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EAN : 9782756014470
168 pages
Delcourt (24/09/2008)
3.84/5   25 notes
Résumé :
Dans Le Pauvre Type, Joe a une petite amie, Trish, mais il fantasme sur une copine à elle et poursuit sans vergogne ses pratiques masturbatoires. S'il fallait établir un portrait-robot du mâle occidental incapable de s'engager dans une relation affective, égocentrique, radin et obsédé sexuel, l'image obtenue ressemblerait sans doute à cet autoportrait non complaisant. Joe Matt en rajoute, paraît-il, à tel point qu'on se demande parfois quel est l'objectif d'une tell... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
"Le pauvre type" est le deuxième tome autobiographique écrit et illustré (en noir & blanc) par Joe Matt. Il reprend le cours de sa vie là où il l'avait laissé à la fin de Strip-tease. Il contient les chapitres prépubliés dans les numéros 1 à 6 de "Peepshow", entre 1992 et 1994.

Ce tome commence avec une séance de masturbation de Joe. Trish rentre de ses cours et lui demande ce qu'il a fait de sa journée ce qui l'énerve instantanément dans la mesure où il n'a pas la conscience tranquille. Ils habitent ensemble dans la banlieue de Toronto. Joe Matt passe ses journées à glander sans avancer dans ses bandes dessinées, pendant que Trish poursuit ses études de graphiste. de temps à autre, il se rend à Toronto pour papoter avec Chester Brown et Seth, 2 autres auteurs de BD canadiens. Il mate les filles dans la rue et remarque une superbe métisse qui par hasard va être amenée à travailler avec Trish. Au fil des semaines ses relations avec Trish se détériorent et il finit par prendre la décision de louer une chambre chez un couple de retraité à Toronto même. Il fait tout pour éviter l'autre locataire un peu envahissant. Il ne voit plus Trish qu'un week-end sur deux. Il rencontre un fan (joueur de basse dans un groupe de rock) dans un magasin de comics et il continue de fréquenter Chester Brown et Seth. Il peut enfin visionner ses disques de personnages, et se masturber à volonté, sans ressentir de culpabilité.

Avec ces épisodes, Joe Matt abandonne les tâtonnements graphiques pour adopter une mise en page rigoureuse de 6 cases par page (3 rangées de 2 cases), avec une fusion de temps à autre de 2 cases d'une même ligne, ou de 4 cases. Sa façon de dessiner les personnages oscille entre un style très simple à l'image de sa personne sur la couverture, ou des expressions plus travaillées pour le visage. Il a abandonné les rendus plus simplistes qu'il utilisait dans ses premières planches. Il continue d'exagérer les expressions des visages pour accentuer un sentiment, le plus souvent à des fins comiques, le plus souvent à ses dépends. Parfois il détaille plus un visage pour le rendre un peu plus réaliste ce qui a pour effet de faire changer l'individu de registre : d'un personnage imaginaire, il s'incarne pour se rapprocher de son modèle réel. Sans créer de véritable hiatus, ce glissement dans le mode de représentation rend les comportements et les réactions affectives plus proches des nôtres, et fait baisser le capital sympathie des protagonistes. Cela accentue l'amertume et l'alacrité des relations. Matt a pris le parti de systématiser les décors dans plus de 80% des cases. Ils sont dessinés avec le même niveau de simplification que les individus, tout en conservant un bon niveau de détails. du coup le lecteur peut se projeter dans l'environnement de Joe Matt, observer les intérieurs dans lesquels il évolue, marcher à ses cotés dans la rue, se faire une idée des cafés qu'il fréquente avec Chester Brown et Seth, ou avec une amie.

Coté autobiographique, Joe Matt a également franchi un palier. La première page le dépeint comme à la recherche à tout prix du plaisir physique en solitaire. Ce n'est pas seulement l'aspect régulier et organisé de cette pratique qui marque le lecteur, c'est aussi la volonté de Matt de se dépeindre sous son jour le moins favorable. Les 4 premiers épisodes constituent une longue enfilade de mise en avant de ses travers, sans rien qui vienne contrebalancer cette approche. Il s'installe donc un malaise assez désagréable à assister à la dégradation systématique de Joe Matt, par l'illustration de tous ses travers. Ce malaise est renforcé par la force de conviction de la narration. Oui Joe Matt est égoïste, pingre, égocentrique, asocial, dépourvu d'empathie vis-à-vis de Trish, mesquin, dépourvu d'assurance et de confiance en lui, geignard, indécis, profiteur, etc. À force le lecteur finit par ressentir une forme de dégoût engendrée par le fait qu'il est facile de reconnaître en soi chacun de ces défauts. Cette accumulation finit par mettre mal à l'aise du fait que l'apparence de Joe Matt incite à l'empathie, alors qu'il se dénigre page après page, sans que n'apparaisse ne serait-ce qu'une seule qualité. le lecteur prend de plein fouet le manque de pudeur de Joe Matt quant à ses imperfections, et le fait de se reconnaître en lui.

