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inconnu (03/03/1954)
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Etoiles Notabénistes : ******

Lover When you're near me
Traduction : Hélène Collon & Jacques Chambon

ISBN : Inconnu pour la nouvelle, parue pour la première fois en 1952 mais 9782290328439 pour "Nouvelles - Tome 1" chez J'Ai Lu dont est extrait ce texte

Auteur tout-à-fait atypique parmi ses pairs, parfois inconnu en France, en tout cas auprès des générations montantes, Richard Matheson a ceci de particulier que, plus que l'épouvante ou l'horreur à l'état pur, c'est l'angoisse dans toute sa diabolique splendeur qu'il parvient à faire naître à partir de toutes sortes de thèmes - celui de l'escamotage étant l'un de ses préférés. "Angoisse", "anxiété", "insolite inquiétant", tels sont les maîtres-mots de son art et c'est sans doute pour cela que ses nouvelles - comme ses romans - présentent toujours plusieurs niveaux de lecture.

Matheson, auteur extrêmement complexe, ne plaît pas en général au tout-venant. Certains le jugent trop simple (!) tandis que d'autres ne voient absolument pas pourquoi l'on fait tant de bruit autour d'une complexité qui, bien qu'ils la distinguent vaguement, reste à leurs yeux des plus floues. Il faut bien dire, soulignons-le une fois de plus, que, sur le plan stylistique, l'auteur américain ne s'embarrasse guère de fioritures. Ce qui accroît encore, on le devine, la perplexité de certains lecteurs, assez fins pour se demander comment une telle simplicité apparente peut leur faire aussi peur ...

Quand nous écrivons que Matheson a utilisé à peu près toutes les ficelles du Fantastique, nous ne sommes pas loin de l'exacte vérité. Certes, nous n'avons pas décompté le nombre exact de thèmes connus dans le genre depuis la première maison hantée de l'Antiquité, mais se borner à privilégier son amour pour les nouvelles où l'univers s'efface peu à peu, ou encore traitant des voyages dans le Temps, serait des plus restrictifs. Non seulement parce qu'il n'y s'y cantonne pas, bien sûr, mais aussi et surtout parce qu'il y ajoute la "Matheson Touch."

Prenons, par exemple, "Mamour, Quand Tu Es Près de Moi." Dès la première page, qui voit une fusée atterrir sur une planète colonisée par les Terriens, le lecteur qui n'aime pas ce type d'histoires se dit : "Oh ! Pas de chance ! Un truc qui se passe dans l'espace." Il n'a pas tout-à-fait tort, en ceci que, effectivement, l'action de la nouvelle se déroule dans la Station Quatre que la Société Wentner a fait construire sur une planète peuplée par une espèce évidemment extra-terrestre : les Gnees. Pour le reste, ce n'est pas du tout ce qu'il croit ...

Les Gnees de sexe mâle, qui sont de si parfaits abrutis que pas une seule Femen au sommet de sa haine n'arriverait à découvrir en eux un seul signe de perversité - c'est vous dire :o) - sont laids (selon nos critères, bien entendu), plutôt apathiques, et cependant bons travailleurs une fois qu'ils ont saisi la nature de la tâche qu'on leur demandait d'effectuer. Ce sont, disons, des manoeuvres, qui chargent la marchandise (l'auteur ne nous dit pas grand chose sur la nature de celle-ci d'ailleurs), l'amènent dans les entrepôts de la compagnie, l'y enferment dans des caisses qu'ils clouent eux-mêmes - et tout cela toute la journée. Ils ne parlent pas entre eux et ne semblent pas non plus pratiquer la télépathie. Quelques uns, néanmoins, ont établi des contacts verbaux, des plus élémentaires, il est vrai, avec les Terriens. Ceux-là, ce sont en général les contremaîtres.

Les Gnees habitent le village voisin, un village propre et clair. Chose assez étonnante - car ils sont nombreux - le village ne compte que des mâles, dont le salaire est constitué par des épices et des baies. de tempérament, ils sont vraiment calmes, ces Gnees, et semblent littéralement ne penser à rien.

La seule Gnee de sexe féminin sert de domestique au Chef terrien qui, fait exceptionnel pour la Société Wentner, est renouvelé très régulièrement tous les six mois. Physiquement, elle ne paie pas plus de mine que ses congénères masculins. Dans un élan railleur de pseudo-lyrisme, Matheson nous la dépeint comme une sorte de cône vêtu d'une robe, avec une tête cependant, n'ayez crainte, où brillent deux grands yeux noirs, un peu trop grands somme toute pour l'ensemble du visage, et où s'ouvre une bouche qui évoque une petite plaie.

