Chroniques douces-amères
Stephen Mc Cauley compte déjà de nombreux fans des deux côtés de l'Atlantique. Avec son dernier ouvrage
L'(autre) homme de ma vie, il risque de conquérir de nouveaux lecteurs avec son regard acéré sur la société américaine et la justesse de son ton quand il parle de l‘existence.
Le héros de son dernier livre, Richard Rossi, mène une vie tranquille à Boston entre son petit ami Conrad et son amant Benjamin, un homme marié père de deux enfants. La routine de son existence rythmée par son travail dans une société de d'édition de logiciels informatiques et ses entraînements dans les salles de sport va subitement être remise en cause. Il découvre un message sur le portable de son aimé qui fait naître le doute en lui. Pour compliquer les choses, Conrad se met à passer beaucoup de temps dans la petite ville de Colombus…
Au premier abord, ce qui pourrait passer pour des considérations ennuyeuses et plates sur le quotidien est littéralement transformé par l'écriture de notre auteur. Son regard est juste et son cynisme fait mouche à chaque fois. Richard s'étonne toujours de la bêtise de Bush lorsqu'il allume la TV ou surfe sur des forums politiques. Il s'amuse également à disséquer les comportements de ses proches - des restes de son ancien travail de psy. Il analyse ainsi Benjamin, son amant :
« J'en étais arrivé à la conclusion que, chaque fois qu'on baisait ensemble, il pensait qu'en se laissant totalement aller, en explorant le moindre désir refoulé, il finirait par s'en débarrasser pour de bon, et n'aurait plus besoin de moi ni d'aucun homme. Ce que je considérais comme un acte érotique et sensuel, une expression d'affection, était pour lui un acte d'exorcisme. J'espérais que la satisfaction que je prenais soin de lui apporter me rendrait, à un certain niveau, indispensable. Il espérait me rendre superflu. »
L'humour de Richard reste malgré tout toujours grinçant et la tonalité qui ressort de ses réflexions est assez sombre. En observant le monde qui l'entoure, il en revient toujours à réfléchir sur l'âge, sur le temps qui passe et sur ses choix de vie. le doute qui naît de sa relation avec Conrad le « réveille » et lui permettra de voir ce qui importe le plus pour lui.
Au final,
L'(autre) homme de ma vie se révèle être un ouvrage plus profond que l'on ne pense. C'est le constat que fait un homme de cinquante ans sur ses amours, son entourage et ce qu'il veut vraiment. Comme Richard, chacun devrait prendre le quotidien avec philosophie, même si cela suppose d'accepter ce que l'on est - et ce que l'on n'est plus - et de savoir renoncer au superflu.
Public concerné : Les amateurs de cynisme, ceux qui veulent découvrir
Stephen McCauley