Citations sur L'homme de la montagne (90)
Il ne se passait jamais grand-chose sur le versant de la montagne où nous vivions et grandissions, Patty et moi. Et nous n’étions même plus abonnés à la télévision. En attendant qu’un événement inattendu survienne, nous inventions des situations. Le temps, c’était tout ce que nous possédions.
Les filles de treize ans [qui] sont grandes et petites, grosses et maigres. Ni l’un ni l’autre, ou les deux. Elles ont la peau la plus douce, la plus parfaite, et parfois, en l’espace d’une nuit, leur visage devient une sorte de gâchis. Elles peuvent pleurer à la vue d’un oiseau mort et paraître sans cœur à l’enterrement de leurs grands-parents. Elles sont tendres. Méchantes. Brillantes. Idiotes. Laides. Belles.
Le risque est grand pour un romancier de s'imaginer que les événements puissent se dérouler dans la vie réelle comme dans une oeuvre de fiction.
"Du seul mariage que j'avais observé de prés- celui de mes parents-, j'avais acquis une piètre opinion de cette institution. Le mariage, c'était la porte ouverte au divorce, et le divorce avait brisé le cœur de notre mére, éloigné notre père.....Si c'était à cela que menait le mariage: une femme qui ne serait plus jamais heureuse, quel besoin en avait- on? En tout cas plutôt être celle qui se tire que celle qu'on laisse......."
Depuis le divorce, elle [ma mère] habitait une contrée froide, grise, d'une tristesse irrémédiable, comme si le départ de notre père avait chassé de sa vie toute lumière. Elle nous aimait, c'était indéniable, mais son comportement évoquait celui d'une personne atteinte d'une maladie contagieuse, qui redoute de contaminer les gens qu'elle aime en s'approchant trop près d'eux. (p. 55)
Je ne parle pas du silence qui hurle parfois dans mes oreilles.
Chez certaines personnes, on ne remarque pas leur bizarrerie, mais on en a tous une.
[Rachel, 13 ans]
Sauf la fois où Patty m'avait interrogée sur le sujet, je ne m'étais pas demandé si j'aimais ou non l'embrasser. Je savais seulement que cela me conférait de la valeur et un statut social. Du simple fait que Teddy Bascom voulait m'embrasser, je me sentais importante.
(p. 140)
Nous nous chuchotions des histoires pendant des heures, sur tout et n'importe quoi. Le chien que Patty choisirait si notre mère l'autorisait à en posséder un : un adorable chiot ou un vieux abandonné qui aurait vraiment besoin d'un foyer ? Que devenait le corps après la mort ? Et - après avoir vu Les dents de la mer - si on voudrait encore vivre après qu'un requin nous aurait arraché bras et jambes (Où fixer la limite : deux jambes, un bras ? Les deux jambes ? Un bras et une jambe ?)
Et je voyagerais, accumulant les aventures au cours des recherches qui me serviraient à écrire mes livres, parfois je m'envolerais pour telle ou telle ville rencontrer mes fans, qui feraient la queue pour se faire dédicacer mon dernier best-seller, et qui, arrivés devant moi, me diraient que c'était la meilleure chose qu'ils avaient jamais lue, à l'exception du Journal d'Anne Franck ou de Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur.