"_Tu me connais depuis trois jours, dis-je avec un petit rire, même si moi, ça me semble une éternité. Comment tu peux savoir que je suis quelqu'un de bien ?
_Je crois qu'on est tous des gens bien. Même Harrison, malgré son comportement merdique. C'est juste qu'on fait tous de mauvaises choses."
"_Qui est là ? appelle Papa qui sort de la cuisine avec à la main une poêle et un torchon.
Il se détend et baisse son arme à ma vue. C'est la différence entre la famille d'Harrison et la mienne : M. Boyd pointe un pistolet sur les intrus, mon père, lui, brandit une poêle à frire."
"C'est bizarre, comment fonctionne la vie. Même quand on se sent à l'aise et très satisfait de ses propres choix, le monde extérieur peut transformer un unique instant de stupidité en quelque chose d'affreux qu'on vous oblige à regretter."
"Je suis à cran depuis que M. Boyd a pointé un pistolet sur moi. J'ai compris d'un coup que ce que Kai et moi faisons est grave. Nous causons des ennuis à des gens, et les ennuis ont toujours des conséquences."
"Je ne fais déjà plus l'objet des commérages, comme si cette vidéo n'avait jamais existé. Je sais maintenant à quel point les ragots peuvent être toxiques pour les personnes concernées."
Les poings serrés, je slalome entre les tables en ignorant les remarques chuchotées sur mon passage, sans jamais quitter Harrison des yeux.
Il pâlit à mon approche.
- Vaness..., commence t-il.
Mais ma main qui s'écrase violemment contre sa joue le fait taire.
-j'ai couché avec un garçon qui nous a filmés et qui a envoyé la vidéo a tout le lycée. Oui, papa, tu as bien entendu. Il y a une vidéo de moi a poil qui circule sur internet, et je n'ai même pas un parent digne de ce nom vers qui me tourner.
La mâchoire lui en tombe. Tellement d'émotions différentes passent dans ses yeux que je n'arrive pas a les discerner les unes des autres. Il pâlit si vite que j'ai peur qu'il ne s'évanouisse devant moi.
-On n'a pas seulement perdu Maman, j'ajoute dans un murmure. On t'a perdu, toi aussi;
Nous sommes toutes les deux invisibles. Parler à Papa, c'est comme crier dans le vide. On a beau s'érailler la voix, hurler pour l'éternité, il n'y a jamais de réponse. Ce n'est qu'une coquille vide, comme si son coeur et son âme avaient été arrachés de sa poitrine quand Maman a rendu son dernier soupire, ne laissant derrière eux que le néant.
Sans prévenir, l'image de mon père se glisse dans ma tête : un homme au cœur mort et au regard éteint.
Je refuse de finir comme lui.
[...] Tout à coup, je me sens oppressée.
Impossible.
Je ne veux m'attacher à personne. Je ne peux pas prendre le risque.
Alors, brique par brique, je construis un solide mur de défense entre Harrison et moi.