David Lindell, qui vient tout juste de débarquer sur la Station Quatre, a un mouvement de recul bien légitime quand il l'aperçoit. Fort heureusement, le pilote qui l'a accompagné pour lui faire faire le tour du propriétaire, lui assure que toutes les Gnees sont comme ça, qu'elles sont aussi calmes que les Gnees masculins et qu'elles sont aussi très dévouées. Passé son premier geste de surprise un peu dégoûtée, Lindell hausse les épaules. Seul problème : la Gnee, elle non plus, ne parle pas. En revanche, à l'inverse des hommes-Gnees, elle communique très bien par télépathie et comprend vite.

On ne peut pas dire que ce mode de communication plaise vraiment à Lindell mais enfin, faute de mieux ... Il a d'ailleurs très vite l'occasion de constater, après le départ du pilote, que la Gnee est compétente, tient la maison en parfait état et fait de la bonne cuisine. L'ennuyeux, c'est qu'il lui est apparemment impossible de comprendre que demander abruptement : "Manger ?" par télépathie à quelqu'un qui ne pense absolument pas à ça et qui, de plus, n'a aucunement l'habitude qu'on débarque aussi brusquement dans ses pensées, fait sursauter désagréablement le malheureux Lindell. Celui-ci s'échine bien un temps à tenter de lui inculquer une forme télépathique de "frapper" avant d'entrer dans son cerveau mais, sur ce plan, la Gnee ne parvient pas à le suivre. Elle est d'ailleurs parfois amusante, la petite Gnee, et, le premier ou le deuxième jour, Lindell en sourit parfois, surtout quand il se surprend, en s'adressant à elle par la pensée, à la baptiser du nom de "Mamour." Pour un peu, il s'esclafferait. La Gnee, elle, ne rit pas - on pourrait d'ailleurs se demander si les Gnees savent rire - mais le surnom lui plaît et elle l'adopte sans problème.

Retenez-le bien, vous aussi, lecteur : c'est un détail très important, qui devient horrible quand on comprend ce qu'il recouvre.

Bon, bien sûr, être le seul Terrien mâle dans une station où il lui est impossible d'établir le contact avec d'autres congénères du même sexe, c'est tout de même pour le moins frustrant. Dans nombre de nouvelles et de romans de ce type (notamment chez Robert Silverberg ou Philip Jose Farmer), on a vu des liens d'amitié ou de sympathie se tisser entre colonisés et colonisateurs, du même sexe ou non. Entre êtres virils, on a des points communs, non ? Ah ! boire une bonne bouteille de whisky avec un Gnee - et pourquoi pas ? Et ensuite, se raconter des histoires salaces ! le rêve, non ? Ce serait en tout cas sympa. Mais la Barrière de l'Incompréhension est totale et, au fur et à mesure que s'écoulent les semaines, Lindell sent son caractère s'aigrir. Seul, tout seul, il l'est bel et bien.

Enfin, disons qu'il préférrerait l'être entièrement car, vraiment, Mamour est pour le moins envahissante. Oh ! elle n'est pas hostile, loin de là mais par exemple, détail qui horripile Lindell plus que tout, tous les matins, malgré l'interdiction qu'il lui en a faite, il trouve dans sa chambre un gigantesque bouquet de fleurs locales. Mamour trouve sans doute leur odeur charmante mais, pour le Terrien, elles sentent tout bonnement comme la chair morte. C'est comme Mamour, quand elle doit s'approcher trop près de lui, elle dégage une senteur qu'il n'apprécie vraiment pas.

Et puis, et puis ... Il a beau faire, il a beau hurler parfois (en pensées), Mamour ne peut résister à l'envelopper littéralement de ses pensées aimantes, attentionnées, inquiètes ... Oui, c'est réellement comme si elle envahissait, lentement mais sûrement, la partie la plus intime de David Lindell : son esprit ...

Eh bien, diront certains machos, il n'a qu'à la bousculer un peu et elle comprendra qu'elle va trop loin. Oui, mais voilà, sur la Maison de Fous des Trois Lunes - surnom donné sur la Terre à la Station Quatre - pas question de faire du mal aux indigènes ! S'il y a attaque physique, peut-être Lindell pourrait-il se justifier devant ses supérieurs d'un quelconque recours à la violence mais jamais encore on n'a vu un ou une Gnee agresser qui que ce soit : c'est une espèce vraiment très pacifique.

Enfin, il n'y a que six mois à tirer. Dieu merci ... Pourquoi six seulement au fait ? La Station Quatre est la seule sur laquelle la Compagnie pratique cette politique. de temps à autre, ce souvenir se rappelait à l'esprit de David Lindell. Rarement au début, puis de plus en plus parce que, bien sûr, lui aussi s'est fait au travail, a pris ses marques et dame, isolé dans son bureau et renâclant à rentrer trop tôt dans une maison où l'attendent les pensées de Mamour, il s'ennuie, il ressasse, il se fait tout un petit cinéma ... Il essaie aussi de dormir (il est vrai qu'il a un sommeil plutôt pénible depuis quelque temps, avec de ces rêves ... presque insanes ! on préfère ne pas vous les raconter) ou, ce qui est bien pire, l'on pense si l'on n'a pas grand chose à bouquiner ou, plus précisément, si l'on ne parvient pas à fixer son attention sur autre chose que ... Mamour et la vie auprès de Mamour.

