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Critique de melusine1701


Le personnage de Milady est l'un de ceux de la littérature que je préfère: l'archétype de la méchante, la femme fatale dans tous les sens du terme, qui sème la mort sans se salir les mains ou presque, qui fascine mais qui fait froid dans le dos, qui traverse comme un spectre un des meilleurs romans d'Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, en y laissant pourtant une empreinte indéniable. Cette bande-dessinée propose d'en faire une héroïne, de raconter l'histoire de son point de vue à elle. Si elle n'en devient pas moins fatale, elle la remet aussi dans la place qui est celle d'une femme dans une intrigue d'homme: ici, c'est pour s'être sauvée du couvent avec le moine dont elle était amoureuse qu'elle a été marquée d'infamie jusqu'à la fin de ses jours, et que c'est cette marque qui l'oblige à se méfier des hommes qu'elle croise. Milady est une femme désabusée, qui ne croit plus en l'amour, et même les sentiments que Dumas lui avait donné pour de Warde ne sont que feints pour les besoins de son travail d'espionne. Son enfant lui-même ne lui inspire pas grand-chose. Histoire d'arranger la situation, elle subit pas moins de deux viols, puisque deux hommes aussi éhontés que grossiers profiteront des circonstances troubles pour se glisser dans son lit. Elle en est aussi froidement terrifiante que profondément pathétique.
Agnès Maupré propose donc une version profondément moderne de ce personnage, non plus baignée du romantisme de Dumas mais avec un cynisme non dissimulé et une grande complexité du personnage. Souvent victime, animée par un désir de vengeance qui passerait presque pour de la justice, elle n'est pourtant pas irrécupérable puisqu'elle finit par aimer son enfant et se confie volontiers à Constance Bonacieux, qu'elle retient prisonnière pour atteindre D'Artagnan mais qu'elle considère comme sa seule amie. Un subtil mélange de cruauté et de tendresse se distille tout le long de ces deux tomes, porté par un dessin vif et franc, sans fausse pudeur, et un langage qui ne s'embarrasse pas de lourdeur historique: Milady de Winter vit peut-être dans un décor du 17ème siècle, mais elle est peut-être trop avant-gardiste pour cette époque qui fait d'elle une espionne meurtrière, et elle s'accommode plutôt bien du coup de jeune du crayon et de la langue.
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