour du feu, lorsque « L'haleine des chevaux soufflait des nuages et les étoiles au ciel semblaient cligner des yeux. ».


J'ai brûlé les roulottes de ceux qui mourraient au fil du chemin, pour que leur esprit ne revienne pas nous hanter. J'ai marché sur un fil, ri et pleuré. J'ai vécu au présent, surtout, m'offusquant de ces frontières de plus en plus difficiles à franchir, de ces propriétés privées que les gadjé s'approprient, nous contraignant parfois à les voler.


J'ai appris à apprécier cette vie où « les livres étaient des prisons pour les mots, des prisons pour les hommes. Les premiers comme les seconds n'étaient libres qu'à virevolter dans l'air ; ils dépérissaient sitôt qu'on les fixait sur une page blanche ou un lopin de terre ».


Pourtant très vite, au fur et à mesure que les années 1940 approchaient, les prisons sont devenues le quotidien. D'abord personae non gratae interdits de séjour, les tziganes furent raflés au même titre que les juifs. le début de la fin, pour des hommes et des femmes habitués à virevolter au gré du vent.


« Pleure, mon amour, pleure, et qu'avec tes larmes s'en aillent tous tes malheurs… »


J'ai beaucoup aimé le début de ce récit, qui nous fait naître au monde tzigane avec le personnage principal, Anton. La seconde partie au coeur des camps et charniers de la seconde guerre mondiale est intéressante dans la mesure où elle présente un angle nouveau : l'enfermement pour une âme libre, quelqu'un pour qui les frontières sont déjà des concepts ineptes. Mais déjà, l'aventure commence à souffrir du fait que le peu de pages du roman ne permet pas d'approfondir la personnalité des personnages, et notamment d'Anton, de pénétrer son coeur et son âme. Ce parti pris a le mérite, comme dans un conte, de raconter beaucoup de péripéties sans s'appesantir, les mots virevoltant comme le feraient ceux, oraux et libres, des personnages eux-mêmes ; Mais l'écriture commence alors à me faire prendre de la distance avec lui. Et la rapidité avec laquelle la plume passe sur les années qui défilent continue à me distancer.


« L'engloutissement, la dévoration : c'est ainsi que certains tziganes désigneraient par la suite le génocide dont ils avaient été victimes, mais très peu en parleraient, à quoi bon ? Pour triompher du malheur, il faut le profaner. Et quelle plus belle profanation que la vie elle-même ? »


Malheureusement, la troisième partie sur une éventuelle renaissance au sortir des camps, n'a fait que creuser l'écart entre Anton et moi. Il parcourt beaucoup de kilomètres, vit beaucoup d'aventures, crée des numéros de cirque mais sans qu'on ne l'accompagne vraiment dans son cheminement ni dans son processus créatif, qui demeure superficiel. Ça permet une vue d'ensemble et demeure une belle histoire, mais racontée sans vraiment me la faire vivre. Un conte tzigane qui a aurait pu m'ébahir, mais ne m'a finalement qu'effleurée. Une caresse dont je reste en partie insatisfaite, ayant eu hâte de quitter des personnages dont je m'éloignais un peu plus à chaque page à cause d'une impression de survol.


Mais ce roman demeure très bien noté et je l'envoie volontiers à qui voudrait le tenter !
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