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EAN : 9782710324652
207 pages
La Table ronde (14/02/2002)
4.5/5   5 notes
Résumé :

« Le Défi s'adresse aux adolescents. Pour suivre Matzneff, il faut aimer l'insolence et renoncer aux obligations, à la sécurité. "Suis-moi", mot d'ordre et invitation. Les dieux et les voleurs d'enfant, c'est bonnet blanc et blanc bonnet : ils dérangent. Jeter un défi, c'est aussi apparaître nu, donc vulnérable. De ce point de vue, Matzneff a pris beaucoup de risques. Je salue très bas ce gladiateur courag... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un très beau petit livre.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Lettre à Tristan

Avec une indifférence digne de l'antique, vous avez échoué à votre bachot. Ce n'est pas une tragédie : vous avez seize ans, toutes vos dents et l'avenir devant vous. (...) L'important n'est pas d'être un intellectuel, mais d'être intelligent. Soyez un intelligent, Tristan, c'est à dire un esprit délié, indépendant, apte à réfléchir par lui-même, à comprendre, à refuser, à s'enthousiasmer, à aimer.
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Le temps approche où les dragons asiatiques déferleront sur notre monde abâtardi, et il n'y aura pas lieu de se lamenter, car lorsqu'un fruit est pourri, non seulement il est indifférent qu'il tombe, mais encore il est bon de secouer l'arbre afin qu'il s'en détache promptement. Pour résister aux dragons, l'essentiel n'est donc pas de défendre n'importe quel Occident, mais que l'Occident soit tel qu'il vaille d'être défendu. Ou bien l'Europe retrouvera son génie profond, ou bien peu nous chaut qu'elle soit submergée par l'envahisseur chinois.

L'Asie me fascine depuis que je suis enfant. On me dit que celle d'aujourd'hui ne ressemble pas plus à celle dont rêvait Hôlderlin que l'Europe contemporaine à celle des moines et des chevaliers. Soit, mais l'Orient continue nonobstant de me donner le vertige. L'Orient, terre favorite de l'ascétisme et de la volupté, terre qui a vu naître Bouddha, Dionysos et Jésus-Christ.

Face à un Occident embourgeoisé, crétinisé par l'argent, la Chine communiste reste le dernier bastion de la foi. Tandis que le monde blanc s'abandonne à une laxité idéologique qui ne peut manquer de lui être fatale, les Chinois se veulent et s'avouent fanatiques avec une détermination propre à nous effrayer.

Car que disent les Chinois ? Ils disent que le capitalisme c'est le diable, et qu'on ne pactise pas avec le diable. Aux Soviétiques qui proclament qu'un compromis est préférable à la guerre – la « coexistence pacifique » – ils répondent que 'idéal est un bien sacré, que l'idéal, comme l'honneur, ne se divise pas, que l'idéal ne se vend pas trente deniers, et qu'il vaut mieux mourir en défendant les valeurs qui vous sont chères que vivre en les reniant.

A une époque où les disciples de Celui qui n'était pas venu apporter le repos mais le glaive remettent au fourreau l'épée flamboyante de leur maître et accrochent le tout à la panoplie poudreuse de la chrétienté défunte, les Chinois – qui seuls ne craignent pas la bombe atomique – conservent à l'histoire sa dimension apocalyptique. (pp. 83-85)
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Dès les premiers beaux jours, nous commençons d'étouffer dans ces cercueils de pierre que sont les grandes villes. Nous songeons aux descentes de rivières, aux expéditions à travers bois, aux nuits à la belle étoile ; nous rêvons au mare nostrum, au sable chaud et doré des plages d'Afrique, à l'Orient fabuleux. Après avoir passé l'hiver comme des marmottes, emmitouflés dans nos cache-nez et nos habitudes, nous brûlons du désir sacré et irrésistible d'être heureux.

C'est alors que nous comprenons que nous n'avons jamais cessé d'être des païens. Si nous sommes attachés au Galiléen, en dépit du manque de savoir-vivre qu'il témoigna dans sa lutte contre les autres dieux, c'est parce que le christianisme, héritier involontaire de ces cultes gréco-romains et orientaux qu'il a autrefois combattus, est un des derniers réceptacles de la beauté, de la noblesse, du mystère et de la fantaisie d'un monde qui devient chaque jour plus laid, plus grégaire, plus raisonnable et plus ennuyeux. Mais la véracité de la doctrine importe peu : c'est de poésie que nous avons soif, et non de vérité.

Qu'elle se nomme Osiris ou Jésus-Christ, la divinité triomphe de la mort chaque année à la même époque : c'est au printemps que les dieux ressuscitent. Or initiés et fidèles savent que seul Éros peut vaincre Thanatos et c'est pourquoi le temps de la résurrection est aussi le temps de l'amour : le mois de mars, c'est l'embarquement pour Cythère, c'est l'invitation au bonheur.

De telles considérations ne sont pas les rêveries d'un esprit qui se réfugie dans l'archéologie afin d'échapper à la grisaille contemporaine, mais des réalités sensibles, évidentes pour qui possède le sens du sacré et ce grain de folie qui est le privilège des poètes et des enfants. (pp. 27-29)
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Gœthe disait que la religion était la poésie de l'humanité. Si la civilisation moderne est fade, c'est parce qu'elle est totalement désacralisée. Triste époque que celle où le merveilleux et charmant saint Nicolas est devenu le grotesque Père Noël des Galeries Lafayette, avec sa fausse barbe en coton et son appareil photographique ; où les agapes fraternelles de la Nativité (du mot grec agapé, qui signifie amour) se sont transformées en ces répugnants réveillons où les bourgeois, coiffés de chapeaux en papier, s'empiffrent de dinde aux marrons et de foie gras.

Noël devrait cependant être pour les hommes de notre temps l'occasion de retrouver ce sens du sacré. Ainsi, les chrétiens occidentaux qui, s'attendrissant sur le petit enfant dans la crèche, sont surtout retenus par l'aspect sentimental de l'événement, pourraient étudier avec profit la tradition orientale de Noël qui, moins folklorique et pittoresque que la leur, est plus théologique et mystérique : « Le ciel et la terre s'unissent en ce jour où le Christ est né. Aujourd'hui Dieu est venu sur terre et l'homme est monté aux cieux. Aujourd'hui est contemplé dans la chair Celui qui par nature est invisible », chante l’Église orthodoxe aux vigiles de la Nativité.

L'Incarnation du Christ marque la fin du règne de Satan et de l'esclavage de l'homme. Noël est donc autant que Pâques une fête de la Résurrection et la joie illumine nos cœurs, car l'étoile qui nous mène vers la crèche nous guide également vers la cité sainte dont parle l'Apocalypse, la Jérusalem nouvelle où il n'y aura plus ni mort, ni deuil, ni gémissement, ni douleur, et où Dieu lui-même essuiera toute larme de nos yeux. (pp. 38-40)
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L'homme déchu, chassé du paradis après la faute originelle, est condamné par Dieu à osciller perpétuellement entre la douleur et l'ennui. Ce que les optimistes appellent « le progrès » supprimera peut-être celle-là ; il ne fera qu'accroître celui-ci. La civilisation des loisirs que nous annoncent les technocrates ne sera qu'une civilisation de l'ennui ; il suffit pour s'en convaincre de considérer les distractions grâce à quoi nos contemporains tâchent d'échapper à leur vide, par exemple de se rendre dans telle boite de nuit à la mode, sombre, enfumée, tendue de rouge, où les membres de la jeunesse dorée payent très cher le droit de s'ennuyer ensemble et qui, chaque fois que j'y vais, me donne une idée précise de ce que doit être l'enfer.

Car l'arme principale du diable, ce n'est ni la beauté ni la sensualité, c'est l'ennui. Regardez donc la tête des gens dans la rue, dans le métro, courant à leur travail en semaine ou se promenant le dimanche, et dites-moi si la dernière invention du diable n'est pas de faire périr ce monde d'ennui, un si monstrueux et irrémissible ennui que pour y échapper les hommes se précipiteront dans le suicide, collectif ou individuel, c'est la même chose, car on ne se fait sauter la cervelle que par impuissance à faire sauter le monde. Éteignez vos téléviseurs, stoppez vos voitures, décrochez vos téléphones, faites silence autour de vous et en vous, et vous entendrez rire le diable – interminablement. (pp. 35-36)
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Vidéo de Gabriel Matzneff
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