Citations sur Frankie Addams (57)
Le terrible, avec moi, c'est que pendant longtemps je n'ai été qu'un Je. Tout le monde fait partie d'un Nous, sauf moi. Si on ne fait pas partie d'un Nous, on se sent vraiment trop seul.
- Cette chose que je voulais dire, j'en ai une vague idée je crois. Tous on est comme des prisonniers. On vient au monde dans un endroit ou dans un autre, et on sait pas pourquoi. Mais on est quand même des prisonniers. Moi je suis née Bérénice. Toi tu es née Frankie. John Henry, il est né John Henry. Et peut-être qu'on voudrait s'évader et être libre. Mais on a beau faire, toujours on reste prisonnier. Moi je suis moi et toi tu es toi et lui il est lui. Chacun de nous il est comme prisonnier de lui-même. C'est pas ça que tu voulais dire?
Elle pensait au monde, et il était rapide et fissuré, et il tournait, plus rapide, plus fissuré, plus immense que jamais. Les images de la guerre surgissaient et se confondaient dans son esprit. Elle voyait des îles claires avec beaucoup de fleurs, et un pays baigné par la mer du Nord avec des vagues grises sur la plage. Des yeux gonflés d'épuisement et le piétinement sourd des soldats. Des tanks, et un avion en feu, les ailes arrachées, qui tournait en tombant dans le ciel vide. Le monde était fissuré par le fracas de la guerre, et tournait à mille miles à la minute.
"Parce que moi, je suis noire. Parce que moi, je suis une femme de couleur. Tout le monde est prisonnier d'une façon ou d'une autre. Mais nous, les gens de couleur, c'est des frontières supplémentaires qu'on a tracées autour de nous. On nous a obligés à vivre parqués dans un coin tous ensemble. Alors on est prisonniers une première fois, comme j'ai dit, parce que tous les êtres humains sont prisonniers. Et on est prisonniers une deuxième fois parce qu'on est des gens de couleur. (p165)
Car, à ce moment précis, Frankie comprit. Elle comprit qui elle était et comment elle trouverait sa place dans le monde. Son cœur était tellement serré qu'il s'ouvrit tout d'un coup en deux. Son cœur s'ouvrit en deux comme deux ailes.
On est là - à cet instant précis. À cette minute précise. Maintenant. Et pendant qu'on parle, cette minute passe. Et elle ne reviendra jamais. Où que ce soit dans le monde. Quand elle est passée, elle est passée. Aucun pouvoir sur terre ne pourra l'obliger à revenir. Elle est définitivement passée. Tu as déjà pensé à cela ?
- Souvent, c'est pendant un voyage comme ça qu'un petit ami vous arrive.
- Ce n'est pas de ça que je parle dit F. Jasmine. Pas du tout.
Au bout d'un moment, elle ajouta, toujours debout devant le seuil du perron :
- Le vrai sujet de conversation, on passe toujours plus ou moins à côté.
C'est cet été-là que Franckie en avait eu assez d'être Franckie. C'était comme une maladie. Elle se haïssait. Elle était devenue quelqu'un qui rôde, qui traîne, qui passe ses journées d'été dans la cuisine, à ne rien faire de bon : toujours sale, toujours en train de manger, toujours triste et misérable.
« C’est arrivé au cours de cet été si vert qu’on en devenait fou. Frankie avait douze ans. Elle n’était membre de rien, cet été-là. Elle ne faisait partie d’aucun club, ni de quoi que ce soit au monde. Elle se sentait, sans aucune attache, et elle rôdait autour des portes, et elle avait peur. »
La guerre et le monde étaient trop rapides, immenses et étranges. Lorsqu'elle pensait longtemps au monde elle avait peur.