Certes, il y a aussi la réserve de bandes magnétiques des prédécesseurs de Lindell. Pourquoi ne pas consulter ces images, histoire de se distraire un peu ? ... Un jour, David se décide. Et sa décision prend effet, vous vous en doutez, après nombre d'incidents ... curieux ... inquiétants ... oui, avouons-le, carrément déstabilisants, entre Mamour et lui.

Pourra-t-il jamais les oublier, ces incidents, ces vidéos, la Station Quatre, les Trois lunes et, bien sûr, Mamour ? ... La fin de la nouvelle vous le dira. Mais gageons que vous soupçonnez déjà la réponse ... D'ailleurs, voyez, nous qui avons fait sa connaissance il y a à peu près quarante-trois ans, nous n'avons jamais oublié cette bonne vieille Mamour ... ;o)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Boire ?

Il sursauta, surpris au beau milieu d'un bâillement, et ses poings se crispèrent si violemment que ses phalanges craquèrent.

Debout à côté de lui, elle lui tendait un plateau sur lequel était posé un verre. Il le prit tandis que son cœur, passé le choc initial, s'apaisait.

- "A ta place, je frapperai ou quelque chose comme ça," suggéra-t-il.

Les yeux énormes, à présent elliptiques, le dévisageaient sans comprendre.

- "Bah, ça ne fait rien," dit-il après avoir goûté le breuvage tiède et aigrelet. Il fit claquer sa langue et s'accorda une seconde gorgée, plus généreuse. "Rudement bon. Merci, Mamour."

Il tressaillit. Voilà ce qui s'appelait être pris au dépourvu. Mamour ? De tous les noms les plus improbables de l'univers ... Il la regarda à la dérobée, la gorge chatouillée par une furieuse envie de rire.

Elle n'avait pas bougé. Son visage était déformé parce qu'il interpréta comme un sourire. Mais sa bouche n'était pas faite pour sourire.

- "Bon, quand est-ce qu'on mange ?" demanda-t-il, vaguement mal à l'aise devant ses yeux immobiles et larmoyants.

Elle pivota sur ses talons et s'empressa de gagner la porte. Puis elle se retourna.

Un message lui parvint. Tout est prêt.

Il sourit, vida son verre, se leva et suivit ses petits pas pressés dans la pénombre du couloir. ... [...]
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[...] ... Ils traversèrent le vestibule. Au passage, Lindell avisa une petite cuisine carrelée, dans un ordre parfait. - "Est-ce que la femme de service, cette Gnee, sait cuisiner ?" demanda-t-il.

- "A ce que j'ai entendu dire, tu seras traité comme un roi.

- C'est déjà ça. Au fait, tu sais pourquoi on appelle le coin de ce drôle de nom - la Maison de fous des Trois lunes ?

- Qui l'appelle comme ça ?

- Les copains ... sur Terre.

- Ils racontent n'importe quoi. Je suis sûr que tu te plairas ici.

- Mais pourquoi est-on relevé tous les six mois ?

- Tiens ... voilà ta chambre."

Quand ils entrèrent, elle était en train de faire le lit et leur tournait le dos. Ils laissèrent tomber les bagages et elle fit volte-face.

Les mains de Lindell tressaillirent. Bah, se dit-il, moqueur, j'ai vu pire.

Elle portait une lourde robe attachée au cou, formant une espèce de tronc de cône qui balayait le sol. On ne voyait que sa tête.

Une tête aplatie à l'épiderme granuleux, rose et glabre. Un peu comme le ventre couperosé d'une chienne prête à mettre bas, songea Lindell. En guise d'oreilles, deux cavités de part et d'autre de sa face camuse, privée de menton. Un embryon de nez pourvu d'une seule narine. Des lèvres épaisses, simiesques, délimitaient le petit orifice circulaire de la bouche. Salut, beauté, eut envie de dire Lindell.

Elle s'approcha sans bruit tandis qu'il la dévisageait en clignant des yeux. Puis elle plaça une main moite et spongieuse dans la sienne.

- "Salut," dit-il.

- "Elle n'entend pas," fit Martin. "Elle communique par télépathie.

- C'est vrai, j'avais oublié." Bonjour, pensa-t-il, et un Bonjour le salua en retour. Je suis contente de vous avoir.

"Merci." Elle avait l'air convenable, se dit-il. Bizarre mais accueillante. ... [...]
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