Heureusement, en cours de route Joe Matt prend soin de faire dire à son personnage que son double de papier n'est pas vraiment lui. Il faut se souvenir que cette autobiographie, comme tout récit basé sur le réel, est avant tout une construction narrative. À ce petit jeu, Matt est très fort pour construire un double de fiction qui concentre toutes ses névroses, sans aucune qualité rédemptrice. Il effectue un travail de réflexion sur lui-même pour montrer tous les mécanismes affectifs qui lui pourrissent la vie, qui font de lui un être humain à la fois méprisable, et pitoyable, humain comme tout à chacun. Dans les 2 derniers chapitres, Joe regagne de l'entrain avec l'espoir de lier une nouvelle relation amoureuse. le ton de l'histoire s'en ressent et l'humour reprend le dessus sur l'amertume. Il apparaît également que Matt a du mal à dépasser le besoin d'absolu propre à l'adolescence. Sa quête de la femme parfaite évoque l'individu incapable d'accepter la réalité, de composer avec le quotidien.

Loin d'être un simple journal intime dessiné au fil de l'eau, "Le pauvre type" est bel et bien un roman graphique bénéficiant d'une construction littéraire élaborée. Joe Matt expose ses défauts divers et variés dans une chronologie basique, tout en décortiquant ses sentiments pour les montrer et exposer l'intensité de son mal être. À la fin du tome, le lecteur a ressenti ce mal être avec acuité et il se rend compte que Matt a été capable de transmettre ses tourments, sans jamais recourir à un langage psychanalytique. Il a réussi le tour de force peu commun de parler de sa vie intérieure avec honnêteté et franchise, de ses sentiments, sans jamais s'appuyer sur une théorie psychologique ou une autre. Derrière une apparence visuelle simple, des récriminations et des jérémiades incessantes, Joe Matt expose sa vie intérieure et parle de la condition humaine, avec une sensibilité un peu masochiste et une pertinence qui touchera tous les lecteurs (masculins qui se reconnaîtront dans ces atermoiements et ces questionnements). Les lectrices auront une vision peu flatteuse de la condition masculine. Joe Matt continue son exhibitionnisme dans Epuisé.
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Le pauvre type, c'est l'auteur même qui se met en scène dans ses BD, avec lui ses amours compliquées, sa vie sexuelle désastreuse et ses fidèles compagnons de route à qui il raconte ses frasques ont l'impression de "faire des montagnes russes" tant le personnage /auteur se complique la vie, ne sait pas vivre au présent, est toujours en quête d'aventures féminines qu'il détruit aussitôt par son comportement instable d'éternel insatisfait.
Le dessin du personnage ressemble à Woody Allen (comme le psy dans South Park) et les situations inextricables aussi. Dès qu'une femme le quitte -alors qu'il a tout fait pour -il est jaloux, l'imaginant avec un autre mais il n'est pas très clair non plus lorsqu'il est en couple. Bref, il aime à se rendre la vie difficile, s'en plaint constamment, recommence.
Joe Matt n'a pas de censure sur sa vie privée et dévoile aussi bien ses réelles pensées (du moins on y croit, c'est donc bien amené) que ses périodes masturbatoires et c'est assez rare chez un auteur qu'il soit de BD ou de roman. Les hommes (à part quelques lourdauds indécrottables) ont souvent honte de ce qu'ils pensent des femmes et de leurs fantasmes, Joe Matt, non et pour cela, il tend à rendre sa vie dessinée universelle car, soyons honnêtes, beaucoup s'y reconnaîtront.
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Pourtant pas gros amateur de BD, ni de comics, je dois avouer que le pauvre type de Joe Matt m'a beaucoup plu !

L'auteur, qui fait ici son autoportrait, est ce qu'on appelle un raté. Un vrai. Et pourtant il nous touche. Certainement parce qu'on a tous quelque chose d'un raté chez nous. Il y a un peu de nous chez lui.

C'est quand même dingue d'avoir une si mauvaise image de sois par contre. Mais c'est encore plus incroyable de l'assumer (où presque) et de raconter tout ça dans une BD !
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Une belle découverte de bande dessinée autobiographique. Joe Matt se décrit comme un pauvre type. Il est question des rebondissements de sa vie amoureuse.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
- ... depuis, elle m'adresse à peine la parole. Je te dis, Seth, j'en ai ma claque.
- on dirait.
- elle me demande sans cesse de faire des trucs avec elle... des trucs qui m'intéressent pas, que je peux même pas payer ! Et quand je dis non, elle me traite d'égoiste !
- tu es egoiste.
- je sais... mais ça fait quatre ans. Je comprends pas qu'elle cherche encore à me changer.
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Hé, mais tu peux faire ce que tu veux dans ce putain de monde, voire même en tirer profit! Crois-moi. Il suffit de suivre sa passion et le reste suit. Regarde-moi, par exemple. Je raconte ma pauvre vie en bande dessinée et les gens se battent pour acheter mes comics! C'est pas une preuve, ça?
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Vidéo de Joe Matt
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