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Critique de Brooklyn_by_the_sea


Il y a les romans doudous et les romans bourre-pif ; celui-ci relève clairement de la seconde catégorie.

Nicolas Mathieu raconte la rencontre, 25 ans après le lycée où ils se sont croisés, de Christophe et Hélène. A l'époque, il était la belle gueule champion de hockey-sur-glace, et elle, la bûcheuse bêcheuse. Rien entre eux ne s'est passé alors, même si elle en rêvait. Et tout à coup, elle va tenter de le conquérir à nouveau -mais pareille aventure a-t'elle encore un sens, alors que tout les sépare désormais ?

Je sors de ce roman KO. J'ai l'âme meurtrie, et je ne sais pas si je l'ai aimé ou détesté, tant il m'a fait mal. Nicolas Mathieu cogne à chaque page avec une force de malade, et sans jamais faiblir. On ne se méfie jamais assez des types à lunettes qui portent des pulls à col rond sur leurs chemises bien boutonnées.

Et pourtant, c'est brillant, c'est puissant. L'auteur nous offre une radioscopie de la France des années '90 à 2017 d'une précision douloureuse. Tout y passe : l'enfance, l'adolescence, la vie adulte, la vieillesse, le couple, les grandes écoles, l'esprit de revanche, le monde du travail, la capitale, la province, les premiers de cordée et les autres, tous les autres. Nicolas Mathieu se saisit de chacun de ces sujets avec une justesse impitoyable, mais sans jamais juger, ni se complaire dans son rôle de conteur : on sent, on sait, qu'il écrit pour lui autant que pour nous.
Et tout sonne effroyablement vrai dans ce roman, des aspirations pleines d'audace et d'assurance de la jeunesse, aux barouds d'honneur rageurs de la quarantaine, où l'on tente tout pour repousser les renoncements prêts à nous engloutir. Autant de lucidité m'a laminée. (La prochaine fois, je lirai Foenkinos, ce sera plus simple).

Mais tout n'est pas que souffrance. En romancier tranquille et talentueux qu'il est, Nicolas Mathieu nous fait nous attacher à ses personnages, piteusement et magnifiquement humains (bien que je n'aie pas apprécié Hélène), et l'on a envie de connaître leur devenir. Il alterne les époques et les chapitres consacrés à l'un ou l'autre de ses protagonistes, mais sa maîtrise de la narration est telle que l'on n'est jamais perdu. En outre, son écriture est un pur plaisir de littéraire.
Ce qui ne m'a pas empêchée d'avoir envie de jeter ce roman monstrueux contre un mur, sitôt terminé, tant il m'a fascinée et mortifiée. Mais un livre qui remue autant ne peut qu'être remarquable et exceptionnel (même si on se retrouve avec du Sardou en tête pendant toute la lecture).

Alors, blindez-vous avant de le lire à votre tour. Prévoyez des pauses, des petits remontants, des sucreries, et respirez par le ventre. Mais pour Sardou, il n'y a rien à faire.
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