UN bon roman policier qui nous transporte dans le New York des années 50
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Je me présente : Cannon.
Je suis ivrogne ; il vaut mieux que ce soit entendu une fois pour toutes, dès le début. Pourquoi je bois ? Parce que j’en ai envie. Il y a des jours où je tiens une mufflée à tomber complètement asphyxié, d’autres où je me sens heureux comme un poisson dans l’eau ; il m’arrive aussi d’être rigoureusement à jeun, mais pas très souvent. En fait, la biture est mon état normal. J’habite d’ailleurs un quartier où ce n’est pas un péché d’être saoul, bien que ce puisse devenir un délit pour peu que la police se lance dans une campagne de salubrité publique. J’habite la Bowery, à New York.
Quand les flics verront ces initiales, ils vont s’imaginer que c’est du tout cuit. Ils vont t’écrouer en deux temps trois mouvements. Ce qui fait que toi, tu seras en taule, et le véritable assassin en liberté. À ce moment-là, la police va ouvrir son enquête. Les services du D. A. feront de leur mieux pour déterrer des indices capables d’étayer l’accusation ; ils disposent déjà de ce qui équivaut à la déclaration d’un mourant. À quoi viendront s’ajouter probablement deux balles provenant de ton revolver. Ayant déjà un meurtrier en cabane, ils ne vont pas se donner beaucoup de mal pour en trouver un autre.
La forte femme disparut alors pour faire place à une petite fille inconsolable. Les larmes se mirent à couler sur ses joues. Elle chercha un mouchoir et, n’en trouvant pas, elle quitta la pièce en courant et se réfugia dans la cuisine où elle se mit à brailler sans pudeur dans un torchon.
J’aimerais mieux être homme-grenouille et aller accrocher des bombes atomiques sur les navires de guerre russes, plutôt que d’annoncer à quelqu’un la mort d’un être cher. La mort n’a rien d’amusant. Sa nouvelle vous atteint toujours en plein entre les yeux ; c’est un coup épouvantable qui vous coupe le souffle et vous fait subir le martyre. Et la réaction n’est pas différente quand on joue la comédie. Il est pour ainsi dire impossible de distinguer entre l’émotion authentique et l’émotion bidon ; de sorte que l’annonce d’une mort provoque toujours la même réaction.
Être vivant, ça doit être formidable. On ne me voit d’ailleurs jamais dans ce petit jardin pendant l’année scolaire. Mais j’y vais l’été ; quand il est désert. On peut, alors, rester assis sur un banc à regarder la statue de Peter Cooper. On se sent protégé, isolé, au milieu d’une ville fiévreuse et gigantesque. De temps à autre, un flic s’amène pour vous dire de circuler. Mais, la plupart du temps, on peut rester là, solitaire perdu au cœur de la multitude.
"À chacun son heure" ("No Time to Die", 1992), Saison 11, Épisode 2 de la série TV Columbo, tiré du roman "N'épousez pas un flic" ("So Long as You Both Shall Live", 1976) d'Ed McBain. Extrait.