23h10. Un homme, aux yeux agrandis par une frayeur sans nom, tient à bout de bras son portable : sur l'écran, un SMS s'affiche, qu'il vient de recevoir. Dans son dos, un autre homme, qui semble déterminé, braque un revolver sur le premier. Tout va se jouer en
3 secondes, dans un jeu de reflet qui semble pourtant s'étirer à l'infini.
Un récit condensé dans un temps infinitésimal que
Marc-Antoine Mathieu, auteur de génie, s'amuse à étirer au long de 80 pages, dans un graphisme noir et blanc déserté par les bulles, mais où les mots ne sont pas forcément absents : des journaux ou affiches peuvent en être porteurs.
Le procédé employé ici consiste en d'interminables jeux de miroirs, la lumière se reflétant de points en points. Des zooms se déploient, d'un point à un autre, amenant une démultiplication de l'espace, à l'infini, là où le temps du récit est pourtant infinitésimal.
« 3s » peut se lire comme une véritable enquête policière :
Marc-Antoine Mathieu glisse quelques indices, çà et là, invite le lecteur à émettre des hypothèses, le mène en bateau, jusqu'à un dénouement, …, sur fond de magouilles footballistiques.
Une version numérique complète utilement la version papier sur le site des Editions Delcourt. La BD papier défile, case après case, amenant une certaine cohérence d'ensemble, redonnant un fil conducteur qui manquait – peut-être – à une lecture sur un support papier. J'ai pu encore améliorer ma compréhension de certains événements, même si d'autres m'échappent toujours. L'internaute peut contrôler le temps du défilement, l'accélérant ou le retardant à volonté.
Un procédé habile, celui des jeux de miroirs, mais qui peut, à la longue, lasser le lecteur par son déploiement interminable. Une expérience papier-numérique particulièrement originale, à découvrir !